Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
10 octobre 2013 4 10 /10 /octobre /2013 18:05

 

Incinérateur de Toulon : la justice enquête sur des soupçons de favoritisme

|  Par Mathilde Mathieu

 

 

 

D’après nos informations, une enquête préliminaire a été ouverte sur les conditions d’attribution au groupe Pizzorno du marché de l’incinérateur de Toulon. Montant du contrat : 470 millions d’euros sur dix-huit ans.

 

Pour le groupe Pizzorno, était-ce vraiment une divine surprise ? Fin 2012, cette société varoise, spécialisée dans le traitement de déchets, a décroché à la stupéfaction générale le marché de l'incinérateur de Toulon, au nez et à la barbe de géants du secteur, Suez environnement et Veolia. D’après nos informations, les conditions d’attribution de cette délégation de service public font aujourd’hui l’objet d’une enquête préliminaire ouverte dans la plus grande discrétion par le parquet de Toulon, sur des faits présumés de favoritisme notamment.

Début 2013, la justice a en effet reçu un courrier anonyme très circonstancié qui a jeté le soupçon sur la procédure d’appel d’offres, suggérant que le groupe Pizzorno aurait « fluidifié » les relations avec certains acteurs locaux pour s’assurer le contrat (remporté en association avec la société parisienne Idex).

 

L'incinérateur de Toulon, d'une capacité de 270 000 tonnes de déchets par an 
L'incinérateur de Toulon, d'une capacité de 270 000 tonnes de déchets par an© DR

Cet énorme marché de 470 millions d’euros sur dix-huit ans, qui a démarré au 1er janvier 2013, comporte l'exploitation et la modernisation de l'incinérateur (d'une capacité de 270 000 tonnes de déchets par an), ainsi que du réseau de chaleur induite qui alimente des milliers de logements.

Après des mois de négociations, le groupe Pizzorno a été retenu sur décision du Sittomat (le syndicat qui gère l’usine pour les 26 communes de l’agglomération), une structure présidée par Jean-Guy Di Giorgio, vice-président du conseil général et adjoint du maire UMP de Toulon, Hubert Falco.

Compte tenu de l’ampleur des irrégularités supposées, le parquet de la ville s’est dessaisi du dossier au printemps 2013 au profit du pôle financier spécialisé de Marseille.

Depuis, la police judiciaire s’efforce de tirer les fils et de saisir le drôle de fonctionnement de Pizzorno, petite entreprise familiale de Draguignan qui s’est muée, en 40 ans, en un groupe coté en bourse, capable de tailler des croupières à Suez et Veolia jusqu’à Lyon ou Paris, et implanté au Maroc ou en Mauritanie.

Interrogé sur l'affaire de l'incinérateur par l'intermédiaire de son chargé de communication, l'entreprise affirme que « toutes les étapes prévues par la procédure ont été respectées » (lire l'intégralité de la réponse sous l'onglet Prolonger). De son côté, Jean-Guy Di Giorgio fait répondre le directeur général du Sittomat, Jean-François Fogacci : « Nous ne sommes pas au courant de cette enquête. Pourquoi aurait-on privilégié un candidat l'un par rapport à l'autre ?! Nous avions pris un bureau d'études, qui a analysé les trois offres, fait une proposition, puis les élus ont fait leur choix. »

D'après nos informations, les enquêteurs auraient d’ores et déjà récupéré certains éléments suggérant l’existence d’une comptabilité truquée chez Pizzorno destinée à décaisser des espèces, qu'ils s'efforcent de vérifier.

Dans le Var, l'entreprise s'est certes bâti un quasi-monopole sur la collecte et le traitement des ordures, mais elle n'avait jamais exploité le moindre incinérateur jusqu’à présent – c’est d'ailleurs pour pallier cette inexpérience et crédibiliser son offre que le groupe varois s’est associé avec Idex, plus rodé en la matière. Afin de rassurer des représentants des salariés inquiets, lors d'un comité d'établissement de janvier 2013, un dirigeant de Pizzorno leur a d'ailleurs assené : « On va apprendre ! »

Si Francis Pizzorno, le fondateur de l’entreprise, a démarré sa carrière dans la roue d’un élu socialiste (le sulfureux sénateur et maire de Draguignan Édouard Soldani), il a surtout tissé son réseau à droite ces dernières années, recrutant par exemple François Léotard. L'entregent de l'ancien ministre de la défense, natif de Fréjus et administrateur du groupe depuis 2008 (pour 120 000 euros par an), semble d'ailleurs avoir accompli des miracles en Afrique – en 2011, les autorités tunisiennes l’ont cependant accusé d’avoir aidé le groupe à décrocher « de manière irrégulière » son contrat sur la décharge de Tunis, signé sous Ben Ali.

 

Francis Pizzorno, fondateur du groupe et PDG 
Francis Pizzorno, fondateur du groupe et PDG© DR

En 2007, en tout cas, Francis Pizzorno, un ancien parachutiste qui porte la cravate comme le blouson en cuir, avait tout misé sur Nicolas Sarkozy, au point d’adhérer au Premier cercle, le club des plus gros donateurs de l’UMP, en compagnie de sa directrice financière, de son directeur général, de son directeur juridique ou de son directeur propreté, qui ont tous signé un chèque de 3 000 euros minimum (lire nos révélations sur les donateurs du Premier cercle).

Plus qu’intriguée par ce tableau général, la filiale de Suez environnement qui a perdu l’appel d’offres déclare à Mediapart qu’elle a « déposé un recours » devant le tribunal administratif pour contester l'attribution du marché – fait rare dans un secteur où le silence est d’or. D’après nos informations, la préfecture du Var a fait de même dans une requête déposée en mai dernier, et toujours en cours d’instruction, estimant que la procédure était entachée de plusieurs irrégularités.

« Le président du Sittomat (Jean-Guy Di Giorgio) a publié le 16 novembre 2012 un avis d’intention de conclure (au bénéfice de Pizzorno), qui mentionnait la future décision du conseil du Sittomat du 30 novembre 2012, souligne-t-on à la préfecture. En clair, l’assemblée délibérante du syndicat n’a fait qu’entériner une décision déjà prise par le président. » Dit encore autrement : beaucoup de choses se sont jouées en coulisse.

La préfecture conteste également la compétence du Sittomat à déléguer l’exploitation du réseau de chaleur, en plus de l’incinérateur.

Au printemps 2013, Pizzorno avait déjà vu deux de ses filiales condamnées par la cour d’appel d’Aix-en-Provence pour le stockage sans autorisation de certains déchets sur sa décharge de Bagnols-en-Forêt, ainsi que pour des faux en écriture – le groupe s'est depuis pourvu en cassation. Il avait toutefois été relaxé du « délit de pollution ».

 

 

 

Partager cet article
Repost0
10 octobre 2013 4 10 /10 /octobre /2013 17:51

 

mediapart.fr

 

Quand la grande distribution étouffe ses franchisés

|  Par Dan Israel

 

 

Il ne fait pas toujours bon être propriétaire d'un magasin franchisé du groupe Casino : on risque de se faire facturer la marchandise plus cher qu'un simple consommateur aux caisses d'un banal supermarché. Une situation insensée que vivent de nombreux franchisés Spar. Et les autres poids lourds du secteur sont tout aussi habiles.

 

Tous les jours, Ara Apinian monte dans son 4×4, traverse une bonne partie de Marseille, et va faire les courses. Tous les jours, trois ou quatre fois par jour. Et à chaque fois, il remplit jusqu’à la gueule son véhicule. L’homme n’est pas père de famille nombreuse ; il est… gérant de supérette, sous l’enseigne Spar (groupe Casino). Et s’il est contraint de se ravitailler au Géant de la Valentine, qui appartient au même groupe Casino, c’est que les prix de gros auxquels il a droit via la centrale d’achat Casino sont prohibitifs.

Acheter dans les règles, selon les termes du contrat qui le lie au groupe, revient à débourser, hors taxe, plus que ce que le consommateur lambda paye aux caisses des gros supermarchés et des hypermarchés du groupe. Parfois 30 ou 40 % de plus ! À cela, il faut ajouter des « coûts logistiques », facturés par Casino pour assurer la livraison des denrées. En fonction du type de magasin et du montant total des commandes annuelles, ces frais vont de 0 à plus de 3 % du chiffre d’affaires annuel de chaque commerce. Sans oublier la marge nécessaire pour faire fonctionner le magasin et se payer – autour de 25 à 29 %, estiment la plupart des professionnels.

La situation d’Ara Apinian n'est pas isolée. Un peu partout en France, dans le réseau des quelque 700 magasins Spar franchisés (sur 920 Spar en France), et plus généralement chez les plus de 5 000 franchisés Casino labellisés « proximité », le constat est fréquent. « Le groupe vend, hors taxe, à ses franchisés, des produits régulièrement 10 à 30 % plus cher que ce qu’on peut trouver dans les rayons d’un supermarché classique », indique Nicolas Slim, représentant du Sefag, un petit syndicat rassemblant les commerçants indépendants, très actif sur le sujet. « Les commerçants signent un contrat de franchise pour bénéficier d’un concept attractif et de tarifs intéressants. C’est loin d’être toujours le cas. »

Interrogé sur cette question brûlante, le groupe, dirigé et contrôlé en majorité par Jean-Charles Naouri, 62e fortune de France selon Challenges, indique qu'il ne communique pas sur sa politique tarifaire, « compte tenu de la concurrence exacerbée entre enseignes ». Il assure tout de même que « ce n’est pas sur la base de quelques cas isolés de différences de prix qu’il faut généraliser (...) : les prix varient d'une centrale d'achat à l'autre et dépendent de multiples facteurs » (voir la liste complète de nos questions et les réponses du groupe dans l'onglet Prolonger).

Les relations les plus compliquées entre groupe de grande distribution et franchisés se retrouvent chez Casino, mais aussi chez Carrefour (et particulièrement ses enseignes Dia, qui sont récemment massivement passées sous franchise). Deux groupes « intégrés » et verticaux, à l’inverse des enseignes « coopératives » (Intermarché, Leclerc, Système U), où les intérêts de chaque commerçant sont (un peu) mieux pris en compte. La situation n’est pas nouvelle, mais peu racontée, notamment dans la presse. À notre connaissance, les dernières grandes enquêtes sur le sujet datent de 2009 dans Marianne (article repris ici) et de 2011 dans Le Point.

Lorsqu’il ouvre son magasin avec sa femme en mai 2010, Ara Apinian ne pense pas se retrouver si vite en difficulté. Le couple est salarié depuis six ans d’un Petit Casino et estime avoir les épaules pour faire tourner un magasin dans le centre de Marseille, aidé d’un employé. Ils déboursent 260 000 euros, mettent toutes leurs économies dans l’affaire et hypothèquent leur maison.

 

Ara Apinian 
Ara Apinian© Louise Fessard

La première année, tout se passe correctement, leur chiffre d’affaires effectif – aux alentours de 700 000 euros – n’est pas loin de celui que leur promettait Casino dans le « prévisionnel » qui leur a été soumis pour les convaincre de devenir franchisés. Mais en 2012, le chiffre d’affaires annuel a chuté à 400 000 euros. « Dès novembre 2011, les difficultés ont commencé, indique le commerçant. Nous avons vite compris que les prix que nous payions pour acheter nos marchandises augmentaient progressivement », raconte Apinian. En quelques mois, l’augmentation imposée par la centrale Casino atteindrait les 30 % en moyenne.

À la hausse régulière des prix est venue s’ajouter l’ouverture en rafale de cinq commerces de bouche, de toutes tailles, dans les environs du magasin. « En novembre 2011, un commerce d’alimentation générale situé à 100 mètres de mon magasin, a été remplacé par un Vival, une marque qui appartient aussi à Casino, s’indigne Apinian. Personne ne m’a prévenu, et bien sûr cette concurrence venue du même groupe n’était pas mentionnée dans le prévisionnel que la direction m’avait fourni. » Quatre autres commerces ont suivi, dont un supermarché… Casino.

« Ces situations ressemblent à des gags »

 

Ara Apinian présente les factures d'achat d'une demi-semaine de ravitaillement à l'hypermarché 
Ara Apinian présente les factures d'achat d'une demi-semaine de ravitaillement à l'hypermarché© Louise Fessard

Via son système informatique centralisé, Casino informe chaque franchisé du prix qu’il lui facture pour lui vendre et lui livrer le produit. Mais il propose aussi un « prix de vente conseillé » à la clientèle. Sauf en cas d’intervention spécifique du commerçant, c’est le prix qui est automatiquement imprimé sur l’étiquette présentant le produit dans les étalages. Aujourd’hui, si la supérette marseillaise suivait la politique commerciale préconisée par le groupe, ses prix seraient… « 60 % à 100 % plus élevés que le Casino d’à côté, c’est du délire », s’emporte Apinian. Effrayés par ces prix, les clients désertent, même si le franchisé pratique des tarifs inférieurs à ceux que lui recommande le groupe. Résultat, sa marge se réduit de mois en mois, sa trésorerie fond, il ne fait plus de bénéfices.

Le couple a envoyé trois lettres recommandées à la direction régionale pour demander des explications. Ils n’ont obtenu de réponse qu’à la dernière. « Le directeur commercial régional a reconnu qu’il y avait des anomalies, et qu’ils travaillaient dessus », indique le commerçant. Cette même réponse, agrémentée de diverses explications toujours différentes, sera servie pendant près d’un an au couple. Sans aucune modification des tarifs qui leur sont concédés.

La situation financière du commerce s’est rapidement dégradée. « Ma femme était cogérante, elle a démissionné officiellement pour ne plus payer les 1 200 euros mensuels de RSI (la sécurité sociale obligatoire des indépendants, ndlr). Nous ne nous sommes pas versés de salaire depuis six mois, alors que c’était notre seule ressource. J’ai deux enfants. Ils (Casino, ndlr) sont en train de me tuer, nous sommes dans une impasse. »

Le commerçant a accumulé les dettes. « Je ne paye plus les factures, c’est de la folie », reconnaît-il. Il collectionne les impayés de loyers, qu’il régularise lorsqu’il le peut. Il n’a pas réglé 24 000 euros de marchandises à Casino, et avec les droits qu’il est censé payer tous les mois au titre de la franchise, ses dettes envers son franchiseur atteignent aujourd’hui plus de 30 000 euros. Logiquement, il n’est donc plus livré par la centrale depuis janvier. Cela fait plusieurs mois que les courses chez Géant et d’autres concurrents, au gré des promotions, étaient régulières. Elles sont désormais la règle.

Révolté par sa situation, Ara Apinian a lancé une procédure devant le tribunal de commerce en septembre 2012. Il vient d’être débouté. Et compte faire appel. « Nous contestons les tarifs qui sont appliqués à M. Apinian, et estimons qu’il y a à la fois disproportions entre les parties au contrat, et abus dans le droit à fixer son prix de la part de Casino », résume son avocat, Michaël Bismuth.

L'avocat a aussi essayé de démontrer que le contrat de franchise imposait un approvisionnement exclusif auprès de Casino. Le tribunal ne l’a pas plus suivi que sur les autres points. Il est vrai que la seule règle explicitement énoncée dans le contrat concerne les marques de distributeurs, un magasin Casino ne pouvant pas proposer de produits Carrefour par exemple. « En règle générale, face à ces grandes enseignes, on perd au tribunal de commerce, composé de magistrats non professionnels, mais on peut gagner en appel », veut néanmoins croire l’avocat.

Tous ses confrères ne sont pas aussi optimistes. Jean-François Tessler est spécialisé sur ces questions. Et des cas semblables à celui d’Ara Apinian, il en voit passer très régulièrement. « Le franchisé plus mal traité que le consommateur dans un hypermarché, c’est un classique », estime-t-il. Et cela ne concerne pas que Casino : « Il y a régulièrement le même problème chez Carrefour. Ces situations ressemblent à des gags, pointe-t-il. Mais derrière, il y a des drames humains. Et on a du mal à faire admettre aux tribunaux que la relation franchiseur-franchisé est totalement déséquilibrée. »Le groupe Casino, lui, se félicite justement du nombre « anecdotique » de litiges, « au regard du nombre de franchisés constituant nos réseaux ». Il rappelle aussi qu'il n'a pas été condamné sur la question du tarifaire ces cinq dernières années.

« Dans le meilleur des cas, le franchisé gagne tout juste sa vie »

Un autre avocat, qui parle carrément de « surfacturation », estime les situations conflictuelles à des centaines sur les dernières années. Et encore, assure Nicolas Slim, du Sefag, « il y a beaucoup de commerçants concernés qui font le dos rond en espérant ne pas faire d’histoires. Ils tentent d’éviter les procès… ». « C’est un système de fausse franchise, critique Me Tessler. L’investissement, les risques, la législation sociale pèsent sur le franchisé seul, qui travaille 15 heures par jour, 6 jours sur 7. La marge, elle, va au groupe franchiseur pour l’essentiel. Dans le meilleur des cas, le franchisé gagne tout juste sa vie. »

Comment expliquer ce choix stratégique de la part de la grande distribution ? En ce qui concerne Casino, Nicolas Slim ne tourne pas autour du pot : « Les ventes de Géant Casino ont reculé de 10 % au deuxième trimestre 2013, et les supermarchés Casino ont perdu presque 9 % », rappelle-t-il. Et sur l'année 2012, les ventes dans les hypermarchés avaient déjà reculé de presque 8 %. Casino n'a donc pas d'autre choix que de faire baisser fortement ses prix dans ses grands magasins, pour redevenir concurrentiel. Pris dans cette féroce et coûteuse bataille, le groupe chercherait donc à gagner rapidement de l’argent là où c’est encore possible. Sur le dos de ses propres troupes. « Même si le chiffre d’affaires de ces magasins est relativement faible, le volume de marchandises que l’ensemble de ces magasins commandent auprès des centrales régionales de Casino est considérable, analyse le syndicaliste. Ces franchisés constituent en fait pour Casino des rentes importantes. »

« Il est incontestable que les augmentations sont régulières et notables depuis trois ans », témoigne le propriétaire d’un Spar du Nord de la France, qui a lui aussi engagé une procédure judiciaire. Sur les produits achetés à la centrale, nous vendons plus cher que ce que préconise le groupe pour nous en tirer. Résultat, chez Géant, 90 % des produits sont moins chers que chez nous… Nous bossons de 7 heures à 22 heures, nous n’avons plus de vie de famille, nous ne nous en sortons plus, en deux ans, on a perdu 30 % du chiffre d’affaires ! Heureusement qu’on a fini de rembourser le crédit, sinon on aurait les huissiers sur le dos. Notre contrat de franchise dure encore quelques années. Après, on change de crèmerie ! »

Les gérants multiplient les relevés de prix

La question des prix d’achat, et de vente conseillés, revient encore et encore lorsqu’on interroge les franchisés. Mediapart a pris connaissance d’une dizaine de cas où ce point est très sensible. À Marseille encore, Hazem Dohset, propriétaire d’un petit supermarché Spar depuis 2006, ne voit pas d’autre explication à sa perte inexorable d’argent depuis de longs mois. « Aujourd’hui, mon entreprise risque d’être placée en procédure de sauvegarde, pour la protéger contre ses créanciers, parce que nous perdons trop d’argent, 40 000 euros par an depuis 2009. J’ai dû passer de onze à trois salariés, et j’ai remis de ma poche, 30 à 40 000 euros dans l’affaire en moins d’un an, témoigne-t-il. En deux ans, ma marge annuelle est passée de 27 % à 24 %. Or, mon magasin fait à peu près le même chiffre d’affaires chaque année, et le volume de mes achats est resté stable. Ce sont donc les prix d’achat à la centrale qui montent… »

Le gérant dénonce par ailleurs, comme d’autres, des incohérences dans la politique de prix de Casino. « Mon magasin fait 500 mètres carrés et on m’applique les prix d’une petite supérette, assure-t-il. Et que j’achète un carton de six ou de vingt-cinq produits, le tarif est le même. Sans compter que parfois, si on applique les prix conseillés, on en vient à vendre des produits aux clients moins chers que ce que nous les avons achetés ! » Or en France, la vente à perte est illégale.

Pour démontrer l’aberration du système dans lequel ils sont plongés, de nombreux propriétaires de magasins Spar ont recours à la même méthode : effectuer des relevés de prix, parfois établis par des huissiers, chez la concurrence, pour prouver que des produits identiques, conditionnés de la même façon, leur sont facturés plus cher par Casino que les prix de vente publics consentis aux consommateurs classiques.

Hazem Dohset a multiplié ces relevés de prix. Tout comme un franchisé auvergnat actuellement en pleine procédure judiciaire, qui voit « apparaître un écart moyen de 9 % » entre les tarifs du Géant Casino et ses prix d’achat, auxquels il doit encore ajouter 2,5 % de coûts logistiques. Mais aucun propriétaire de Spar n’a sans doute poussé l’art du relevé de prix au même niveau que celui qui a repris il y a quelques années un magasin dans l'est de la France. Méthodique dans sa contestation de la politique tarifaire de Casino, il s’est coordonné avec d’autres magasins du nord-est. Ensemble, ils ont organisé une réunion de franchisés, multiplié les courriers, et obtenu de rencontrer le responsable national de la branche « proximité » du groupe.

Faire ses emplettes chez la concurrence

Presque chaque semaine, le franchisé du nord-est relève les prix. Ceux auxquels le groupe lui facture les produits, ceux auxquels il lui est conseillé de les vendre, et l’écart avec la concurrence. Les résultats, édifiants, sont expédiés sans faute à ses collègues du coin et aux directions régionale et nationale du groupe. Chiffres en main, lui a tranché. Comme beaucoup d’autres, et puisque Casino lui en reconnaît le droit (certains franchisés se sont même vu conseiller d’acheter un camion frigorifique pour aller faire leurs emplettes ailleurs !), il va se fournir chez la concurrence.

« En un an, j’ai effectué 100 000 euros de commandes chez Métro, soit plus de 10 % de mes achats, détaille-t-il. J’ai de la chance, Métro me livre, mais je commande aussi via internet chez Leclerc drive. Il faut alors se déplacer. Je faisais la même chose chez Géant drive, mais mon compte a été fermé au bout de trois semaines. J’achète aussi mes produits régionaux chez des fournisseurs locaux, et je traque les promotions un peu partout. » Il estime que, fin 2012, 15 % de ses achats totaux étaient effectués ailleurs que chez Casino. Mais la proportion gonfle vite : fin septembre 2013, « c’était plutôt 30 % ! ».

Un des avantages du contrat de franchise est de pouvoir bénéficier d’un système de commande simple, et de la livraison au pied du magasin de tous les produits achetés à la centrale. Mais avec la multiplication de ses fournisseurs, le commerçant estime perdre au moins huit heures par semaine entre les passages de commandes, les déplacements et la manutention des produits.

Un nouveau « tarifaire » indigeste ?

Pour répondre à toutes les critiques sur les prix, Casino a décidé de proposer un nouveau « tarifaire », aux conditions qu’elle présente comme bien plus intéressantes pour ses franchisés. Mais ces nouveaux tarifs, dénoncent des commerçants critiques, reposeraient en bonne partie sur des baisses de prix accordées seulement en cas de hausse importante du volume de commande, par le biais de ristournes et de coûts logistiques plus doux. Ce que conteste le franchiseur, qui rappelle que « l’élaboration de ce nouveau tarifaire a d’ailleurs été faite en coordination avec un groupe de franchisés ».

Quant aux prix eux-mêmes, le franchisé de l'est de la France les a étudiés de près, et il n’est pas convaincu par les évolutions proposées : « Le groupe consent un gros effort, allant jusqu’à une baisse des prix de 20 %, pour 300 produits très visibles, des grandes marques nationale. 600 produits ont droit à une baisse correcte, entre 5 et 10 %. Mais tous les autres stagnent ou augmentent. Concernant mon magasin, j'aurai plus de la moitié des produits subissant des hausses de prix de vente ! Si j’opte pour ce nouveau tarifaire, j’obtiendrai une hausse de l'indice de prix de vente entre 3 et 6 %, donc une nouvelle perte de compétitivité par rapport à mes concurrents. Tout cela pour une très faible baisse des prix d’achats, de 1 % environ. »

Les étagères vides du magasin d'Ara Apinian, faute d'approvisionnement 
Les étagères vides du magasin d'Ara Apinian, faute d'approvisionnement© Louise Fessard


Tous les franchisés ne sont pas logés à la même enseigne. En fonction de la taille et de la situation géographique du magasin, Casino lui attribue une grille tarifaire, plus ou moins chère, qui concerne à la fois les prix d’achat et les prix de vente au public. Cette grille est attribuée en fonction du business plan prévisionnel sur plusieurs années, établi avant l’ouverture du magasin. Problème, ce « prévisionnel » est régulièrement accusé d’être bien trop optimiste sur les résultats futurs du magasin.

Ainsi, un franchisé a récemment repris une enseigne Marché U, dont les prix sont en moyenne 30 à 40 % plus bas que ceux de Spar. Le prévisionnel lui annonçait une baisse de 10 % du chiffre d’affaires. En réalité, c’est bien pire. Quelques mois après l’ouverture, ses résultats sont inférieurs de 45 % à ceux que lui promettait son franchiseur. « Pourtant, je connais le secteur, où je suis employé depuis des dizaines d’années, explique le gérant. Mais sans ce prévisionnel, je n’aurais pas signé... »

Le prévisionnel est cité dans plusieurs des procédures judiciaires ouvertes par des franchisés mécontents. Dans le procès mené par le gérant auvergnat déjà cité, les prévisions de Casino, supérieures « de 30 % » à la réalité, sont par exemple interprétées comme un « travestissement de l’information », constitutif d’un « vice du consentement » du signataire. Mais le franchiseur répond invariablement, y compris en justice, que ses prévisionnels sont établis « selon une méthode sérieuse et éprouvée », en collaboration avec les futurs franchisés, et ne constitue d’ailleurs en rien une « étude du marché local » rigoureuse, à laquelle le groupe n’est pas tenue légalement et qui devrait être menée par le candidat à la franchise lui-même. Cela dit, ce prévisionnel optimiste peut aussi bénéficier au commerçant, puisque c'est sur lui que se base le groupe pour lui attribuer à l'ouverture un « budget d'enseigne », à savoir un petit pécule pour réaliser des travaux et se lancer, qui atteint souvent plusieurs dizaines de milliers d'euros.

Des clauses contractuelles problématiques

Les relations contractuelles entre groupes de distribution et franchisés sont épineuses. Nombre de clauses contractuelles, du groupe Casino comme de ses concurrents, sont problématiques. Ainsi de l’adhésion, définie en annexe des contrats, de tous les détaillants Spar à l’association censée les représenter. Cette organisation n’est quasiment pas active, et ne leur permet pas d’échanger sur leurs conditions de travail. « On a seulement reçu un compte-rendu de réunion de bureau cet été, témoigne un franchisé. Jusque-là, rien. Et je paye quand même 10 euros par mois pour ça… » Peu de chances que l’association rue dans les brancards, de toute manière : elle est présidée par le responsable de la branche « proximité » du groupe. Contactée par Mediapart, elle n'a jamais donné suite. Les détaillants Vival (groupe Casino également) dépendent d’une association organisée de la même manière.

Tout aussi mystérieuse, la « formule originale de garantie » que les franchisés Spar souscrivent contre les risques d'exploitation de leur propre magasin, et qui figure en annexe des contrats. Elle est censée couvrir le franchisé en cas de non-paiement de tout ce qu'il doit au groupe : marchandises, redevances enseigne et publicité, location des caisses-enregistreuses, loyers. Cette « garantie spécifique » est négociée par Casino, et c'est Casino qui récolte la redevance, d'un montant de 0,10 % du chiffre d'affaires annuel hors-taxe du magasin. Elle ne remplace pourtant pas les assurances obligatoires que doit souscrire le franchisé. Et dans au moins un cas de conflit, actuellement devant la justice, le franchisé n'a pas pu faire jouer cette garantie, censée le protéger contre sa propre défaillance, faute d'avoir obtenu les références du contrat, ou même les quittances des primes versées.

Plus gênant, l’article 14 du contrat Spar définit l’interdiction pour les franchisés de s’affilier à une enseigne concurrente ou de travailler pour un autre magasin dans le même secteur d’activité, dans un secteur géographique proche de leur commerce. Pendant la durée du contrat de franchise, mais aussi durant l’année qui suit. D'autres groupes, et notamment Carrefour, utilisent ce type de clause de non-réaffiliation dans leurs contrats. Pourtant, des clauses semblables ont été cassées et déclarées nulles à plusieurs reprises par la justice, par exemple par des décisions de la cour d’appel de Paris des 6 mars et 3 avril 2013. Ce qui n’empêche pas les franchiseurs de continuer à inclure ces conditions dans leurs contrats. Casino assure d'ailleurs que « les décisions visées ne concernent pas le groupe Casino, mais d’autres enseignes concurrentes » et précise que « la clause de non-concurrence insérée dans nos contrats de franchise SPAR a été validée par la Cour de cassation », dans un arrêt effectivement rendu le 24 novembre 2009.

Les délices de l'arbitrage

Le groupe de distribution a beau jeu de renvoyer la balle à son concurrent principal, Carrefour. Ce dernier s’est en effet fait une spécialité de procédures destinées à coincer de manière durable ses franchisés dans ses filets. Par exemple, prendre 26 % des parts de la société de ses franchisés. Ce qui lui offre une minorité de blocage pour empêcher qu’ils changent d’enseigne, ainsi qu’un droit de regard sur le choix d’un repreneur lorsque les commerçants souhaitent passer la main. La grande distribution est aussi habituée à s’assurer une clause de préemption si les immeubles où sont logés leurs franchisés sont mis en vente.

Autre astuce redoutable trouvée par Casino pour s’éviter des conflits trop désagréables avec ses troupes : le contrat de franchise stipule qu’en cas de désaccord, il faudra trancher en passant par un arbitrage, et non par la justice ordinaire. Une pratique courante du monde des affaires qui permet de régler un différend en nommant des personnalités qualifiées extérieures… et qui coûte très cher : entre 35 000 et 45 000 euros en général. De quoi faire réfléchir les franchisés mécontents. De plus, les décisions rendues sont confidentielles, et seul le groupe les connaît toutes.

Autre bonus intéressant dans un arbitrage : un groupe industriel peut choisir de désigner très régulièrement le même arbitre. Et puisque chaque affaire jugée rapporte plusieurs dizaines de milliers d’euros à cet expert, il lui faut donc de ne pas être trop désagréable envers le groupe pour être désigné la fois suivante. Dans un arrêt du 20 octobre 2010, la Cour de cassation a ainsi relevé qu'un professeur de droit avait été désigné par le groupe Bouygues 51 fois !

En 2007, le Sefag avait saisi le Conseil de la concurrence contre Carrefour, l’accusant d'empêcher ses franchisés de changer de réseau ou de céder leur fonds de commerce à des concurrents. En mars 2010, l'institution, renommée Autorité de la concurrence, a relaxé Carrefour. Mais elle s’est immédiatement autosaisie sur la question des « contrats d'affiliation de magasins indépendants », pour toute la profession. Et le 7 décembre 2010, elle rendait un avis clair et net, estimant que la grande distribution empêchait ses franchisés de passer d’une enseigne à une autre. Les recommandations de l’Autorité avaient été reprises en 2011 dans le projet de loi Lefebvre. Mais le texte n’a jamais abouti, perdu dans la transition politique suite à l’élection de François Hollande. Un nouveau texte sur la consommation, soutenu cette fois par le ministre délégué à l’économie sociale et solidaire Benoît Hamon, a certes été examiné cet été à l’Assemblée. Mais les demandes de l’Autorité de la concurrence n’y ont jamais figuré.

Cette enquête a démarré lorsque j'ai été contacté par Ara Apinian, qui venait de se faire débouter par le tribunal de commerce. Les témoignages ont été rassemblés durant le mois de septembre.

Nous avons joint à plusieurs reprises divers responsables régionaux, ainsi que le responsable national, de la branche proximité du groupe Casino. Aucun ne nous a répondu. Nous avons donc adressé nos demandes à la direction de la communication du groupe, qui nous a fait parvenir des réponses, présentées en intégralité dans l'onglet Prolonger.

Merci à Louise Fessard, qui a pris les photos à Marseille.

 

 

 

Lire aussi

Par Michel Deléan

 

 

 

Partager cet article
Repost0
10 octobre 2013 4 10 /10 /octobre /2013 17:46

 

marianne.net

 

Ceux qui (finalement) font le jeu de Marine Le Pen
Jeudi 10 Octobre 2013 à 05:00

 

Jack Dion
Directeur adjoint de la rédaction de Marianne et grand amateur de théâtre En savoir plus sur cet auteur

 

C’est bien joli de dénoncer Marine Le Pen et de partir en guerre contre le FN à la méthode Désir. Encore faut-il ne pas donner des verges pour se faire battre à chaque élection.

 

ERIC BAUDET/JDD/SIPA
ERIC BAUDET/JDD/SIPA
Le hasard est parfois cruel. Le samedi 5 octobre, le PS organisait un forum pour appeler le bon peuple à résister à la montée du FN. Le premier secrétaire, Harlem Désir, reprenait l’antienne du « Front Républicain » pour s’opposer à l’ennemi public numéro 1, « xénophobe ». Il brandissait alors l’emblème de ce combat décisif : un pin’s où l’on pouvait lire ce slogan digne des grands heures de SOS Racisme (c’était déjà signé Harlem Désir) : « Je dis que le FN est un parti d’extrême droite ».  

Le lendemain, le dimanche 6 octobre, éclatait la bombe de Brignoles (Var), où le candidat frontiste éclatait la gauche et laissait sa concurrente UMP en lambeaux. A la prochaine partielle dévastatrice, le PS hésitera entre l’appel à former de nouvelles Brigades Internationales ou le lancement d’un pistolet à bouchon pour tirer sur la réapparition de la « bête immonde », comme on dit quand on ne sait plus quoi dire. 

Combien de temps faudra-t-il pour réaliser que ce scénario est à jeter aux poubelles de l’histoire ? Il y a belle lurette que la condamnation morale de la famille Le Pen ne fonctionne plus. La diabolisation permanente peut même déboucher sur le contraire de l’effet recherché : conforter les électeurs frontistes dans un choix qui n’est pas de nature « fasciste », comme on le pense encore chez les bobos qui adorent se rejouer le film de la Résistance, mais qui est une manière de condamner des politiques suivies depuis 30 ans par les partis de gouvernement. Une manière confuse et contradictoire, certes, inquiétante assurément, mais qu’il est illusoire de prétendre remettre sur le bon chemin citoyen par des admonestations moralisatrices - a fortiori lorsque la gauche est au pouvoir.  

Car Marine Le Pen ne se contente pas de touiller le vieux fond de sauce traditionnel de l’extrême droite. Elle y a apporté des ingrédients comme la critique de la mondialisation néolibérale, de l’Europe des marchés, de la laïcité à élasticité variable, de l’immigration non régulée. Elle se pose en défenseuse de la nation honnie par l’élite mondialisée, ou des valeurs dites « traditionnelles », présentées par certains comme la première marche vers le Pétainisme new look. Sur tous ces sujets, elle se nourrit des abandons des uns et du silence des autres.    C’est ce qui fait son succès dans les milieux populaires, oubliés ou méprisés par ceux qui se succèdent aux affaires. 

De ce point de vue, Jean-Luc Mélenchon n’a pas tort quand il dit que le principal pourvoyeur de voix FN est à l’Elysée. Se faire élire sur le thème du « changement » tant attendu, fustiger la « finance ennemie » pour ensuite mettre le pays à la diète et mener une politique où la différence avec l’ère sarkozyste tient de l’épaisseur de la feuille de papier à cigarette, c’est le meilleur moyen de fabriquer de futurs électeurs FN.  

Oui, mais alors, dira-t-on, pourquoi le Front de Gauche ne profite-t-il pas davantage d’une telle situation ? La réalité, c’est que malgré ses critiques souvent pertinentes du néolibéralisme, Jean-Luc Mélenchon reste largement inaudible dans des milieux populaires à la recherche d’une réponse simple et d’un ennemi facilement identifiable, quitte à recourir aux boucs émissaires habituels. Son positionnement libertaire sur les sujets sociétaux ne peut que troubler un électorat demandeur de sécurité dans tous les domaines. Voilà pourquoi le vote protestataire, aujourd’hui, s’exprime surtout à travers le canal frontiste. 

Rien n’indique qu’il en sera autrement dans un avenir proche. Le PS pourra opérer tous les moulinets verbaux possibles, rien n’y fera. Le gouvernement pourra spéculer sur les affichages volontaristes d’Arnaud Montebourg ou sur les propos musclés de Manuel Valls, cela ne fera pas disparaître la réalité d’une France qui souffre et qui le fera savoir, fut-ce de la pire des manières.

 

Les deux ministres précités sont eux-mêmes pris au piège. Le premier, car sa phraséologie se heurte à la réalité d’un alignement sur la doxa néolibérale qui ne lui laisse aucune marge de manœuvre. Le second car ses propres outrances politiciennes (sur les Roms, par exemple), doublées d’une efficacité douteuse sur le front de la délinquance, peut apporter de l’eau au moulin de ceux qui sont dans la surenchère permanente. A l’Elysée, une phrase est répétée en boucle : « Face au FN, la question, ce n’est pas c’est bien ou c’est mal, mais ça marche ou ça marche pas ». Pour le moment, ça ne marche pas du tout. 
Partager cet article
Repost0
10 octobre 2013 4 10 /10 /octobre /2013 17:39

 

marianne.net

 

Le FMI change de doctrine ? Fausse alerte !
Jeudi 10 Octobre 2013 à 15:58

 

Thibault Le Berre‏

 

Taxer davantage les plus hauts revenus et leur patrimoine, instaurer une fiscalité verte, penser l’équité des systèmes fiscaux… Le dernier rapport du Fonds Monétaire International (FMI), publié le 9 octobre, a de quoi étonner. Longtemps parangon des doctrines économiques libérales, l’institution internationale n’a pourtant pas perdu ses vieux réflexes.

 

Christine Lagarde, à la tête du FMI - FANG ZHE/CHINE NOUVELLE/SIPA
Christine Lagarde, à la tête du FMI - FANG ZHE/CHINE NOUVELLE/SIPA

« Dans beaucoup de cas il est possible de mobiliser davantage de recettes en augmentant les taux d’imposition des tranches supérieures de revenu. » La phrase peut prêter à sourire, tant elle est logique. Mais quand elle émane d’un rapport du Fonds Monétaire Internationale (FMI), l’on manque de tomber à la renverse. L’institution internationale, créée à la sortie de la Seconde guerre mondiale, prône depuis 1976 la dérégulation de l’économie, l’abaissement du coût du travail, la baisse des dépenses sociales … Mais qu’arrive-t-il donc au phénix du libéralisme ?

Déjà en août dernier, le FMI préconisait à la France « un rythme plus doux d’ajustement » des finances publiques que celui envisagé par le programme de stabilité européen. Cinq mois auparavant, les très influents économistes de Washington remettaient en cause les bienfaits d’une politique de réduction de la dette sur la croissance, politique pourtant imposée par l’institution à la Grèce, à l’Irlande ou au Portugal. 

Fort de ce revirement, le FMI émet de nouvelles propositions pour réduire la dette publique des Etats, dans son rapport publié le 9 octobre et intitulé « Fiscal monitor ». Augmenter « les taux d’imposition des tranches supérieures de revenu » paraît une option « possible pour mobiliser davantage de recettes ». Le patrimoine entre aussi dans la ligne de mire des experts de Washington. « Les recettes potentielles sont très élevées », indique le rapport.

Préconisant même qu’il « faut agir avec fermeté à l’égard des traitements particuliers ». Le rapport pointe aussi le fait que  « les systèmes fiscaux sont devenus moins progressifs et les inégalités se sont intensifiées durant les dix dernières décennies » ; considérant que la fiscalité foncière « demeure sous-utilisée (…) alors qu’elle offre souvent la possibilité d’être plus propice à la croissance et qu’elle est plus progressive que d’autres prélèvements ».

Chantre de la dérégulation, le FMI considère dans son rapport que « les prélèvement bancaires » sont un « progrès » et préconise « l’équité des systèmes fiscaux » comme un « thème de réflexion ». En référence aux « montages fiscaux complexes qu’utilisent les multinationales pour réduire leurs obligations fiscales ». Elle va même jusqu’à préconiser une amélioration de la « tarification efficace du carbone », considérant que « presque tous (les pays) pourraient et devraient imposer mieux ». Il ne faut pourtant pas s’emballer. Le FMI prône toujours le redressement des comptes publics en augmentant la durée d’activités des salariés pour obtenir une retraite ou encore flexibiliser d’avantage le droit du travail.

Surtout, pour revenir au niveau d'endettement qui était le leur en 2007, les pays de la zone euro devraient en moyenne taxer de 10% le capital de tous les ménages qui disposent d'un patrimoine net. Si le FMI semble montrer une attention particulière aux plus hauts revenus, en revanche cette nouvelle taxe concernerait tous les ménages. Pour le FMI, l’épargnant reste donc une vache à lait inépuisable. Les Chypriotes ont senti passer la douloureuse.
 
Il n’est pas non plus arrivé le moment où le FMI préconisera la banqueroute des Etats puisque, la directrice adjointe de son département des finances publiques, Martine Guerguil, considère que le processus d’ajustement budgétaire « s’inscrit dans la durée ». Elle précise tout de même qu’ « il est particulièrement important d’étalonner la composition de l’ajustement budgétaire de manière à renforcer les perspectives de croissance à long terme et à préserver la cohésion ». Que les libéraux de tous poils se rassurent leur muse n’a pas retourné sa veste.

 

 

Partager cet article
Repost0
9 octobre 2013 3 09 /10 /octobre /2013 15:57

 

mediapart.fr

 

Société générale : les confessions d'un trader

|  Par Martine Orange

 

 

Olivier Z. a été trader au moment de l’affaire Kerviel. Il raconte son quotidien, les défaillances des systèmes de la banque, comment Jérôme Kerviel était connu de tous, même à des milliers de kilomètres. Il dit le choc créé par l’affaire et surtout comment les hiérarchies se protègent.

 

La différence de traitement saute aux yeux. De part et d’autre de l’Atlantique, les autorités n’ont manifestement pas la même vision sur la responsabilité des banques, lorsqu’elles sont prises dans des fraudes.

Le mois dernier, JP Morgan a été condamné à payer une amende de 920 millions de dollars aux autorités monétaires et aux autorités de régulation britannique et américaine. Ces dernières reprochent à la banque américaine d’avoir manqué à ses obligations de contrôle et de surveillance et d’avoir failli dans la gestion des risques lors du scandale dit de la baleine de Londres. Celui-ci, lié à des opérations masquées, réalisées par un trader sur des dérivés obligataires, s’est traduit pour la banque par une perte de 6,2 milliards de dollars.

Au même moment, la sénatrice socialiste Marie-Noëlle Lienemann adressait une question écrite au ministre des finances, Pierre Moscovici, pour l’interroger sur les circonstances qui avaient conduit l’État à accepter d’accorder un allègement fiscal de 1,7 milliard d’euros à la Société générale dès mars 2008, à la suite des pertes imputées à Jérôme Kerviel. La sénatrice rappelait ce que dit la loi : le dégrèvement des pertes ne peut être accordé que s’il est prouvé que la fraude n’a bénéficié d’aucune complicité hiérarchique et que s’il est assuré que les systèmes de contrôle ne connaissent pas de faille. « Ainsi, il semblait pour le moins prématuré et peut-être même difficilement fondé d’accorder cette réduction », insistait la sénatrice dans son courrier, avant de demander au ministre de vérifier si cet allégement était justifié, d’autant qu’aucune expertise indépendante n’a été conduite pour établir que les 4,9 milliards d’euros de pertes imputées par la banque à Jérôme Kerviel pouvaient véritablement l’être. Le ministre des finances lui a répondu qu’il vérifierait et lui répondrait « dans le respect du secret fiscal ». (Voir Le cadeau fiscal de Lagarde a servi à payer les actionnaires.)

Mais pour Pierre Moscovici, toute cette affaire est du passé, sur lequel il n’est guère besoin de revenir. La Société générale partage l’analyse. Interrogé ce mardi 8 octobre sur RMC, Frédéric Oudéa, PDG de la banque, a balayé la question sur les suites de l’affaire Kerviel. Tout cela était derrière, maintenant. « Il y a toujours des risques. Mais il y a des contrôles. Je pense qu'aujourd'hui nous sommes à l'abri de ce type d'affaire. Nous avons des contrôles externes et internes. Nous sommes une profession très contrôlée », a-t-il soutenu.

C’est ce refus de la Société générale de reconnaître toute responsabilité, de faire semblant d’avoir changé alors que tout demeure comme avant,  c’est cette omerta organisée jusqu’au sommet de l’État, cet acharnement contre Jérôme Kerviel, désigné comme bouc émissaire facile, qui ont poussé Olivier Z. – son prénom et son nom ont été modifiés à sa demande – à raconter son histoire. Il a été trader à la Société générale, lui aussi. Il était à des milliers de kilomètres de Paris lorsque l’affaire Kerviel a explosé. Il est revenu par la suite à Paris et a travaillé sur le même plateau que le département Delta One, là où travaillait Jérôme Kerviel.  

Il a hésité longtemps avant de raconter son histoire. Puis il s’est dit qu’il ne pouvait plus se taire. Pour avoir vécu à l’intérieur du système, pour avoir pu observer pendant plusieurs années les pratiques de la banque, il est arrivé à la conclusion qu’il ne pouvait cautionner plus longtemps par son silence les arguments présentés par la banque dans l’affaire Kerviel. Voici son témoignage.

Sorti d’une école d’ingénieurs, Olivier Z. rêvait comme tant d’autres de ses congénères d’entrer dans la finance. C’est le début des années 2000. Pour toutes ces générations d’avant la crise, c’est l’endroit où il faut être, là où on pratique le « grand jeu », celui du pouvoir et de l’argent. Aussi, lorsqu’il est embauché comme trader à la Société générale, il est ravi. Que souhaiter de mieux ? La Société générale est considérée comme l'une des plus grandes banques de la planète, l'une de celles aussi qui a le plus développé la banque de finances et d’investissement. Elle est classée alors comme la première banque mondiale dans les dérivés de taux et d’actions. Être trader à la Société générale, c’est une référence dans le monde de la finance.

Pourtant, dès qu’il arrive à son poste de trading, à des milliers de kilomètres de Paris, il s’étonne. Alors qu’il s’attendait à travailler dans un environnement très exigeant mais aussi très performant, il découvre des pratiques et des règles très floues : « Dès mon arrivée à mon poste, j’ai été frappé par les graves défaillances dans les systèmes de la banque : les systèmes de comptabilité et de contrôle de risque ne coïncidaient pas. Il y avait des décalages entre les positions front – ce que les traders pensent avoir réellement – et l’exposition back, qui correspond aux engagements réels pris par la banque face à ses contreparties », raconte-t-il, avant d’expliquer les raisons de ses alarmes : « Le décalage entre le front et le back office est une des grandes craintes des opérateurs : les pertes peuvent aller très vite sur les marchés si on n’a pas une vision exacte des positions. »

À plusieurs reprises, Olivier Z. dit s’être ouvert de ces risques à sa hiérarchie, mais sans retour. Dans sa défense, la banque a toujours dit pourtant qu’elle veillait à améliorer constamment ses systèmes. « La Société générale dépense des centaines de millions en informatique. Elle avait donc les moyens de corriger ces défaillances. Initialement, les opérations fictives avaient une raison, elles servaient à corriger les vices techniques. Mais plutôt que d’apporter des remèdes, la banque préférait encourager un système de double comptabilité. L’intégrité des positions prises était sciemment brisée. C’était laisser la porte ouverte à tous les abus. J’étais convaincu qu’il pourrait nous arriver de gros pépins », explique-t-il.

Le risque est d’autant plus grand que les règles imposées aux traders sont très floues, à en croire Olivier Z. « J’avais un rôle très subalterne. Officiellement, j’avais des limites dans mes opérations. Mais elles ne m’étaient pas communiquées. Je ne connaissais pas l’unité de mesure. Les demander était considéré comme le signe d’un esprit fort. Une fois, on m’a dit que j’avais dépassé mes limites. Mais je ne savais pas sur quel produit, pour quel montant. J’ai mis trois jours, en changeant une par une mes positions, à comprendre où était le problème », dit-il.

Un trader connu au bout du monde

Certaines de ces défaillances ont été pointées après l’affaire Kerviel par des audits externes et par l’inspection de la commission bancaire. La Société générale a été condamnée à payer 4 millions d’euros aux autorités de régulation pour défaut de contrôle et défaillance de systèmes. Pourtant, la banque a toujours réussi à faire accepter qu’elle était totalement irréprochable et à être dédouanée de toute responsabilité par la justice. 

 

 

Pour avoir réalisé bien des années auparavant les défaillances des systèmes de contrôle de la Société générale, Oliver Z. n’est pas plus surpris que cela quand il apprend que la banque est prise dans un scandale sur des positions frauduleuses sur les marchés. « D’une certaine façon, j’étais presque soulagé. Je me suis dit que les prises de risque insensées allaient s’arrêter », se souvient-il.

Quand le président de la Société générale d’alors, Daniel Bouton, tient sa conférence de presse, le 24 janvier 2008, pour annoncer que « la banque a été victime d’une fraude massive », il ne donne pas le nom de Jérôme Kerviel. Il parle juste de terroriste. Dans la banque pourtant, de nombreux intervenants sur le marché mettent tout de suite un nom : Jérôme Kerviel est connu comme le loup blanc à la Société générale.

« Bien que je travaillais à des milliers de kilomètres, dans un secteur sans rapport avec celui de Jérôme Kerviel, nous n’avons pas mis 20 secondes pour l’identifier. Le nombre incroyable de clignotants allumés par Jérôme Kerviel avait fait sa réputation bien au-delà de son activité. Son département entier était connu pour son appréciation très singulière des méthodes pour faire du profit », raconte Olivier Z. « Nous nous sommes connectés à l’annuaire interne pour voir sa photo – c’est d’ailleurs celle qui sera présentée par la banque à la presse par la suite. Il y a eu tellement de requêtes que dans les heures qui ont suivi, le serveur intranet était devenu inaccessible », dit-il. De nombreux traders connaissent donc, semble-t-il, Jérôme Kerviel au moins de réputation. La direction de la Société générale a pourtant soutenu tout au long des deux procès qu’elle ignorait tout des agissements du trader.

« Comment croire à une telle fiction ? » s’étonne Olivier Z. « Je ne comprends pas que la défense de la Société générale ait pu être acceptée comme cela, sans discussion, même aux procès. Pourtant, il y a des faits simples qui ne peuvent qu’attirer l’attention de tous ceux qui connaissent un peu les marchés. Et puis, il y a le bon sens », relève le trader. « Sur des activités nouvelles, exigeant une forte technicité, où la pression concurrentielle est peu forte, comme les produits hybrides au début des années 2000, il est possible de réaliser des marges fortes de plusieurs pourcents. Mais sur des activités standard, sur lesquelles interviennent tous les professionnels, où la pression concurrentielle est très forte, les perspectives de profit sont extrêmement limitées. C’est tout à fait le cas des marchés des warrants sur lesquels intervenait Jérôme Kerviel. Imaginer des profits importants sur ce marché, d’autant plus qu’il est de petite taille, est tout simplement irréaliste », explique-t-il.

La direction de la Société générale ne s’est pas étonnée lorsque Jérôme Kerviel a déclaré officiellement en 2007 54 millions de profits à lui tout seul, alors qu’une équipe d’une dizaine de personnes peine à réaliser 10 millions de profits en tout, insiste l’ancien trader. « Que des professionnels, diplômés, connaissant les marchés, n’y voient pas quelque chose d’anormal est hallucinant. Allons plus loin. Si ces activités généraient de tels résultats sans prise de risque, on comprend mal pourquoi des intervenants ne s’installent pas à leur compte pour exploiter leur martingale. S’ils ne le font pas, c’est pour une simple raison : un indépendant n’a pas la taille requise. Il faut une capacité de financement et un bilan qui permettent de gros engagements sur les marchés », souligne-t-il.

Lors des audiences du procès de Jérôme Kerviel en première instance et devant la cour d’appel, plusieurs financiers avaient déjà tenté d’attirer l’attention des juges sur l’invraisemblance de la défense de la Société générale sur ce point. Mais les juges ont préféré s’en tenir aux arguments de la banque. Aujourd’hui, Olivier Z. enfonce le clou : « Quand on affiche de tels résultats, quand on a de tels besoins de financement dépassant le milliard d’euros – ce sont des faits reconnus –, le bon sens s’impose : le mandat de fait de Jérôme Kerviel était nécessairement autre que celui qui était présenté. Ma conviction est aussi basée sur ma propre expérience : les services de trésorerie ne nous laissaient jamais déborder. Au moindre dépassement, même de 10 000 euros, ils demandaient des comptes sur-le-champ », témoigne-t-il. Les seuls appels de marge liés aux positions de Jérôme Kerviel en 2007 ont représenté un flux de trésorerie de plus de 25 milliards d’euros cette année-là. Pourtant, la direction de la Société générale dit ne rien avoir vu. (Voir Les étranges silences des enregistrements de la Société générale.)

Objectif de la hiérarchie : se protéger

Après avoir passé plusieurs années à l’étranger, Olivier Z. revient au siège de la Société générale en 2009. Il intègre une équipe de trading au même étage que le desk Delta one, celui où travaillait Jérôme Kerviel. « Une équipe qui, même avant le scandale, dit-il, avait une très mauvaise réputation auprès des autres départements. C’était une culture de cowboy, où seul le profit comptait. Ils méprisaient les clients, roulaient même les autres départements de la banque. »

L’affaire a fait des dégâts considérables dans les salles de marché de la banque, palpables à tout instant. L’atmosphère, à l’entendre, est à couper au couteau : la défiance et la peur pèsent sur tous. Dans les couloirs, il se dit, rapporte le trader, que « toute la hiérarchie a été arrosée » pour étouffer le scandale et faire reposer la faute sur Jérôme Kerviel (voir Le prix du silence).

« Tous les gens motivés étaient partis. Le middle office était complètement décimé. Il n’y avait plus de compétences. L’essentiel était fait par des stagiaires et par des consultants de McKinsey. C’est pourtant le lieu qui est chargé de faire le point et de lancer les alertes », remarque-t-il. Personnes démobilisées, au bord de la dépression, s’attendant à être licenciées, sont désormais, à l'entendre, monnaie courante dans les salles de marchés.

La même hiérarchie, qui a fermé les yeux sur tous les débordements passés, se montre désormais très tatillonne sur les respects des règles édictées. « Mais certaines sont parfois dépourvues de bon sens. L’empilement de toutes les mesures fait qu’il est impossible de toutes les respecter. Mais ce n’est pas l’important : il faut montrer que l’ordre règne. Mais c’est un ordre virtuel », dit-il.

Officiellement, la Société générale a rompu avec la culture du risque inconsidéré. Officiellement, la banque ne fait plus jamais de trading avec ses fonds propres pour son propre compte. Officiellement, les systèmes de contrôle ont été renforcés et interdisent tout dépassement. Et puis, il y a la réalité. « Les systèmes ont toujours des défaillances. On continue à faire des opérations pour compte propre mais de moindre ampleur », dit Olivier Z. D’autres témoignages semblent confirmer que, contrairement à ce qu’affirme la banque, les pratiques n’ont pas toujours changé (voir Et si la Société générale n’avait rien retenu de l’affaire Kerviel).

Parfois, il arrive encore des accidents de parcours comme des prises de position sur le Repo (marché interbancaire) en Asie, qui s’est traduit par 300 millions de pertes au premier semestre 2009, ou des positions à la baisse sur Volkswagen, un pari si perdant que la banque devra négocier directement avec Porsche pour dénouer sa position en 2009, ou des engagements face au fonds de Warren Buffet qui là aussi tourneront mal et coûteront très cher à la banque.

Mais tout cela a été soigneusement tu. « L’important pour la hiérarchie est de se protéger. Au lieu d’assumer sa responsabilité, elle met tout en œuvre pour se dédouaner et faire porter les responsabilités à la base. “Cover your ass” (protège tes fesses), c’est désormais le mot d’ordre là-bas. Tout est fait pour transformer les traders en coupables au moindre incident, afin que la hiérarchie puisse totalement être protégée. C’est l’enfer », dit-il.

 « La Société générale paie aujourd’hui la foi absolue de ses dirigeants dans l’industrialisation de la finance. Ils n’ont rien vu, ou rien vouloir voir. Comment peuvent-ils dire que leur responsabilité n’est pas engagée hier comme aujourd’hui ? » conclut-il.

 

 

 

 

 

 

Partager cet article
Repost0
9 octobre 2013 3 09 /10 /octobre /2013 15:53

 

 

marianne.net

Après Bettencourt, pourquoi les affaires Sarkozy ne sont pas terminées.

 

Rédigé par Juan S. le Mercredi 9 Octobre 2013 à 10:00

 

Les juges bordelais qui instruisaient l'affaire Bettencourt se sont résolu à blanchir d'un non-lieu Nicolas Sarkozy. Aussitôt, évidemment, quelques commentateurs en ont conclu que son avenir politique était à nouveau dégagé. Et les autres mises en examen sont écoeurés.

Le feuilleton continue.

 

Après Bettencourt, pourquoi les affaires Sarkozy ne sont pas terminées.


 
1. La charge initiale était lourde, "abus de faiblesse", rien que cela. Et contre une vieille dame, riche mais très âgée et dont quelques expertises ont ensuite retenues qu'elle était aussi "affaiblie". "Le chef d'accusation était tellement grotesque" a déclaré Nadine Morano. 

"En décidant d'un non-lieu, la justice vient de me déclarer innocent dans le dossier Bettencourt. Deux ans et demi d'enquête. Trois juges. Des dizaines de policiers. 22 heures d'interrogatoires et de confrontations. Quatre perquisitions. Des centaines d'articles mettant en cause ma probité durant la campagne présidentielle. C'était donc le prix à payer pour que la vérité soit enfin établie." Nicolas Sarkozy, sur Facebook, le 8 octobre 2013.

2. La véritable affaire n'était pas celle-là: il s'agissait de savoir si la campagne de Nicolas Sarkozy en 2007 avait été illégalement financée par les Bettencourt. Sur ce sujet-là, l'instruction continue. Il y a toujours ces interrogations sur un "retrait en espèces de 50 000 euros le 26 mars 2007 par la comptable des Bettencourt", des retraits d'un montant total de 140 000 euros "remis à André Bettencourt" les 4, 7 et 26 janvier 2007; et "de deux montants de 400.000 euros, tous deux par rapatriements d'argent liquide des Bettencourt depuis la Suisse le 5 février et le 26 avril 2007 par l'homme de confiance des Bettencourt, Patrice de Maistre."
 
3. Nicolas Sarkozy a d'autres affaires avec la Justice. Elles ont toutes un dénominateur commun, l'argent: accusations en Libye par d'anciens proches du colonel Kadhafi, accusations en France par un ancien intermédiaire - Ziad Takkiedine. Dans un ouvrage récent, deux journalistes soupçonnent Nicolas Sarkozy de détenir un compte en Suisse. Précisons que ces deux-là n'apportent pas de preuves tangibles.
 
4. D'autres mis en examen n'ont pas eu la même chance : Eric Woerth, l'ancien trésorier de l'UMP, il a été renvoyé par en correctionnelle. Mardi, il s'est dit "très amer, écoeuré par cette situation" mais "très serein". Sa réaction vaut le détour: "Je remarque que le parquet avait demandé deux non-lieu, solides, étayés, celui de Nicolas Sarkozy - il l'a eu et c'est bien - et le mien, et ça n'a pas été le cas."
 
5. Politiquement, les "amis" de Sarkozy applaudissent:

"Je n'oublie pas que pendant des mois et des mois, Mme Buffet, Mme Royal et l'entourage de François Hollande ont dénigré et vilipendé Nicolas Sarkozy. Je les trouve bien silencieux aujourd'hui..." Brice Hortefeux, 8 octobre 2013

Mais d'autres cachent mal leur gêne. Valérie Pécresse, soutien de François Fillon, a été appelée à réagir à un éventuel retour politique de son ancien mentor. Elle a le sourire jaune: "aujourd'hui, nous avons un temps de latence, nous ne sommes pas devant le choix de notre leader". Le retour de Sarkozy est de toutes façons inutiles. Une forme de Sarkofrance lui a survécu.
 
6. Politiquement toujours, la palme de la bêtise revient à l'ineffable Henri Guaino. Ce député parachuté des Yvelines avait lancé une violente charge contre le juge Gentil quand fut connue la mise en examen pour abus de faiblesse de Sarkozy. Il fallait, d'après lui, que le juge "s'explique devant les Français". Une belle mise en cause de la séparation des pouvoirs... Cette fois-ci, il récidive: "Je ne retire rien à ce que j’ai dit. J’ai dit que le juge Gentil avait déshonoré la justice et je l’assume toujours."
 
7. Ce non-lieu intervient trop tôt. Avant le scrutin de 2007, Nicolas Sarkozy s'était posé en victime d'un cabinet noir logé à l'Elysée, mené par Dominique de Villepin, dans l'affaire Clearstream. Le feuilleton fut plus "grotesque", mais plus long, jusqu'à traîner pendant la campagne et offrir au candidat un argument politique récurrent. Cette fois-ci, Sarkozy a été blanchi très vite d'une accusation improbable qui de surcroît ne clôt pas l'affaire générale.
 
A suivre...

 

 

 

Partager cet article
Repost0
9 octobre 2013 3 09 /10 /octobre /2013 15:24

 

 

mediapart.fr

Affaire Bettencourt : « Le comportement abusif de Nicolas Sarkozy »

|  Par Michel Deléan

 

 

 

« Le comportement incriminé de Nicolas Sarkozy, à savoir sa demande d’un soutien financier occulte (…) formulée  à Liliane Bettencourt, personne âgée et vulnérable, alors (…) qu’il est candidat déclaré à l’élection présidentielle, est un comportement manifestement abusif. » L’ancien président de la République est sévèrement égratigné dans l’ordonnance des juges de l’affaire Bettencourt, qui lui accorde pourtant un non-lieu. Mediapart a pris connaissance de ce document et en publie de larges extraits.

 

C’est le grand, l’insondable paradoxe de la décision prise par les juges d’instruction de l’affaire Bettencourt. Tout en faisant bénéficier Nicolas Sarkozy, initialement poursuivi pour « abus de faiblesse », d’un non-lieu pour insuffisance de charges, les magistrats assortissent leur ordonnance de considérations très peu flatteuses, voire cruelles, pour l’ex-président de la République.

Mediapart a pris connaissance de l’ordonnance de non-lieu partiel et de renvoi devant le tribunal correctionnel signée le 7 octobre par Jean-Michel Gentil et Valérie Noël. Un document de 267 pages, dense, méthodique, au terme duquel dix personnes, dont Éric Woerth et Patrice de Maistre, sont renvoyées devant le tribunal correctionnel pour avoir profité sciemment de l’état de Liliane Bettencourt, à l’exception notable de Nicolas Sarkozy et de l’avocat Fabrice Goguel.

Le sort de l’ex-président occupe les pages  219 à  227 de cette ordonnance, un chapitre qui comporte quatre parties (A, B, C et D). Le moins que l’on puisse dire, à sa lecture, est que Sarkozy ne pourra pas s’en enorgueillir, ni prétendre être entièrement « innocenté »

 

  • A. « Nicolas Sarkozy avait connaissance de l’état de vulnérabilité particulièrement apparent de Liliane Bettencourt », exposent les juges. Il avait notamment « parfaitement connaissance du handicap de surdité de Liliane Bettencourt et de ses conséquences, à savoir son impossibilité de communication, et de réelle compréhension. »

Sur procès-verbal, Nicolas Sarkozy indique lui-même qu’« avec elle, les échanges étaient très difficiles car elle n’entendait rien. Tout le monde le savait. Il n’y avait pas de communication fluide possible, elle n’entendait pas ». Nicolas Sarkozy raconte aux juges une anecdote qui se veut révélatrice :

« Avec Madame Liliane Bettencourt, il était impossible de parler politique devant elle pour deux raisons : elle était sourde à un niveau profond et la politique ne l'intéressait pas. » Au cours d‘un repas, voici quelques années, narre Sarkozy, « il y avait une dizaine de personnes, et madame Liliane Bettencourt me raconte qu’elle va partir avec André aux Seychelles, qu’elle aime nager. Je lui dis que moi aussi, j’aime beaucoup nager. Et là, elle dit en s’adressant à André qu’il “faut resservir le maire, Nicolas Sarkozy qui aime beaucoup manger”… »


Liliane Bettencourt 
Liliane Bettencourt

Les juges n’apprécient pas. « Ce bref récit qualifié d’anecdote par Nicolas Sarkozy n’a pourtant rien de pittoresque et n’est pas susceptible de divertir », écrivent-ils sèchement, en faisant référence à la définition du Larousse. « En revanche, il est parfaitement révélateur des difficultés de compréhension de Liliane Bettencourt, bien au-delà de la chose politique, ce dont Nicolas Sarkozy avait parfaitement conscience. »

« Par ailleurs, hormis sa connaissance de la vulnérabilité apparente de Liliane Bettencourt, en raison de son handicap de surdité, il est impossible que Nicolas Sarkozy n’ait pas constaté, le 24 février 2007, la très grande fragilité particulièrement apparente de cette dame âgée (que malgré ses dénégations il a rencontrée ce jour-là), alors que cette fragilité était soulignée et décrite par le personnel qui était présent, et attestée par une permanence médicale à son domicile 24 heures sur 24 depuis le 1er septembre 2006. »

  • B. « Nicolas Sarkozy s’est présenté à deux reprises au domicile d’André et Liliane Bettencourt. »

L’ancien ministre et candidat à l’élection présidentielle n’avait reconnu, devant les juges d'instruction, qu’une seule visite, le 24 février 2007. « Ce rendez-vous du 24 févier était avec André Bettencourt, je suis formel. Je suis formel aussi pour dire qu’il n’y a pas eu d‘autres rendez-vous en 2007, 2008 ou  2009, en tout cas jusqu’au décès d’André Bettencourt », a-t-il déclaré.

Sarkozy ajoutait : « Ce que je veux souligner, c’est que si j’étais revenu, je serais revenu dans les mêmes conditions compte tenu de mes obligations quant à mes déplacements de l’époque. »

« C’est en raison de ces déclarations spontanées, trop affirmatives, que de nouvelles investigations étaient réalisées », écrivent les juges. « Elles ont mis en évidence des contradictions entre la version de Nicolas Sarkozy et celles des témoins, contradictions qui ont été corroborées par des éléments documentaires venant accréditer l’existence de deux visites de Nicolas Sarkozy au domicile du couple Bettencourt entre le 14 janvier 2007, date de son investiture comme candidat aux élections présidentielles, et les 26 mars 2007, date à laquelle il quittait le ministère de l’intérieur. De ces témoignages et éléments matériels, il ressort que Nicolas Sarkozy est venu à deux reprises au domicile de Liliane Bettencourt, le 24 février 2007 et auparavant, le 10 février 2007. »

Les juges se montrent très soupçonneux, sur le rendez-vous du 24 février. « Si l’existence de ce rendez-vous de Nicolas Sarkozy au domicile de Liliane et André Bettencourt n’est pas contestée, en revanche les conditions de ce rendez-vous font l’objet de dénégations à tout le moins surprenantes de la part de Nicolas Sarkozy, notamment quant à son initiative, ses participants et son objet. »


 

Sur l’origine du rendez-vous, plusieurs témoignages et indices laissent penser qu’il a été pris par un tiers, qui serait Patrice de Maistre, selon la secrétaire d’André Bettencourt. De Maistre a démenti. Mais André Bettencourt n’avait pas les coordonnées de Nicolas Sarkozy dans son agenda et les juges relèvent qu’un rendez-vous entre le président Sarkozy et Liliane Bettencourt, le 5 novembre 2008, a été « organisé à l‘initiative de Patrice de Maistre », membre du Premier cercle de l’UMP et proche d’Éric Woerth.

Sur les conditions de ce rendez-vous, « les affirmations de Nicolas Sarkozy selon lesquelles il n’a, le 24 février 2007, rencontré qu’André Bettencourt, sont totalement démenties par les déclarations concordantes des membres du personnel de Liliane Bettencourt d’astreinte ce samedi », à savoir quatre témoins différents.

 

Jean-Michel Gentil 
Jean-Michel Gentil

« Il est donc manifeste que ces affirmations peu crédibles de Nicolas Sarkozy au sujet de sa rencontre avec le seul André Bettencourt, ce 24 février 2007, n’ont pour seul but que d’éviter de s’expliquer sur les véritables motifs de sa rencontre avec Liliane Bettencourt », assènent les juges d’instruction.

Quant à la rencontre du 10 février 2007 avec André Bettencourt, que Nicolas Sarkozy dément, les juges estiment qu’il est « possible d’avancer que ce n’était pas pour remercier André Bettencourt de sa lettre du 19 janvier de la même année, puisqu’il le fera par écrit le 19 mars ».

« En revanche, écrivent-ils, il est difficile de ne pas faire le rapprochement entre la livraison à Liliane Bettencourt, le 5 février 2007, de 400 000 euros, la remise de tout ou partie de ces espèces par Patrice de Maistre à Éric Woerth le 7 février 2007, et cette visite impromptue », trois jours plus tard.

  • C. « Le rendez-vous du 24 février 2007 avait pour objet d’obtenir un soutien financier de Liliane Bettencourt. »

Nicolas Sarkozy déclare que cet entretien lui a été demandé par André Bettencourt pour parler de sa campagne, dans une lettre du 19 janvier, et qu’il était passé le remercier. Les magistrats en doutent.

« Les constatations faites à partir de ces lettres des 19 janvier et 19 mars 2007 » (dernière lettre dans laquelle il remerciera André Bettencourt « sans faire aucune allusion à sa visite du 24 février ») « mettent à néant les explications fournies par Nicolas Sarkozy », écrivent les magistrats.

Selon eux, l’objet de ce rendez-vous « ne pouvait pas être de remercier André Bettencourt, dans la mesure où Nicolas Sarkozy le fera le 19 mars ». En revanche, ils rappellent les déclarations d’un témoin, selon lequel Liliane Bettencourt avait confié à cette époque que Nicolas Sarkozy était venu les voir, elle et son mari, « pour leur demander des sous ». Un élément qu’ils rapprochent de cette mention retrouvée dans les carnets de François-Marie Banier à la date du 26 avril  2007 : « De Maistre m’a dit que Sarkozy avait encore demandé de l’argent. »

Voici ce qu’en pensent les juges : « Le comportement incriminé de Nicolas Sarkozy, à savoir sa demande d’un soutien financier occulte, nécessairement en espèces, formulée à Liliane Bettencourt, personne âgée et vulnérable, alors qu’il exerce les fonctions de ministre de l’intérieur, et qu’il est candidat déclaré à l’élection présidentielle, est un comportement manifestement abusif. »

Liliane Bettencourt
Liliane Bettencourt 
D. « Il n’existe pas de charges suffisantes établissant un lien direct entre le comportement abusif de Nicolas Sarkozy et les actes préjudiciables consentis par Liliane Bettencourt de mises à disposition d’espèces. »

« Les témoignages des membres du personnel de Liliane Bettencourt présents le 24 février 2007, lors de la visite de Nicolas Sarkozy à André et Liliane Bettencourt, attestent tous de la brièveté de cette visite. Il semble qu’il en ait été de même pour la visite du 10 février faite par Nicolas Sarkozy au seul André Bettencourt », écrivent les juges d’instruction.

« Aussi, compte tenu de la brièveté de cette rencontre avec André et Liliane Bettencourt, il n’est pas démontré que la demande de soutien financier de Nicolas Sarkozy ait suffi à déterminer Liliane Bettencourt au comportement recherché, estiment-ils avec prudence. Par ailleurs, on ne peut exclure que cette demande ait été formulée aussi à André Bettencourt, qui était incontestablement présent. »

« Liliane Bettencourt elle-même, lorsqu’elle se confie à François-Marie Banier, lui dit : “De Maistre m’a dit que Sarkozy avait encore demandé de l’argent. J’ai dit oui.” Ce qui démontre que, si elle n’a plus le souvenir des visites, Patrice de Maistre lui en a rappelé l’objet, et c’est à lui qu’elle a formulé son acceptation. »

« Il n’est donc pas démontré que ce soit la demande de Nicolas Sarkozy du 24 février 2007, dans les circonstances désormais établies, qui a conduit Liliane Bettencourt aux actes gravement préjudiciables auxquels elle a consenti de mises à disposition, notamment à celui de 400 000 euros, du 26 avril 2007, puisque la responsabilité en incombe à Patrice de Maistre, et que celui-ci avait déjà obtenu un premier acte de mise à disposition le 5 février 2007, avant la visite de Nicolas Sarkozy. »

Les juges ajoutent ceci : « Par ailleurs, il convient de noter que si les investigations démontrent que Patrice de Maistre a bien perçu les espèces livrées le 26 avril  2007 (et les autres), il n’est pas établi qu’il les ait entièrement redistribuées, Liliane Bettencourt ayant elle-même un doute à ce sujet : “Comment puis-je savoir s'il lui donne vraiment. Vous verrez ce que c’est l’argent…” ».

Conclusion prudente, et un peu rapide, des juges d’instruction : « En conséquence, il sera dit n’y avoir lieu à suivre contre Nicolas Sarkozy du chef d’abus de faiblesse au préjudice de Liliane Bettencourt. »

Au bout du compte, le passage de l’ordonnance consacré à Nicolas Sarkozy laisse un sentiment de malaise : les juges d’instruction auraient pu éviter ces considérations péjoratives s’ils estiment ne pas avoir assez de charges pour renvoyer l’ex-président devant le tribunal correctionnel.

A contrario, s’ils pensent que les « indices graves et concordants » qui avaient justifié la mise en examen de Sarkozy sont toujours aussi solides, ils auraient pu le renvoyer devant le tribunal, afin de permettre des débats public se déroulant en sa présence, et de laisser le soin à la juridiction de jugement de se prononcer sur son cas.

 

Patrice de Maistre 
Patrice de Maistre

On pourra relever que les juges d’instruction se montrent encore plus cruels avec Patrice de Maistre qui, selon eux, « en parfaite connaissance de sa situation de faiblesse, s’est imposé dans la sphère personnelle de Liliane Bettencourt », pour « obtenir abusivement d’elle » une somme de 12 millions d’euros entre 2007 et 2009, en plus de son salaire de 2 millions annuels.

 

Éric Woerth 
Éric Woerth

Quant à Éric Woerth, l’ancien trésorier de la campagne présidentielle de Sarkozy, les juges ne font pas de détail : « Il a reçu des sommes en espèces qui lui ont été remises par Patrice de Maistre », écrivent-ils. « Les circonstances de ces remises établissent qu’Éric Woerth avait connaissance de leur origine frauduleuse. »

Les juges tiennent pour acquis « qu’il a bénéficié à deux reprises de sommes d’argent » remises par Maistre, le 19 et le 30 janvier 2007. Pendant la campagne présidentielle.

 

 

 

Partager cet article
Repost0
8 octobre 2013 2 08 /10 /octobre /2013 17:17

 

lemonde.fr

 

Goldman Sachs n'a pas rompu avec sa stratégie de lobbying haut de gamme

Le Monde.fr | 08.10.2013 à 15h07 | Par Marc Roche

 
 
Goldman Sachs a annoncé avoir recruté comme conseiller l'ancien président de la Banque mondiale, Robert Zoellick.

Le recrutement par Goldman Sachs de l'ancien président de la Banque mondiale, Robert Zoellick, au poste de chef des conseillers internationaux ne manquera pas de relancer la polémique sur le réseau d'influence de la banque d'affaires américaine.

Surtout, cette nomination, annoncée lundi 7 octobre, va à contre-courant de la stratégie de normalisation et de recentrage sur son cœur de métier revendiquée par l'établissement new-yorkais.

Depuis la crise financière de 2008, et celle de la dette souveraine de 2010, le PDG de Goldman Sachs, Lloyd Blankfein, s'efforce de tourner la page sur les pires dérives de son organisation.

Le départ d'une kyrielle d'associés de la vieille garde, l'abandon du négoce physique sur les matières premières, l'accent sur le service à la clientèle et le désinvestissement progressif de l'activité de "hedge fund" (fonds spéculatifs) témoignent de cette volonté de rentrer dans le rang.

 

"CALMAR GÉANT"

En particulier, Goldman Sachs veut en finir avec l'étiquette de "calmar géant enroulé sur le visage de l'humanité " apposée en 2009 par Matt Taibbi, spécialiste des enquêtes au long cours du magazine américain "Rolling Stone", en raison de son réseau d'influence unique au monde.

Il faut dire qu'on trouve un certain nombre d'anciens de la banque américaine à la tête de la Banque centrale européenne (Mario Draghi), de la Banque d'Angleterre (Mark Carney) ou du gouvernement italien (Mario Monti entre 2011 et 2013 ), ou encore au sein du gouvernement britannique de David Cameron. De quoi alimenter les pires théories du complot anglo-saxon qui fourmillent sur internet.

Il y a aussi urgence à se faire pardonner l'aide apportée, en 2000, par la banque au gouvernement grec pour maquiller ses comptes, contribuant ainsi, une décennie plus tard, au torpillage de la monnaie unique.

Lire aussi : Goldman Sachs, enquête sur une société secrète

Le capitalisme d'accès que représente le "gouvernement Goldman" a toutefois mangé son pain blanc. Les complicités anciennes se révèlent moins utiles face à des politiciens sensibles à l'impopularité des professionnels de la finance, tenus pour responsables des politiques d'austérité provoquées par la crise.

Le carnet d'adresses ne suffit plus sur une planète financière complexe et technique et face à une nouvelle génération d'industriels moins pétris de respect pour l'establishment financier.

Enfin, les gouvernements veillent à se tenir à l'écart des conflits d'intérêt face à l'irruption de nouveaux acteurs comme les ONG, les groupes d'actionnaires, les investisseurs institutionnels et les médias qui réclament des comptes.

 

ENTRÉES À PÉKIN, DELHI, BRASILIA OU MOSCOU

Mais dans les pays émergents, les missi dominici issus de la politique comme de la haute fonction publique ont encore leur utilité. La nomination de Robert Zoellick s'inscrit dans ce cadre.

L'ancien patron de la Banque mondiale, qui fut auparavant le représentant des Etats-Unis au commerce international, a ses entrées à Pékin, à Delhi, à Brasilia ou à Moscou.

L'entregent considérable et la connaissance des coulisses des Etats lui permettent d'appeler directement les décideurs. Sa vaste expérience facilite l'obtention de mandats.

Au demeurant, Goldman Sachs n'est pas la seule à recentrer ses efforts de lobbying haut de gamme sur les pays émergents. Telle est aussi la mission de l'ex-premier ministre britannique, Tony Blair chez JP Morgan, de l'ancien ministre britannique du commerce, lord Mandelson chez Lazard, de l'ancien chancelier allemand, Gerhard Schröder chez Rothschild, ou de l'ex-patron de la BERD, Jean Lemierre chez BNP Paribas.

Londres, correspondant

 Marc Roche
Journaliste au Monde

 


Partager cet article
Repost0
8 octobre 2013 2 08 /10 /octobre /2013 17:08

 

lemonde.fr

 

 

Le préfet soupçonné d'avoir fait payer ses PV par l'administration a démissionné

Le Monde.fr avec AFP | 08.10.2013 à 17h58 • Mis à jour le 08.10.2013 à 18h29

 
 

 

Selon Mediapart, le haut fonctionnaire du ministère de l'intérieur, à la tête d'une agence chargée de traiter les infractions établies par les radars routiers, aurait "fait payer par son administration ses contraventions routières".

 

Soupçonné d'avoir fait payer ses contraventions par l'Etat, le préfet Jean-Jacques Debacq, responsable du traitement des infractions des radars routiers, a démissionné.

Il a "présenté sa démission au ministre de l'intérieur", Manuel Valls, "qui l'a acceptée", a déclaré Pierre-Henry Brandet, le porte-parole du ministère de l'intérieur, mardi 8 octobre.

 

 "PRÈS DE 700 EUROS" RÉGLÉS PAR L'ADMINISTRATION, SELON MEDIAPART

Dans une enquête publiée le 30 septembre, le site Mediapart avait accusé Jean-Jacques Debacq, directeur de l'Agence nationale de traitement automatisé des infractions (Antai), d'avoir "fait payer par son administration – c'est-à-dire par le Trésor public – les contraventions routières du dimanche dont son véhicule de fonction, une Peugeot 508, fait l'objet". Il aurait également échappé au retrait de points sur son permis de conduire que les infractions auraient dû entraîner.

Mediapart dit avoir retracé "une douzaine de contraventions" attachées au véhicule de fonction du préfet, "soit près de 700 euros", qui auraient été réglées par mandats administratifs.

Lire : Le "M. Radar" du ministère de l'intérieur soupçonné de faire payer ses PV à son administration

 

 

Partager cet article
Repost0
8 octobre 2013 2 08 /10 /octobre /2013 15:31

 

marianne.net

 

Alcatel-Lucent annonce des suppressions de postes massives pour 2014
Mardi 8 Octobre 2013 à 12:16 | Lu 1188 fois I 8 commentaire(s)

 

Thibault Le Berre‏

 

Nouvelle vague de licenciements dans l’entreprise Alcatel-Lucent. 900 emplois seront supprimés en France. Dix mille employés devraient être remerciés dans le monde.

 

SALOM-GOMIS SEBASTIEN/SIPA
SALOM-GOMIS SEBASTIEN/SIPA

Les dirigeants d’Alcatel-Lucent l’avaient annoncé le 19 juin dernier : un plan de restructuration sera mis en place. Intitulé « Shift », il vise à réduire d’un milliard d’euros les coûts fixes de l’entreprise. Dès 2014, ce sont 900 postes qui seront supprimés en France, « principalement dans les fonctions support, administratives et commerciales », précise le communiqué de presse du groupe de télécommunications.

Ainsi, sur les treize sites Français, le plan prévoit la fermeture des entreprises de Toulouse et de Rennes, la vente de site de Eu (Seine-Maritime) et de Ormes (Loiret) ou encore la relocalisation du site parisien de Suffren, selon le journal Les Echos. Ceux de Lannion en Bretagne et de Villarceaux en région parisienne devraient bénéficier de la nouvelle stratégie du groupe. Ils se spécialiseront respectivement dans le très haut débit mobile et dans la recherche et développement pour devenir le premier centre en Europe.

Ces licenciements ne sont pas les premiers. Déjà en 2001, la décision de l’ancien directeur Serge Tchuruk de faire de Alcatel une « entreprise sans usines » avait entrainé la division par deux des effectifs, passant de 131 000 à 76 000 salariés. Plus récemment, Alcatel Lucent avait annoncé la suppression de 1 400 emplois dans l’Hexagone et le licenciement de 5.000 employés dans le monde. Cette fois, ce sont plus de 9 000 personnes qui vont perdre leur emploi: 3 200 en Europe, Afrique et Moyen Orient, 3 800 en Asie-Pacifique et 2 100 sur le continent américain.

Ce nouveau plan de restructuration intervient suite à l’arrivée de Michel Combes au poste de directeur général du groupe, en avril dernier. Ce polytechnicien, passé par France Télécom, envisage de recentrer le groupe sur les « technologies du futur : réseau Internet (IP), Cloud et accès très haut débit » pour « que l’entreprise retrouve la maîtrise de son destin ». Les salariés prochainement licenciés voient, eux, leur avenir s’assombrir.

 

Partager cet article
Repost0

Présentation

  • : Démocratie Réelle Maintenant des Indignés de Nîmes
  • : Le blog des Indignés de Nimes et de la Démocratie Réelle Maintenant à Nimes
  • Contact

Texte Libre

INFO IMPORTANTE

 

DEPUIS DEBUT AOÛT 2014

OVERBLOG NOUS IMPOSE ET PLACE DES PUBS

SUR NOTRE BLOG

CELA VA A L'ENCONTRE DE NOTRE ETHIQUE ET DE NOS CHOIX


NE CLIQUEZ PAS SUR CES PUBS !

Recherche

Texte Libre

ter 

Nouvelle-image.JPG

Badge

 

          Depuis le 26 Mai 2011,

        Nous nous réunissons

                 tous les soirs

      devant la maison carrée

 

       A partir du 16 Juillet 2014

            et pendant l'été

                     RV

       chaque mercredi à 18h

                et samedi à 13h

    sur le terrain de Caveirac

                Rejoignez-nous  

et venez partager ce lieu avec nous !



  Th-o indign-(1)

55

9b22