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27 avril 2013 6 27 /04 /avril /2013 18:46

 

 

Libération

21 avril 2013 à 19:06

 

 

Vincent Liegey, porte-parole des Décroissants et co-auteur de "Un projet de Décroissance, Manifeste pour une Dotation Inconditionnelle d'Autonomie" à Paris, le 12 avril 2013.
Vincent Liegey, porte-parole des Décroissants et co-auteur de "Un projet de Décroissance, Manifeste pour une Dotation Inconditionnelle d'Autonomie" à Paris, le 12 avril 2013. (Frédéric Stucin)

Interview Porte-parole des décroissants, cet ingénieur milite pour redonner un sens écologique et humain au fonctionnement de la société.

 

Par CORALIE SCHAUB

Alors que le pays cherche désespérément la voie de la croissance, Vincent Liegey, coauteur du livre Un projet de décroissance (Utopia, 2013), propose d’autres pistes pour sortir de la crise.

 

Prôner la décroissance alors que le chômage explose, n’est-ce pas indécent ?

La croissance n’assure pas le plein-emploi, c’est un mythe : depuis quarante ans, le PIB a augmenté mais le chômage s’est accru. Ce qui est irresponsable, c’est d’imposer des plans d’austérité aux conséquences humaines dévastatrices et d’espérer le retour de la croissance en fermant les yeux sur l’effondrement écologique. On ne peut pas croître infiniment dans un monde fini.

Le terme décroissance fait peur…

C’est un mot provocateur pour ouvrir un débat de fond. Que produit-on ? Comment ? Pourquoi ? La croissance nous impose de produire toujours plus de choses inutiles en épuisant les ressources. Comment en sortir, inventer une société valorisant les relations humaines, un autre rapport à l’outil, la production, la nature ? Ce qui se passe en Amérique latine autour du «buen vivir» [«bien vivre», ndlr] nous intéresse. Ce n’est surtout pas revenir à la bougie. La première des décroissances doit être celle des inégalités.

Concrètement, comment faire ?

D’abord sortir de la religion de l’économie. Se réapproprier la création monétaire, ne pas rembourser la part de la dette illégitime, nationaliser tout ou partie du système bancaire, interdire les paradis fiscaux, taxer les transactions financières. Et instaurer un revenu maximum acceptable (RMA), autour de quatre fois le revenu minimum, contre un rapport de 1 à 4 000 aujourd’hui. Parallèlement, nous proposons une dotation inconditionnelle d’autonomie (DIA) afin de garantir à chacun, de la naissance à la mort, une vie décente et frugale. Il ne s’agit pas d’un revenu minimum en euros, mais d’une dotation démonétisée. Un logement pour tous, c’est possible dans nos sociétés riches. Comme une autre répartition des terres agricoles ou une réappropriation du foncier pour installer des ateliers de fabrication, recyclage ou réparation. Certaines ressources doivent être gratuites, dans la limite du nécessaire. La DIA pourrait être versée en droits de tirage. Au début du mois, le compteur de gaz ou d’eau serait négatif d’un certain nombre de m3 définis localement, démocratiquement, en fonction d’une utilisation qui paraît sensée. Nous préconisons aussi des droits d’accès gratuit à des services publics : éducation, santé, transport, culture, information…

Vous menacez le droit de propriété ?

Sa remise en cause mène souvent à des systèmes autoritaires. Or, nous voulons une transition démocratique. Le défi est d’ouvrir un débat pour rénover ce droit quand il s’oppose au bon sens, à certains droits humains. Cela demandera du temps, du courage politique. Mais le système actuel n’est plus tenable. Expulser ceux qui n’arrivent plus à rembourser leur emprunt à cause de l’austérité, c’est une violence extrême. Une forme d’écofascisme qui pousse les gens vers la misère. A rebours de cette barbarie, de cette récession subie imposée par l’oligarchie, nous proposons une décroissance choisie et démocratique.

Ne défendez-vous pas une société d’oisifs assistés ?

Au contraire ! Les gens seront autonomes et responsables. On pourrait parler de société autonome ou conviviale, en référence aux réflexions de Cornelius Castoriadis et d’Ivan Illich. L’idée est de se libérer de l’asservissement à un travail subi qu’on connaît depuis la première révolution industrielle dans les systèmes capitaliste comme communiste. D’aller vers des activités volontaires et épanouissantes, se réapproprier son choix de vie, ses productions, ses solidarités. De tendre vers bien plus de démocratie, au sens noble : les décisions sont prises collectivement, localement, par les personnes concernées.

N’est-ce pas un repli sur soi ?

Surtout pas. Nous voulons une relocalisation ouverte. Il faut produire localement - cela a un sens écologique et humain -, mais garder les frontières ouvertes pour les biens et surtout pour les personnes : voyages et rencontres favorisent le bien-être et la culture.

Vous comptez sur «une forte adhésion de tous». Vous rêvez un peu, non ?

La transition est déjà en marche. De plus en plus de gens, piégés par l’endettement, un travail stressant et l’obsolescence programmée des objets, se rendent compte de l’absurdité du système. Et les alternatives se multiplient à toute vitesse : circuits courts, associations pour le maintien d’une agriculture paysanne [Amap], monnaies locales, permaculture… Au quotidien, les citoyens s’organisent des espaces de liberté, expérimentent de nouvelles manières de vivre ensemble. Les plus jeunes s’approprient les techniques de communication non violentes, on l’a vu avec des mouvements comme les Indignés. Nous restons archiminoritaires, mais la dynamique est intéressante. Il suffirait de peu pour que l’on bascule.

Les résistances sont fortes…

C’est vrai de la part des élites. Enfermées dans le mythe de la croissance, elles affirment qu’il n’y a pas d’alternative. Elles défendent leurs privilèges.

Quid du financement ?

L’argument comptable est fallacieux. Regardez la nourriture : on en produit bien plus que nécessaire et un milliard de personnes souffrent de malnutrition. Il s’agit d’un problème d’organisation, de priorités. L’enjeu est de faire payer le vrai prix écologique et humain des choses. On ne côtoie pas les enfants qui ont fabriqué nos baskets en Chine. Dans une société relocalisée, on verrait les conséquences de nos achats.

In fine, utopie ou pas ?

La pensée est une utopie. Il faut être humble, avoir assez d’humour pour comprendre que c’est un dessein. Ne pas tomber dans le dogmatisme, vouloir créer l’homme parfait pour la société parfaite, mais se dire «tiens, je serais plus heureux si j’allais dans cette direction». Changer d’imaginaire.

Photo Frédéric Stucin

CV

1979 Naissance à Besançon (Doubs)

2004 Diplômed’ingénieur.

2008 Rejoint le Parti pour la décroissance et devient son porte­parole.

2011 Débute un doctorat àl’Université d’économie de Budapest sur la décroissance.

2013 Publie Un projet de décroissance.  Manifeste pour une dotation inconditionnelle d’autonomie, avec Stéphane Madelaine,   Christophe Ondet et Anne­ Isabelle Veillot. (éditions Utopia)

 

 

 

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26 avril 2013 5 26 /04 /avril /2013 18:25

 

Rue89 - Tape ton cousin 26/04/2013 à 10h33

 Philippe Vion-Dury | Journaliste Rue89

 

 


Capture d’écran de la page d’accueil de Hello Merci (HelloMerci.com)

 

Les gens sont prêts à faire des dons pour des projets artistiques qui les intéressent contre la simple promesse d’obtenir en retour un produit dédicacé ou une invitation à un vernissage. C’est en partant de ce postulat que KissKissBankBank (KKBB) a réussi : en trois ans, la société de financement participatif a collecté 5 millions d’euros et permis de réaliser 2 800 projets.

En lançant la plateforme Hello Merci cette semaine, la startup d’une douzaine d’employés a décidé d’aller plus loin – ou plutôt, ailleurs. Vincent Ricordeau, cofondateur de KKBB :

« Beaucoup de projets n’étaient pas qualifiés pour KKBB. Certains souhaitaient financer un permis, une brasserie, un commerce de vélo... rien qui soit créatif, donc pas qualifié pour Kiss Kiss. »

D’où l’idée de proposer aux particuliers de prêter de l’argent à d’autres particuliers via une plate-forme en ligne sans taux d’intérêt : des prêts solidaires (« P2P lending » en anglais).

Un modèle importé d’Angleterre

Le concept n’est ni neuf, ni français : c’est en 2005 au Royaume-Uni que la première société de prêts entre particuliers a vu le jour. La société Zopa proposait de mettre en relation des emprunteurs porteurs de projets avec des prêteurs qui préféraient contrôler leur placement plutôt que donner leur argent à une banque.

En France, ce modèle a déjà fait des émules. Babyloan par exemple, très tourné vers l’international, a été un des premiers à proposer un système de microcrédit aux entrepreneurs grâce à des prêteurs ne touchant pas d’intérêt.

Hello Merci fournit aux internautes une plateforme qui servira de vitrine à leur projet (200 à 15 000 euros), met à disposition les outils nécessaires à leur promotion, et surtout, grâce à un partenariat avec la Banque Postale, joue l’intermédiaire entre les particuliers. L’entreprise se rémunère en prélevant entre 3% et 6% de la somme collectée, selon la durée du remboursement (entre un et 36 mois).

 

 

En cas de difficultés, Vincent Ricordeau assure qu’il jouera « un rôle de médiateur » :

« Le but n’est pas d’envoyer un huissier, c’est une logique à l’amiable entre la communauté des porteurs et prêteurs. Si ça devait quand même arriver, on laisserait une reconnaissance de dette officielle. »

Pas de remboursement = suicide social

L’entrepreneur compte surtout sur un autre facteur : la pression sociale.

La finance et le prêt participatifs reposent tous deux sur un schéma en trois cercles concentriques :

  • le projet va d’abord récolter des fonds depuis le cercle familial et des proches ;
  • puis vient le cercle des réseaux sociaux (amis des amis, voisins et clients) ;
  • et enfin le cercle des particuliers atteints par viralité.

« Généralement, dans la microfinance, le taux de défaut est plus faible que dans une banque, parce que tu as une responsabilité très importante vis-à-vis de ta famille, de tes amis ou tes clients. »

« Retour sur investissement émotionnel »

Après avoir lancé une version bêta fermée au public il y a cinq semaines, cinq des dix-sept projets proposés – géolocalisables grâce à une carte interactive – ont déjà rempli l’objectif de départ.



Capture d’écran de deux projets sur le site Hello Merci

 

Jonathan a ainsi déjà réussi à financer un nouvel archet de violon de 220 euros grâce à ses quatre prêteurs tandis que Héloïse partira finir son mémoire d’urbanisme en Jordanie grâce aux onze personnes qui lui ont prêté 1 000 euros en attendant qu’elle touche sa bourse.

« Avec la crise », estime Vincent Ricordeau, « les gens cherchent un retour sur investissement qui ne soit pas simplement financier mais plutôt émotionnel. On est de plus en plus à la recherche de ce retour humain ».

 


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26 avril 2013 5 26 /04 /avril /2013 16:43

 

 

 

Bobos, aventuriers, écolos : qui sont ces Français adeptes de la consommation collaborative ?

 

 
in Share7

L'ADEME a publié, jeudi 25 avril, une enquête sur les Français et la consommation collaborative. Objectif : mieux cerner les valeurs, les modes de vie, de consommation et les critères socio-démographiques des français qui adoptent ces nouveaux modes de consommation.

Résultats : les motivations sont très diverses, ces consommateurs sont plutôt jeunes, actifs, et les critères socio-démographiques ne sont pas discriminants. Voyons cela de plus près.

 

Des caractéristiques communes

L'enquête a été effectuée à partir de l'échantillon de l’observatoire des modes de vie et consommation d’IPSOS : "Les 4500". Partant du constat que ces nouvelles formes de consommation sont souvent vertueuses sur le plan de la protection de l'environnement et de la réduction des déchets, l'ADEME souhaitait en savoir plus sur les motivations de ces Français qui fréquentent les AMAP, covoiturent, louent leurs biens, ont recours au troc, à l'achat groupé ou à la revente - six pratiques "plus ou moins" répandues, identifiées dans l'enquête et qui peuvent être regroupées sous ce terme de "consommation collaborative", concept expliqué clairement dans la vidéo suivante réalisée par Adesias :

 

 

La consommation collaborative from adesias. on Vimeo.

Première observation, ces consommateurs partagent quatre caractéristiques communes :

  • ils sont curieux, avec la volonté de rencontrer régulièrement de nouvelles personnes ;
  • ils se soucient de l'état de la société, mais c'est une préoccupation qui ne se traduit pas forcément en actions concrètes ;
  • ils ont un côté "aventurier", avec une propension à la découverte et à l'expérience (voir à la "prise de risque" mentionne l'étude) ;
  • ils en ont marre de l'obsolescence programmée, avec la volonté et le plaisir de faire durer les objets.

Seconde observation, ces consommateurs sont partagés entre la recherche de bons plans de consommation et des motivations collectives liées à des préoccupations collectives, écologiques, etc. Il n'y a pas de rejet de la consommation, mais le désir de la contrôler et d'en être acteur, on retrouve donc ici les mêmes observations que celles faites par l'Obsoco en novembre 2012.

"Au sein des consommateurs collaboratifs, les pratiquants véritablement portés
par une volonté d’engagement (environnement / société) et des leviers
collectifs sont minoritaires", observe l'IPSOS, qui constate aussi que :

  • Les pratiques augmentent lorsque les motivations individuelles sont fortes;
  • Ces modes de consommation émergents sont souvent la marque, non pas d’un rejet de la consommation, mais d’une volonté de distanciation vis-à-vis de la société de consommation actuelle ;
  • Les consommateurs collaboratifs ont la volonté de reprendre le contrôle de leur consommation ;
  • Ces pratiques sont amenées à se développer et qu'il ne s'agit pas d'un phénomène de mode ;
  • La crise durable dans laquelle la France est installée et le développement des moyens technologiques (Internet et Smartphones) favorisent la recherche de bons plans et la mise en relation des particuliers entre eux (simplification).

Pour Valérie Martin, qui a commandé l'étude pour l'ADEME, "cette enquête permet d'objectiver le débat, de voir que les nouvelles habitudes de consommation démarrent peu à peu, et que nous devons poursuivre nos actions d'information et de sensibilisation auprès des différents publics pour montre qu'il est possible de s'engager, que c'est facile et que ça peut même rapporter de l'argent !"

Six profils différents

En attendant, comme le montre l'image suivante extraite de l'étude, les motivations sont plus individuelles qui collectives, et elles sont très variées d'un consommateur collaboratif à l'autre - ce qui explique peut être le manque de terme dénominatif commun pour les qualifier.

Les Amapiens, 6 % des Français qui ont déjà eu recours à des circuits courts, cherchent avant tout à renouer avec le naturel et à s'engager pour une autre société. Leur profil type ? "Les femmes actives urbaines, 25-55 ans, ayant un niveau d’éducation supérieur, en couple avec enfants, vivant dans le sud de la France, et travaillant dans le secteur public" détaille l'étude. Ces consommateurs sont en recherche d’une consommation plus qualitative et ont déjà adopté des modes de consommation alternatifs et plus émergents.

Les covoitureurs, 8 % des Français, veulent clairement un autre type de société. Leur profil type ? "Les hommes de moins de 45 ans, plus spécifiquement les étudiants et les salariés du secteur public, ayant un niveau d’études supérieur et vivant seul ou encore chez leurs parents, dans l’ouest de la France", explique l'IPSOS. Hypermobiles, ils mixent tout type de transport et ont une consommation de media et divertissement sur smartphone déjà bien plus développée que la population moyenne qui n'enlève rien à leur vie sociale, très riche. Ils ont souvent recours à la location (recours à des sites de location ou d’échange.

Ceux qui louent leurs biens, 6 % de la population, font partie des aventuriers. Ils veulent expérimenter et découvrir et leur profil type est celui des actifs de 35-55 ans, de classe socio-professionnelle supérieure, vivant en couple avec enfants, dans des foyers comptant plus de 4 personnes. Dynamiques et énergiques, ils consomment beaucoup de produits de loisirs et ont souvent des formes d'engagement sociales. Comme le montre le tableau suivant, ils sont les plus en pointe sur ces modes de consommation collaborative.

Les adeptes du troc, 14 % de la population, veulent faire durer les objets. De brocantes en vide greniers mais aussi sur le web, ils sont à la recherche des bons plans et prennent le temps d'en parler autour d'eux, sur le web. Surreprésentés parmi les 18-45 ans, ils sont majoritairement actifs, employés, salariés du secteur privé, et vivent en couple avec enfants.

Ceux qui vendent leurs bien, 52 % des Français, aiment se débrouiller : on les trouve essentiellement parmi les 25-55 ans, en couple avec enfants, et notamment dans les familles comptant plus de quatre personnes. Fins connaisseurs du système D et de la débrouille, ils mixent les façons d’acheter et se montrent actifs pour bénéficier de ce qu’il y a de plus avantageux pour eux : ils préparent leurs achats (information, comparaison des prix), recherchent de la praticité (drive) et des prix intéressants (sites de vente discount, achats groupés, location, brocantes, troc), les sites de petites annonces et d’enchère n’ont pas de secrets pour eux et ils sont adeptes des coffrets cadeaux (de type Smartbox).

L'achat groupé, pour 23 % des Français, concerne essentiellement les consommatrice de 25-45 ans, urbaines, vivant en région parisienne ou dans le Sud-est, active, ayant une profession intermédiaire et qui ont un loisir favori: le shopping. Elles cherchent à se faire plaisir et à accéder aux biens et services qu’ils souhaitent tester à des prix intéressants, et sont du coup très souvent accros à leurs terminaux mobiles.

En ce qui est des pratiques effectives et des intentions des 4500 personnes interrogées, le graphique suivant montre que la progression est encore importante pour le troc et les AMAP, où de nombreux sondés veulent passer à l'acte sans l'avoir fait encore.

A terme, une étude se penchant sur les pratiques d'autopartage, de participation à des collectes de financement participatif et à l'éducation en ligne sera aussi utile pour approfondir les pratiques de partage.

Et vous, quel est votre profil ?

Anne-Sophie Novel / @SoAnn sur twitter

Pour aller plus loin

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23 avril 2013 2 23 /04 /avril /2013 17:25

 

 

Le Monde - Blog

 
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Rafaele Rivais a relayé sur son blog SOS Conso samedi 20 avril un article largement repris et débattu au sujet de l'obsolescence programmée, notion selon laquelle la durée de vie des produits serait volontairement programmée pour être écourtée.

Mais alors que le sujet est de nouveau au coeur de l'actualité, quels sont les outils à disposition des institutions publiques et des citoyens pour ne pas subir l'obsolescence des produits ?

 

Les différents types d'obsolescence

Il est courant de différencier plusieurs types de "désuétude planifiée". D'après un rapport d'information déposé par la mission d'information sur la gestion durable des matières premières minérales au nom de la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire et présenté par les députés M. Christophe Bouillon et M. Michel Havard en octobre 2011, on peut distinguer :

  • L’obsolescence indirecte, tenant généralement de l’impossibilité de réparer un produit faute de pièces détachées adéquates (vous perdez le chargeur de votre téléphone et ne pouvez en retrouver un, vous voilà alors contraint de changer de téléphone) ;
  • L’obsolescence d’incompatibilité, par exemple cas du logiciel informatique qui ne fonctionne plus lors de l’actualisation du système d’exploitation ;
  • L’obsolescence esthétique, avec de nouveaux produits mis régulièrement sur le marché avec une esthétique nouvelle, sinon améliorée, qui rend désuètes les versions précédentes de ces produits (marketing et consommation ostentatoire, quand vous nous tenez...) ;
  • L’obsolescence de fonctionnement, cas des produits conçus de manière à fonctionner un certain nombre de cycles ;
  • L’obsolescence de service après-vente, conçue de façon à ce que le consommateur soit plus enclin à racheter un produit plutôt qu'à le réparer, en partie à cause des délais de réparation et des prix.

En août 2012, un rapport publié par l'ADEME sur la durée de vie des équipements électriques et électroniques insistait sur la notion d'"obsolescence conjoncturelle" des produits pouvant être liée à :

  • Des raisons techniques, par exemple des sauts technologiques ou l’apparition d’incompatibilités entre équipements (par exemple avec la mise en réseau croissante) ;
  • Des raisons économiques, par exemple des questions de coût de stockage des pièces de rechange ;
  • Des raisons réglementaires, par exemple des évolutions de la règlementation en matière de technologies (changement du parc des TV avec le passage de l’analogique au numérique) ou en termes de sécurité (par exemple interdiction ou limitation de certaines substances dangereuses) ;
  • Des choix de consommation au regard d’une évolution naturelle de la gamme des produits disponibles sur le marché, fonction de la maturité de la technologie considérée, des innovations et de la concurrence. Cette obsolescence commerciale serait plus poussée dans le cadre du marché B to C (Business to Consumers) que dans celui du marché B to B (Business to Business), à cause d’effets de mode.

L’ADEME résume ces différents aspects en deux catégories d'obsolescence :

  • L’"obsolescence fonctionnelle", quand un produit ne répond plus aux nouveaux usages attendus, pour des raisons techniques (exemple incompatibilité avec de nouveaux équipements), règlementaires et/ou économiques.
  • L’"obsolescence d’évolution" quand un produit ne répond plus aux envies des utilisateurs qui souhaitent acquérir un nouveau modèle du fait d’une évolution de fonctionnalité ou de design.

Serge Latouche, dans Bon pour la casse (octobre 2012), distingue clairement trois types d’obsolescence : technique (fonctionnelle, liée à l’amélioration des solutions techniques), psychologique (par le biais de la publicité, du marketing, et des comportements induits de consommation) et programmée (volontairement induite par les fabricants pour assurer le maintien et la progression des ventes). Pour l’économiste, ces trois types d’obsolescence fonctionnent en symbiose et s’interpénètrent constamment.

Une chose est sûre: l’ensemble de ces nuances prouve à quel point il est nécessaire de définir la notion dans son ensemble et d’acter de mesures différenciées selon les facteurs objectifs (techniques) et les facteurs subjectifs (effets de mode, mise sur le marché de nouveaux produits) de l’obsolescence.

Au niveau institutionnel

Si la théorie d'un complot industriel organisé est quelque peu abusive, il demeure que certaines anomalies sur le fonctionnement relativement peu durable de certains produits mérite que les institutions se penchent sur la question. D'autant que les éléments liés à cette question ne sont pas seulement dramatiques pour l'environnement (utilisation des métaux rares, traitements des déchets, pollutions induites et effet sur la santé publique), mais aussi en termes économiques et sociaux (pouvoir d'achat, endettement, inégalités, etc.).

Pour Jean-Vincent Placé, cette question souligne les limites de notre société de consommation actuelle et la proposition de loi portée par le groupe écologiste au Sénat afin de lutter contre l'obsolescence, débattue le mardi 23 après midi en présence du ministre Benoît Hamon, vise avant tout à augmenter la durée de vie des produits en étendant progressivement la garantie légale de 2 à 5 ans d'ici 2016.

Elle envisage également de faciliter la mise à disposition des pièces détachées pendant dix ans, de renforcer l’information du consommateur via des notices de réparation et des renseignements sur le recyclage/réemploi et de donner une définition au "délit d’obsolescence programmé" qui pourrait permettre des actions en justice, dont des actions de groupe (ces "class action" telles que celles qui ont été menées aux Etats-Unis, contre Apple, sans aboutir car la firme a proposé de dédommager les plaignants). Sans parler d'une réflexion à mener sur l'économie de la fonctionnalité et la façon de favoriser la vente d'usage plus que de propriété, et le besoin de mener une étude d'impact sur les emplois qui pourraient être créés avec une politique de fabrication favorisant la qualité et l'entretien des produits.

Au niveau européen, certaines directives favorisent indirectement la lutte contre l'obsolescence en insistant sur la nécessité de proposer des produits dotés de  piles et accumulateurs amovibles (directive 2006/66/CE), en incitant à l'écoconception des produits (directive 2009/125/CE) (voir aussi la directive 2012/19/UE du Parlement européen et du Conseil du 4 juillet 2012 relative aux déchets d'équipements électriques et électroniques). D'après le mémoire de recherche effectué par Lydie Tollemer, l'étudiante citée par Rafaele Rivais, la directive 2008/98/CE visant à réduire la quantité de déchets produits dans l'Union Européenne pourrait aussi responsabiliser les fabricants par le biais des quantités de déchets générées par leur production.

Le Conseil Economique et Social Européen travaille actuellement à la rédaction d'un avis qui pourra également soumettre la mise en place de nouvelles directive à la Commission et au Parlement Européens (si cela vous intéresse, une audition publique est prévue le 7 mai 2013 à Bruxelles).

Au niveau de la société civile

En attendant que ces législations soient actées et mises en oeuvre, plusieurs solutions s'offrent à vous pour ne pas tomber dans le panneau.

Lors de l'achat, assurez-vous des conditions de fabrication, renseignez-vous en amont sur la qualité des produits, n'hésitez pas à acheter un petit peu plus cher... si cela vous est permis.

Pour faire votre choix, faites un tour sur le site garantie5ans.com créé en 2012 pour faciliter la recherche de produits ayant une garantie longue. Pour Ivan Couet, le cofondateur du site, "la durée de garantie n'est peut être pas la panacée mais si un constructeur s'engage sur une garantie de 5 ans alors que la loi ne l'oblige pas encore à le faire, c'est qu'il a une certaine confiance dans son processus de fabrication. Il y a 30 ans c'était la fierté d'une marque que de construire des produits durables, c'est a nous, consommateurs, de faire bouger les lignes pour que les entreprises réfléchissent de nouveau a cela."

Damien Ravé, de l'excellent site CommentReparer.com, invite aussi les consommateurs à s'interroger sur leurs habitudes et estime que l'ensemble de ces débats ne peut que pousser à s'interroger vraiment sur la notion de durabilité des produits.

En cas de casse, ayez le réflexe Sugru, la pâte qui répare (presque) tout et n'hésitez pas à bricoler un peu (voir alors CommentReparer.com ou ifixit.com).

En cas de panne, souvent liée à un souci d'ordre électronique, voyez avec le service après-vente si l'objet est encore sous garantie, mais n'hésitez pas autrement à vous rendre chez des professionnels de la bidouille, chez des amateurs qui dans les FabLab ou des HackLab pourraient trouver des solutions à votre problème (en regardant les circuits ou en usant d'une imprimante 3D par exemple s'il s'agit d'une pièce à remplacer qui n'est plus disponible dans le commerce).

Vous pouvez également faire appel à des services comme ceux proposés par Lokéo : cette filiale du groupe HTM (Boulanger) créée en 2010 est le premier site internet en France qui propose des solutions de location en électroménager, image / son et multimédia. Elle entend ainsi vous proposer de profiter de l’usage d’un produit sans les inconvénients liés à l’achat et tout en bénéficiant d’une prestation de service globale que vous n’avez pas avec ce dernier (livraison, installation, SAV, reprise du produit en fin d'usage et recyclage). D'autres sites comme Zilok ou E-Loue vous permettront d'emprunter les objets dont vous avez besoin et éviter de les acheter si cela consiste, par la suite, à les laisser dans un coin...

Autre solution: signer cette pétition lancée sur Avaaz le 23 mars 2013 afin de mobiliser plus largement la société civile sur ces questions et favoriser la prise de décision publique en la matière.

Et quand vos produits sont en fin de vie, n'oubliez pas les filières de réemploi et le réseau des ressourceries. Et si vous souhaitez les remplacer pour des raisons liées à la mode ou à des innovations techniques utiles pour vos activités, cela est votre droit... et n'hésitez pas alors à revendre vos précédents biens...

Si vous avez d'autres astuces, idées ou suggestions, n'hésitez pas à les indiquer en commentaires !

Anne-Sophie Novel / @SoAnn sur twitter

 

 

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22 avril 2013 1 22 /04 /avril /2013 17:44

 

 

 
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Machine à laver en panne au bout de cinq ans, téléviseur qui ne fonctionne plus au bout de trois...

Est-ce une fatalité si les biens d'aujourd'hui durent moins longtemps qu'avant?
Le Centre européen de la consommation (CEC) est persuadé qu'il s'agit d'obsolescence programmée. 

 

Le Centre européen de la consommation vient de publier une étude intitulée:   l'obsolescence programmée, dérive de la société de consommation.
Cette étude a été faite avec l'aide de Lydie Tollemer, une étudiante qui vient d'écrire un mémoire sur le sujet.
L'obsolescence programmée est le fait de planifier délibérément la durée de vie d'un produit. Cela permet de réduire cette durée de vie afin d'inciter les consommateurs à en acheter un autre.

Exemples d'obsolescence programmée

Le type d'obsolescence le plus répandu est l'obsolescence "par défaut fonctionnel": les producteurs font en sorte que si une seule et unique pièce tombe en panne, c'est l'appareil entier qui cesse de fonctionner. Cela concerne les produits électriques ou électroniques tels que les téléviseurs, les téléphones portables, les machines à laver ou les ordinateurs (voir ci-dessous).

- Machines à laver
Le CEC estime qu'elles sont programmées pour faire 2000 à 2500 cycles de lavage seulement. Le remplacement des cuves en inox par des cuves en plastique permet de limiter leur durée de vie: il suffit qu'une pièce de monnaie se soit glissée à l'intérieur, pour qu'elles se cassent, au moment de l'essorage; une température trop élevée peut aussi les déformer.

"En outre, les roulements à bille, qui sont des pièces vitales au fonctionnement de la machine, sont directement moulés dans la cuve en plastique. S'ils ne fonctionnent plus, il faut changer la cuve en entier. Et si la cuve en plastique, moins résistante que celle en inox, casse, il faut remplacer les roulements à bille."

- Téléviseurs
Le CEC estime qu'ils sont programmés pour fonctionner 20 000 heures.
Les pannes viendraient le plus souvent du "condensateur", une pièce qui a pour rôle de les allumer. On peut le faire gonfler et casser, en l'exposant à la chaleur sur la carte d'alimentation.

-Téléphones portables et smartphones
Ils sont victimes de plusieurs types d'obsolescence programmée:
-par défaut fonctionnel: il suffit que la batterie tombe en panne pour qu'ils deviennent inutilisables.
- indirecte: sur beaucoup d'appareils, il est certes aisé d'enlever la batterie, mais il est moins facile de trouver une batterie de remplacement. Même chose pour les chargeurs. Les accessoires ne sont plus disponibles, ce qui fait que l'on ne peut plus utiliser le bien principal.
-par incompatibilité: il faut des appareils toujours plus récents pour télécharger des applications.
-Et ne parlons pas de l'obsolescence esthétique! Les consommateurs veulent le modèle dernier cri. La périodicité de renouvellement des portables est en moyenne de vingt mois.

-Imprimantes
Elles sont victimes d'obsolescence par notification, assure le CEC. Elles signalent le moment où il faut changer la cartouche d'encre, mais continuent encore à imprimer plusieurs dizaines de feuilles. Certains consommateurs changent donc le toner avant que ce soit utile. "C'est l'imprimante qui rend la cartouche d'encre obsolète", conclut le CEC.
Parfois, une puce placée dans l'imprimante enregistre le nombre d'impressions faites et, au bout d'un nombre prédéterminé par le fabricant, bloque cette dernière.

-Ipod et Apple
Les Ipod de première, deuxième et troisième génération d'Apple n'avaient pas e batteries amovibles. Quand la batterie tombait en panne, au bout de dix-huit mois, il fallait acheter un autre appareil. Une "Class action" (action de groupe) a été lancée aux Etats-Unis, mais n'a pas abouti, Apple ayant accepté entre-temps de dédommager ses clients et de proposer des batteries de remplacement.

-Voitures
Il arrive souvent qu'un moteur devienne inutilisable, faute de pouvoir trouver les pièces détachées de rechange

Comment lutter contre l'obsolescence programmée? Les sites internet d'aide à la réparation

Nombre de consommateurs donnent des conseils pour réparer des appareils électrique.

Le site  américain Ifixit.com propose des vidéos, sur lesquelles les salariés montrent comment tout réparer, du grille-pain à la voiture en passant par l'ordinateur portable ou la machine à laver.

En France, il y a le site  Commentreparer.com (qui répertorie des sites de pièces détachéees d'électro-ménager), ou le forum de réparation Tout-electromenager.fr .

 La réponse législative
Le CEC souhaite que l'Union européenne se saisisse de cette question

Il demande que, pour chaque appareil acheté, le consommateur ait accès à l'information sur la durée de vie de l'appareil. Il estime que la durée de la garantie de conformité devrait être allongée en fonction de cette durée de vie moyenne.

En attendant, le CEC soutient la proposition de loi "visant à lutter contre l'obsolescence et à augmenter la durée de vie des produits" déposée le 18 mars sénateur Jean-Vincent Placé (Europe Écologie Les Verts).

Ce texte propose d'étendre la durée légale de conformité des produits électriques et électroniques, de deux ans actuellement, à trois ans au 1er janvier 2014, quatre ans au 1er janvier 2015 et cinq ans au 1er janvier 2016.

"Le fabricant aura ainsi intérêt à produire des biens plus durables, tandis que le consommateur n'aura pas intérêt à renouveler l'achat avant la date d'expiration de la garantie", explique l'exposé des motifs.

Actuellement, pendant les six premiers mois à compter de la vente, le consommateur n'a pas à prouver l'antériorité du vice, mais seulement son existence. La proposition de loi propose d'étendre ce  délai à deux ans.

Le texte dit aussi que le consommateur doit pouvoir disposer des pièces détachées indispensables ) la réparation dans un délai d'un mois, et pendant une période de dix ans à partir de l'achat.

Le texte fera l'objet d'un débat au Sénat mardi 23 avril, à partir de 14h30

[Mise à jour lundi 22 avril:
nombre de lecteurs de Sosconso ayant cité le documentaire  Prêt à jeter - The Light Bulb Conspiracy - réalisé par Cosima Dannoritzer en 2010 et diffusé à plusieurs reprises sur Arte, le voici ci-dessous]

 

 

 

 

 

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17 avril 2013 3 17 /04 /avril /2013 14:27

 

Médiapart

 

 

 

Les « conséquences économiques et sociales qu’aurait la mise en œuvre d'un “virage énergétique à la française” » sont positives, expliquent les ONG qui participent au débat sur la transition énergétique. Selon l'étude d'impact d'un économiste, le scénario de transition énergétique de l’Association d’experts indépendants négaWatt engendrerait une création nette de 235 000 emplois d'ici à 2020, notamment dans le bâtiment et les énergies renouvelables.


Menaces sur les raffineries, crise dans le bâtiment et l’automobile, fermeture de centrales nucléaires, problèmes dans les transports en commun, dépôts de bilans dans le photovoltaïque : l’actualité des dernières semaines impose de mettre l'emploi au cœur du débat en cours sur la transition énergétique voulu par le président de la République.

La question est centrale : quel pourrait être l’impact dans ce domaine de la mise en œuvre d’une politique ambitieuse en matière de réduction des consommations d'énergies par la sobriété et l’efficacité et de développement à grande échelle des énergies renouvelables, que les ONG et les associations du secteur de l’environnement appellent de leurs vœux ?

Aller au-delà des postures et des surenchères auxquelles peut conduire la crainte légitime de la destruction d’emplois existants, sans avoir de visibilité sur ceux qui seront créés, nécessite de disposer d’une analyse rigoureuse des conséquences économiques et sociales qu’aurait la mise en œuvre d'un « virage énergétique à la française » : c’est précisément à cette exigence que répond l’étude menée par Philippe Quirion, économiste, chargé de recherches au CNRS, publiée récemment. 

Cette étude compare les impacts en 2020 et 2030 de deux scénarios contrastés : d'un côté le « tendanciel » qui prolonge les évolutions récentes et prend en compte les politiques déjà décidées, de l’autre le scénario de transition énergétique construit et rendu public en 2011 par l’Association d’experts indépendants négaWatt. Rappelons que ce dernier conduit à une division par deux dès 2030 des émissions de CO2 d’origine énergétique de la France et à une division par 16 en 2050, sans recours aux technologies incertaines telles que la capture-stockage du CO2, sans mise en service de nouvelles centrales nucléaires hors de prix et en fermant les centrales existantes après quarante ans d’exploitation au maximum.

Les résultats sont sans appel : la mise en œuvre du scénario négaWatt se solde par la création nette de 235 000 emplois en 2020 et de 632 000 en 2030, déduction faite des emplois détruits dans certains secteurs. Les créations d'emplois non délocalisables les plus nombreuses se situent dans le bâtiment grâce notamment à un programme massif de rénovation énergétique, et elles font bien plus que compenser le ralentissement de l’activité dans la construction neuve que l’on connaît actuellement. De même, les emplois créés dans les énergies renouvelables sont bien plus nombreux que ceux qui sont perdus dans les énergies fossiles et le nucléaire. En revanche, le solde s’avère négatif dans les transports, où le développement des transports en commun et du fret ferroviaire et fluvial ne compense pas complètement la baisse d’activité du fret routier, de l’aérien, des infrastructures routières et de l’automobile. 

Autre effet qui n’est pas le moindre :  le coût global est nettement plus faible dans le scénario négaWatt que dans le scénario tendanciel. En effet, si le scénario négaWatt entraîne des dépenses supplémentaires (énergies renouvelables, isolation, transports en commun…), celles-ci sont très inférieures aux économies engendrées dont, en particulier, une très forte réduction des importations de pétrole et de gaz ou d'investissements souhaités pour la recherche de ressources non conventionnelles. Ces économies nettes (on parle ici de plusieurs dizaines de milliards d'euros) libèrent du pouvoir d'achat chez les ménages, ce qui va permettre de créer et pérenniser plusieurs centaines de milliers d'emplois dans les autres secteurs de l'économie.

Et ce n’est pas tout : répartis à travers tout le pays et offrant de multiples opportunités de reconversion aux salariés des secteurs en déclin, les emplois créés dans tous les secteurs exigeront un bon niveau de qualification et de rémunération. Ils nécessiteront un effort sans précédent de formation professionnelle et d’accompagnement des mutations qu'il convient de lancer dès maintenant.

Devant un tel constat, l’hésitation n’est plus de mise ! Sachons offrir à nos enfants un avenir qui n’est plus synonyme de crise et de chômage : ouvrons-leur sans tarder le chemin de la transition écologique de notre système énergétique !

 

Cécile Ostria, directrice de la Fondation Nicolas Hulot pour la nature et l'homme
Benoît Hartmann, porte-parole de France Nature Environnement
Jean-François Julliard, directeur général de Greenpeace
Philippe Germa, directeur général du WWF
Geneviève Azam, membre du conseil scientifique et du conseil d'administration d'ATTAC
Pierre Perbos, président du Réseau Action Climat
Madeleine Charru, présidente du Cler, réseau pour la transition énergétique
Pierre Radanne, président de 4D
Jacques Beall, vice-président de Surfider Foundation Europe
Stephen Kerckhove, délégué général d'Agir pour l'environnement
Marie Atinault, représentante légale d'Effet de serre toi-même !
Jean-Yves Leber, représentant d'Ecologie sans frontière au débat sur la transition énergétique

 

 

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15 avril 2013 1 15 /04 /avril /2013 19:01

 

 

Rue89 - Terra Eco 15/04/2013 à 18h31

Terra Eco"
Alexandra Bogaert | Journaliste

 

 

Les initiatives contre la surconsommation se répandent en France. Dernières en date, les « gratiferias », grands marchés gratuits où l’on donne ce dont on ne se sert plus. Libération matérielle durable ou expérience éphémère ?

 

 


La gratiferia de la place de la Bourse à Paris, avril 2013 (Acampadaparis.tumblr.com)

 

Un bric-à-brac géant en libre-service et sans passer par la caisse. Le tout place de la Bourse, à Paris. Notre système économique aurait-il pour de bon perdu son latin ? Oui, et tant mieux, ont voulu montrer les « Indignés » de la capitale, samedi 13 avril. Pour l’illustrer, et montrer qu’« il est temps de changer de paradigme », le mouvement parisien Réelle démocratie maintenant a organisé la première « gratiferia » de la capitale. Quelque 200 personnes sont passées, malgré la pluie, et le noyau dur a décidé d’une prochaine manifestation le 12 mai place Stalingrad.

Florent, graphiste et animateur du mouvement, explique le principe de ce grand marché gratuit : les badauds choisissent librement les objets généreusement ramenés par d’autres, et les embarquent sans sortir leur porte-monnaie. « Vêtements, nourriture, objets divers, livres, ce n’est pas du troc, vous pouvez venir sans rien d’autre que votre bonne humeur... » précise la page Facebook de l’événement. « On se doute qu’il y aura plus de gens qui vont venir chercher quelque chose de gratuit que de gens qui vont venir donner. Le but n’est pas de remplir son chariot mais de faire une expérience de partage », expose Florent qui espère renouveler cette démarche « libre et positive » chaque mois .

Une « libération matérielle »

Ce vide-grenier d’un nouveau genre essaime en France depuis septembre dernier, quand cinq Charentaises l’ont importé d’Argentine. C’est là qu’un certain Ariel Bosio a organisé début 2010 dans son appartement (avant un énième déménagement), la première foire gratuite visant la « libération matérielle » afin de se détacher de « l’oppression du système économique ».

Ce nouveau chantre autoproclamé de la décroissance explique sa démarche dans une vidéo sur YouTube, intitulée « Gratiferia », l’économie de la nouvelle ère.

 

 

La gratiferia s’inscrit dans ce que le sociologue spécialiste de l’économie du don Alain Caillé appelle le « convivialisme ».

« Cette doctrine cherche à comprendre comment refonder la démocratie sans la faire reposer sur une perspective de croissance, qui n’est plus vue comme la solution première à tous les maux de l’humanité. »

Parmi les centaines d’initiatives qui visent à fonder le rapport social sur autre chose que la quête de toujours plus, on trouve « l’économie sociale et solidaire, le commerce équitable, le couchsurfing, les monnaies locales, etc. », énumère le professeur à l’université Paris-Ouest-Nanterre-La Défense. Depuis peu, les gratiferias – qui restent des événements ponctuels – et les zones de gratuité, qui reposent sur le même principe mais qui sont établies dans la durée, souvent au sein de locaux associatifs ou de bars, complètent la liste (en témoigne le répertoire d’initiatives regroupées sur ce site)

« Donner une deuxième vie aux objets, sortir du mouvement de surconsommation, organiser le sens du partage, tout ça m’a immédiatement parlé », explique Isabelle, 44 ans, habitante de Châteauneuf-sur-Charente. Elle est la première, en France, à s’être lancée dans l’organisation d’une gratiferia, avec sa sœur, une amie et deux autres organisatrices rencontrées via Facebook. Ensemble, elles ont créé une association Gratiferia Charente et en sont désormais à leur cinquième marché gratuit depuis septembre dernier.

Comment préparer l’événément sans argent

« On s’est d’abord interrogé sur le mouvement de gratuité, à commencer par comment organiser la manifestation sans argent », énumère celle qui exerce le métier de commerçante ( !). Sur ce point, le système D a fonctionné à plein :

« Toi t’as du Scotch, toi du papier, toi un feutre, toi une imprimante : ensemble, on va faire les affiches et les mettre chez les commerçants du coin. »

Les questions d’organisation réglées, d’autres interrogations ont émergé :

« Est-ce qu’on va nous apporter assez d’affaires ? Est-ce que certains ne vont pas tout prendre sans rien amener ? »

Evidemment, le risque est là. Florent non plus n’est pas « dupe de certaines réalités, dues à un système et un Etat qui favorisent l’individualisme et qui corrompent les individus ». « S’il y a des excès, il faut s’efforcer de ne pas juger les gens mais de les responsabiliser », explique l’indigné parisien.

« On dépose son objet, et on le lâche »

Résultat, à Chateaûneuf-sur-Charente, avec Isabelle :

« Les gens sont globalement respectueux, ils ne se ruent pas sur ceux qui apportent de nouveaux objets pour les dévaliser. Il leur est même parfois difficile de prendre sans rien donner en échange. »

Bien sûr, « certains ont d’abord pris beaucoup, mais au final ils ont ramené les objets dont ils ne se servent pas aux gratiferias suivantes ».

Et si certains objets se retrouvent dès le lendemain sur des sites de vente en ligne (comme en témoigne cet article de La Charente libre) ? « Et alors ? » demande Isabelle.

« Peut-être la personne a-t-elle besoin d’argent. On n’a pas à juger. Le don est anonyme. On dépose son objet, et on le lâche, ce qui évite de choisir la personne à qui on le donne. Car derrière le don, il n’y a aucune condition. »

Si certains ne viennent que pour se servir...

C’est bien cette absence de réciprocité qui gène le sociologue Alain Caillé. « Faire de la gratuité entre inconnus qui le resteront me semble trop ambitieux », réagit-il.

« Le don n’est pas politique – ce qui est le cas dans ces zones de gratuité ou les gratiferias qui expriment un refus de la société marchande. La relation de don n’a de sens que si elle aboutit à un rapport social, donc à un échange. Or, si certains viennent à ces événements uniquement pour se servir, c’est finalement le comble de l’utilitarisme ! »

La généreuse entreprise se trouverait selon lui ainsi « sapée dès le départ » et ne serait vouée qu’à une existence éphémère.

Pour le sociologue, ces gratiferias devraient s’inspirer des « donneries » belges, qui centralisent sur Internet des offres de dons qui ne peuvent se faire qu’« à une distance que nous pouvons raisonnablement parcourir à pied ou à vélo pour récupérer des objets », comme l’indique leur site. Une manière de garantir qu’on recroisera un jour son généreux donateur. Et de créer une connivence entre inconnus.

« L’échange, le partage, la discussion sont aussi au cœur de notre initiative », rassure Florent, pour qui le vrai but de la gratiferia parisienne est de « trouver des alternatives à la précarité ». Il précise toutefois que l’événement est ouvert à tous les milieux sociaux. Même les riches pourront se servir gratis.

Publié initialement sur
Terra Eco
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5 avril 2013 5 05 /04 /avril /2013 17:53

 

http://www.reporterre.net/spip.php?article4051

 

Alternatives - Terre de Liens Normandie

  600 000 emplois créés si on mangeait local...

 

mercredi 3 avril 2013

 

 

Terre de Liens Normandie lance "Le Convertisseur alimentaire" : ce calculateur permet d’évaluer le nombre possible de nouveaux paysans si l’on passait à une politique d’alimentation produite localement.


Terre de Liens Normandie lance le Convertisseur Terre de Liens

Et si on décidait de protéger la terre agricole par notre alimentation ?

Et si on décidait de ré-ancrer notre alimentation dans nos territoires ?

Et si on décidait de se rendre solidaires des paysans et paysannes (qui souhaitent explorer et construire un véritable développement alimentaire soutenable...) en généralisant le commerce alimentaire équitable de proximité ? Un commerce qui permette à cette profession (et aux activités qui lui sont liées) de retrouver une vraie autonomie face à des marchés mondiaux dont ils ne maîtriseront probablement jamais la régulation ?

Et si on développait notre citoyenneté économique créatrice d’emplois, partout, maintenant, pour montrer qu’elle est bien plus qu’un concept mais bien un acte probant, qui montre aux dirigeants de tous nos territoires et de tous bords politiques les voies possibles pour une économie agricole et alimentaire réellement soutenable, qui conteste aussi, en actes, le manque de légitimité sociale de l’actuelle PAC alors qu’une autre PAC est possible...

1 187 847 : c’est le nombre (minimum !...) de paysans et paysannes (installé-e-s en bio) que nous devrions avoir en France (contre moins de 500 000 actuellement...) si tout le monde mangeait local.

22 963 759 : c’est le nombre d’hectares de Surface Agricole Utile (SAU) que nous pouvons protéger de nombreux mésusages grâce aux nouvelle Dynamiques de Développement Économique par l’Alimentation Locale (new-DDEAL...).
Ce sont également autant de terres agricoles soustraites à la compétition économique alimentaire mondiale qui ruine les possibilités d’auto-développement et de souveraineté alimentaire des pays "dits" non ou peu développés.

17 193 800 : c’est le nombre d’hectares de SAU nécessaires pour se nourrir localement si nous faisons évoluer notre régime alimentaire en diminuant notre consommation de viande rouge au profit de la viande blanche et des protéines végétales.

5 769 959 : c’est la surface agricole que cette évolution progressive vers un régime alimentaire moins carné pourrait dégager ; autant de terres agricoles que nous pourrions alors destiner aux autres fonctions "oeconomiques" (se loger, se vêtir, se chauffer, etc.). Celles dans lesquelles il nous faut investir et innover pour réaliser la nécessaire transition agricole telle que la dessinent certains scénarios d’alter-développement comme Afterre 2050.

Terre de Liens Normandie vous invite donc à

calculer le nombre de paysans que vous pouvez soutenir et installer près de chez vous

et à passer à l’action solidaire et écologiquement responsable ici et maintenant.



Source : Convertisseur Terre de Liens Normandie

Photo : Greenchamade

Ecouter par ailleurs : Qu’est-ce que Terre de Liens ?

 

 

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3 avril 2013 3 03 /04 /avril /2013 14:19

 

 Ladepeche.fr

Publié le 14/02/2013 à 07:23 solidarité

 

Des potagers en ville où l'on se sert gratuitement

Les Incroyables comestibles s'installent dans la ville rose et souhaitent créer des potagers sur l'espace public où chacun pourra récolter gratuitement fruits et légumes.

 

«Servez-vous c'est gratuit !» est le mot d'ordre du mouvement des «Incroyables Comestibles» qui s'implante désormais à Toulouse. Eco-citoyen, le but est de mettre à disposition des citadins de la nourriture gratuite et en libre-service, produite à même le sol ou hors sol directement sur l'espace urbain. Une initiative avait déjà eu lieu en juin dernier, où un groupuscule de l'association Partageons les Jardins a planté 300 pieds de tomates le long des berges du Canal du Midi. Alice, membre de l'association née il y a un an, confie à l'assemblée réunie mercredi dernier que si les riverains «ont joué le jeu» en entretenant les plants, la municipalité a montré son désaccord. Les pieds de tomate ont en effet endommagé les plantes déjà présentes. S'approprier l'espace urbain oui, mais sans nuire à la végétation déjà présente. Mais l'initiative ne s'arrête pas qu'aux espaces verts de Toulouse. La mobilisation mercredi était forte, les particuliers veulent mener à leur tour des actions concrètes, et proposent aux volontaires de venir s'occuper de leurs jardins privés pour ensuite en partager les fruits. Certains proposent de s'occuper d'un hectare à Seysses, de reproduire le phénomène à Saint Lys, d'autres d'aménager les trottoirs pour les mettre en terre et donner «une perspective magnifique de la ville, où la campagne s'inviterait».

Cependant, cela requiert une autorisation de la mairie. Les ambassadeurs d'Incroyables Comestibles dans Toulouse ont donc décidé de mener une double action, légale et «sauvage», interpellant les passants et leur sensibilité. Un projet audacieux et novateur donc, mais qui selon Joseph et Benjamin, représentants de Toulouse en Transition, doit être structuré. Ils préconisent de prévoir les actions pour le long terme, de promouvoir la variété végétale afin de donner plus de richesse et toucher plus de monde. Il faut aussi mettre en valeur la collectivité, «fondamentale», la transmission des savoirs, la «proximité rétroactive» (en cas de problème, les citoyens peuvent s'orienter sur des solutions alternatives rapidement) et faire en sorte que les aménagements soient autosuffisants. Un projet qui prend racine et va bourgeonner dans les endroits les plus imprévus. A. J


Contre la Crise

Le projet a vu le jour en 2008 à Todmorden, petite ville d'Angleterre. Les habitants ont concrétisé ce projet fou en réponse aux prix des produits frais trop chers, faute à la crise. L'idée s'est répandue aujourd'hui sur chaque continent et compte déjà des adeptes en France à Strasbourg et à Nouméa.

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2 avril 2013 2 02 /04 /avril /2013 20:35

 

telerama.fr

 

Le 30/03/2013 à 00h00
Weronika Zarachowicz - Télérama n° 3298

 

Enquête | A l'heure où les fermes meurent les unes après les autres, l'association Terre de liens résiste. Elle apporte son aide aux jeunes paysans qui s'installent en bio.

 

 

 Antonin, 25 ans, tout frais maraîcher bio, vend ses légumes soit en direct, soit par le biais des paniers Amap. © Rémy Artiges pour Télérama

Antonin, 25 ans, tout frais maraîcher bio, vend ses légumes soit en direct, soit par le biais des paniers Amap. © Rémy Artiges pour Télérama

 

Ce matin, la grêle tombe dru sur le petit village de Saint-Aignan-de-Cramesnil, dans la plaine de Caen. Le vent balaie les deux hectares du terrain d'Antonin Gourdeau. Les pieds pataugent dans la boue, on s'abrite sous un vaste bâtiment en construction. Bientôt, ici, sur la terre nue, s'élèvera la Ferme de la Petite Bruyère, une ferme « écoconstruite », flambant neuve. Au rez-de-chaussée, l'épicerie paysanne pour vendre les légumes du champ, le garage pour le tracteur et l'entrepôt ; à l'étage, un logement pour Antonin, 25 ans, tout nouveau maraîcher de Saint-Aignan et créateur d'un singulier îlot de diversité – quarante légumes bio, « plus de cent cinquante variétés », fleurs pour attirer les pollinisateurs et, bientôt, plantes aromatiques…

Pourquoi devient-on paysan à cet âge, quand on n'est pas fils d'agriculteur soi-même ? Pourquoi décide-t-on de s'installer en bio dans une vaste plaine envahie par les cultures intensives de betterave, de colza et de lin ? Une partie de la réponse se niche dans le regard noir et déterminé d'Antonin. « J'ai toujours eu la tête dure », lâche-t-il. Avant l'agriculture, il y a eu un parcours scolaire chaotique, une période ébéniste, une autre musicale, tuba aux pompiers de Paris… La passion pour les plantes est venue sur le tard : peu à peu, au fil de stages auprès de maraîchers.

Mais s'installer, c'était « une autre histoire ». Antonin n'est pas fils de paysan, n'a pas d'argent pour acheter un terrain, ni même d'apport pour emprunter. Et la terre coûte de plus en plus cher, partout en France. En Normandie, le prix de l'hectare a grimpé en flèche : plus 43 % en dix ans. Et les fermes meurent, dans le plus assourdissant des silences. Un chiffre étonnant dit l'ampleur du processus : deux cents fermes disparaissent chaque semaine en France. Bâtiments transformés en résidences secondaires ou en restaurants chics, terres muées en zones d'activité commerciale, en lotissements ou rachetées par de grosses structures agricoles qui s'agrandissent, se concentrent toujours plus et stimulent une agriculture industrielle très polluante.

<p>Sou­tenu par Terre de liens et de mieux en mieux inséré dans la commune, Antonin apprivoise le métier. © Rémy Artiges pour <em>Télérama</em></p>

Sou­tenu par Terre de liens et de mieux en mieux inséré dans la commune, Antonin apprivoise le métier. © Rémy Artiges pour Télérama

Heureusement, la route d'Antonin a croisé celle de Terre de liens, un organisme inédit doté d'une triple casquette : à la fois association qui milite pour le développement de l'agriculture biologique, société foncière et fonds qui aide les jeunes à accéder à la propriété agricole. Son credo ? La terre n'est pas une marchandise que l'on peut laisser au marché, c'est un « bien commun », comme l'air, comme l'eau, qu'il faut préserver.

D'où cette idée, simple et lumineuse, de faire appel à l'épargne collective – moyennant avantages fiscaux – et aux dons, pour acheter des fermes ou des terres, et les louer à de jeunes agriculteurs souhaitant s'ins­taller en bio. Et préserver, coûte que coûte, l'usage agricole des terres. Créée par le Néerlandais Sjoerd Wartena en 2003, l'association a fait tilt très vite : 116 actionnaires et un capital de 700 000 euros, en 2004 ; 7 600 actionnaires, 30 millions de capital et 19 associations régionales, partout sur le territoire, en 2012.

“La population est urbaine à 80 % :
tout l’enjeu est qu'elle se reconnecte
avec sa région et prenne conscience
que la terre est un bien commun.”

Gaël Louesdon, directeur de la branche normande de Terre de liens

Depuis quatre ans, elle a notamment creusé son sillon « environnemental, éducatif et de finance responsable » en Basse-Normandie et « même en Haute-Normandie, l'une des régions les moins bio de France ». Cinq cents actionnaires ont déjà investi dans neuf fermes, avec « l'envie de préserver ce capital précieux que sont nos terres ET de redonner du sens à leur épargne, explique Gaël Louesdon, le directeur de la branche normande. On leur dit : reprenez en main une partie de votre épargne, vous connaissez son utilité sociale et environnementale, près de chez vous. La population est urbaine à 80 % : tout l'enjeu est qu'elle se reconnecte avec sa région et prenne conscience que la terre est un bien commun. »

Bref, Terre de liens permet de lutter concrètement contre la désertification rurale et l'étalement urbain, et de convaincre les élus locaux qu'une autre politique foncière est possible – eux qui sont « parfois démunis quand leurs terres agricoles sont menacées », poursuit Gaël Louesdon. « Quand l'une d'elle est transformée en zone d'activité, le prix de vente est multiplié par trois à cinq en moyenne. Pour une zone de lotissements, on multiplie par dix, vingt voire trente ! Nous proposons une autre manière de réfléchir à la façon de gérer, ensemble, une terre. »

Chaque année, une centaine de projets atterrissent sur les bureaux de Terre de liens : « Vingt à trente d'entre eux tiennent la route. On en sélectionne un à trois par an sur les deux régions, Haute et Basse-Normandie. Ensuite, chaque instal­lation se fait sur douze à dix-huit mois. Il faut réunir 75 % des fonds avant installation et puis, ça prend du temps de persuader les élus, les voisins, les habitants du coin… » Comme à Saint-Aignan, chez Gaël Louesdon, élu de la commune depuis 2008, et où Antonin bataille ferme.

“Le discours anti-écolo passe plutôt bien ici.”
Gaël Louesdon, élu de Saint-Aignan-de-Cramesnil depuis 2008

La naissance d'une ferme, avec très peu de terres et en participatif ? « C'est un acte de résistance, une cellule souche qui, on l'espère, va se développer », dit Gaël. Une cinquantaine de citoyens ont investi, mais peu d'habitants de la commune. « Ils sont difficiles à convaincre, c'est un village-dortoir pour une majorité de gens qui bossent dans l'automobile, dans le tertiaire… Le discours anti-écolo passe plutôt bien ici. »

Les gens du coin ont d'abord observé Antonin en silence, lui qui a repris des terres qui n'avaient pas été cultivées depuis plus de vingt ans et qui travaille en traction animale, avec deux ânes « pour respecter la terre ». Personne ne lui a dit que le champ avait « servi à enterrer le matériel militaire de la région après la Seconde Guerre mondiale. Tous les trois mètres, je tombe sur des casques, des douilles, ça fait deux ans que je déterre des bouts de métal ! » Et puis, il y a ces deux couloirs de vent « qui font très mal ». « Normalement, on remplace une bâche tous les dix ans pour une serre, j'en ai déjà utilisé trois en deux ans… »

Sou­tenu par Terre de liens et de mieux en mieux inséré dans la commune, Antonin apprivoise le métier, vend ses cageots de légumes en direct et par le biais des paniers Amap (Association pour le maintien d'une agriculture paysanne), vient de créer un jardin communautaire. Et se donne quinze ans pour « développer l'aromate », plus facile à travailler et à forte valeur ajoutée. « Je veux prouver qu'un jeune peut s'installer en bio, qu'on peut inventer de nouveaux modèles. » En France, l'agriculture est essentiellement tournée vers l'élevage et les céréales, qui captent toutes les subventions européennes, alors que la demande de légumes est énorme : « En quatre ans, on est passés de quatre à quarante maraîchers bio dans la région. »

<p>Grâce à un financement participatif, Sophie et Vincent s'installent dans une ferme acquise par Terre de liens. Ils étaient à la recherche de terres depuis huit ans. © Rémy Artiges pour <em>Télérama</em></p>

Grâce à un financement participatif, Sophie et Vincent s'installent dans une ferme acquise par Terre de liens. Ils étaient à la recherche de terres depuis huit ans. © Rémy Artiges pour Télérama

A une centaine de kilomètres de Saint-Aignan, dans l'Eure, le paysage a changé, et une ferme nichée dans le bocage enneigé, en bordure de forêt, raconte une autre histoire. Celle d'un couple de trentenaires, Sophie et Vincent Ozeblio et leurs deux enfants, en recherche de terres depuis huit ans et sur le point – « enfin ! » – de s'installer. Dans l'Eure aussi, le prix du foncier s'est envolé, et les petites exploitations à taille humaine se sont faites de plus en plus rares. Vincent, un enfant du pays, a vu la région changer au fil des années. « Il y a encore dix ans, c'était de l'herbage et des fermes. Maintenant, il y a plein de pavillons. Pendant ce temps-là, l'Eure a perdu plus de 35 % de ses paysans, un record en France… »

Il y a quelques mois, Sophie et Vincent visitent la ferme de Françoise Moraine, à Sainte-Marguerite-en-Ouche, près de Bernay (Eure). Membre de la Confédération paysanne, cette éleveuse au beau visage grave cherche avec son voisin Michel Coq, éleveur caprin, à « installer des jeunes dans le même esprit : une agriculture durable et de proximité. Avec l'idée de leur transmettre la ferme, nos cheptels, notre savoir-faire et notre clientèle ».

Vingt-trois hectares dont trois de vergers, des troupeaux de chèvres et de ­brebis, un charme fou. Et un endroit atypique pour la région : « L'Eure s'est spécialisée dans l'agriculture industrielle, explique Vincent, de grosses structures agricoles livrent des matières premières, lait et surtout céréales… La moyenne, dans le coin, c'est un agriculteur pour cent cinquante hectares, alors qu'ici, sur vingt-trois hectares, on peut faire vivre une famille. » Et un projet d'élevage en bio, avec commercialisation en circuits courts.

<p>Françoise, éleveuse dans l'Eure, laisse sa ferme à Sophie et Vincent. Une façon de transmettre son éthique. © Rémy Artiges pour <em>Télérama</em></p>

Françoise, éleveuse dans l'Eure, laisse sa ferme à Sophie et Vincent. Une façon de transmettre son éthique. © Rémy Artiges pour Télérama

Epaulés par Terre de liens, Sophie et Vincent se lancent en juillet 2012 dans une campagne intensive d'appels aux dons : sur les marchés avec Michel, lors de réunions publiques de l'Amap du coin, lors de fêtes locales et de journées portes ouvertes sur la ferme… La documentariste ­Marie-Monique Robin « marraine » le projet du couple, organise une projection de son dernier film, Les Moissons du futur, avec débat et buffet « pour sensibiliser ».

Résultat, cent dix-sept souscripteurs de Terre de liens ont dit « banco » : des particuliers, des associations comme l'Amap ou les deux Biocoop de la région… La preuve, selon Vincent, Françoise, Gaël et les autres Terre de liens, que « la demande pour une autre agriculture est là ». Que la vraie modernité est dans les petites fermes diversifiées. « Pour l'instant, c'est sûr, dit Vincent, nous sommes minoritaires, surtout dans le coin. Mais la France s'est donné comme objectif d'avoir 20 % de surfaces en bio en 2020. Nous, on veut être acteurs de ce changement, et il faut bien commencer quelque part… ».


Le Convertisseur alimentaire

Combien de paysans faudrait-il dans votre région pour manger local et bio ? Il suffit de se connecter au Convertisseur alimentaire pour avoir la réponse, en un seul petit clic. Ce tout nouvel outil, à la fois ludique et ultra pédago, a été développé par Julien Losfeld, de l'antenne normande de Terre de liens, dans la lignée de la calculette à empreinte carbone proposée par le WWF.

Son objectif ? « Permettre à tout citoyen, mais aussi aux communes ou aux cantines scolaires, d'estimer les surfaces agricoles nécessaires pour se nourrir en bio, explique Gaël Louesdon. Un bon moyen pour prendre conscience des efforts à accomplir, mais aussi pour faire pression sur ses élus afin de faire bouger les choses ! C'est aussi une autre façon de faire le lien entre consommateurs et producteurs. » Et un bon résumé du message constructif de Terre de liens : la terre est l'affaire de tous.

 

 

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