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30 avril 2015 4 30 /04 /avril /2015 15:41

 

Source : http://www.bastamag.net

 

Habitat partagé

Au cœur de ruelles médiévales, des habitants rénovent un lieu hors du commun pour vivre autrement

par

 

 

 

Habiter autrement les centres des petites villes, accéder à la propriété quand on n’a pas de très gros moyens, vivre sans voiture et partager les problèmes : c’est l’aventure dans laquelle s’est lancé un collectif à Auch. Avec un projet de réhabilitation hors du commun : un important corps de bâtiments sur 3000 m² de terrain, réparti sur 7 niveaux, enclavé en plein centre-ville, accessible essentiellement par des escaliers sinueux. Ici on partage beaucoup – travaux, réflexions, espaces communs à rénover. La topographie particulière du terrain, le choix d’un collectif démocratique, la mixité sociale, en font une expérience assez unique, qui tâtonne encore mais veut s’inscrire dans la durée. Et qui, pour l’instant, essuie les plâtres, au propre comme au figuré. Rencontre.

Pour profiter de ce reportage en grand format, c’est ici.

 

On m’avait parlé d’un immeuble en plein centre-ville, retapé par une sorte de communauté. Je connais un peu le coin, un enchevêtrement de ruelles médiévales qui cascadent à flanc de coteau au cœur d’Auch, la capitale du Gers et de la Gascogne. C’est toujours un peu étroit et très pentu, et j’ai imaginé une petite baraque biscornue habitée par une bande de hippies, enclavée dans un quartier sombre et triste. Je décide de tenter l’approche par les « pousterles », ces escaliers uniques en leur genre qui relient la haute-ville d’Auch à la rive gauche du Gers.

En fait, la pousterle des Couloumats (les « pigeons », en Gascon) est l’une des plus longues de la ville — et donc du monde, puisque les pousterles n’existent que dans cette ville et sur ces coteaux qui soutiennent la cathédrale. Il y a là tout un Monopoly de petites maisons en terrasse auxquelles on ne peut accéder que par les escaliers. Plus haut dans mon ascension, je croise une vielle dame qui se moque gentiment de mon souffle court et me glisse : « Surtout, il faut de bonnes cuisses ! » J’atteins enfin une petite rue encaissée qui s’accroche dans la pente. Derrière un portail en bois, sur lequel est scotché un permis de construire, je plonge avec délice dans l’ombre d’un garage encombré de matériaux de construction éparpillés. Suivant les bruits de coups et de coupe caractéristiques des travaux, je débouche brutalement à la lumière et dans un monde totalement inattendu.

 

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Chantier de la terrasse
La terrasse du bloc — un immeuble de 5 étages — d’où sont sortis 150 m³ de gravats et où, un jour, poussera un jardin potager.
Un lieu incroyable

L’histoire commence au printemps 2013 quand Sylvie et Fred, jeune couple avec deux enfants, cherchent à louer un logement un peu plus grand dans la ville. Fred raconte :

« Être propriétaires n’a jamais franchement été dans nos projets ou notre façon de vivre. Nous voulions juste que les enfants aient chacun leur chambre. Et habiter dans le centre-ville pour pouvoir nous rendre à pied à la plupart de nos activités quotidiennes, utiliser le moins possible la voiture. Le problème, c’est que nous ne trouvions rien de bien convaincant sur le marché. On a commencé à se dire qu’il fallait peut-être chercher à louer plus grand, quitte à vivre en colocation.

C’est alors que l’agent immobilier nous a proposé de visiter cet endroit. Cela ne correspondait pas à notre demande, mais cela ne coûtait rien de venir visiter. C’était un weekend où nous recevions des copains et nous nous sommes retrouvés à 25 dans… ce lieu incroyable. »

 

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Cour commune
Les arcades sur la cour ouest, niveau rue, futur cabinet d’architectes.

 

Ce lieu incroyable, c’est un ancien institut médico-éducatif (IME), en vente depuis 7 ans : 3000 m² de foncier dont 1800 m² habitables, répartis sur 5 niveaux en terrasses, avec une vue imprenable sur la rivière qui roule ses eaux boueuses des dernières pluies en contrebas, la ville qui ondule sur ses collines et même la barre bleue des Pyrénées, au loin, quand il fait beau. Le tout à un jet de caillou de la cathédrale, de la mairie, des commerces, du collège, de tout ce qui fait l’attrait d’une petite ville de province.

 

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Percer des portes
Jean-Marc et Nicolas, les deux architectes qui n’ont pas peur de prendre la poussière et de donner de leur personne, en train de percer une nouvelle porte sur la pousterle latérale ouest.

 

Entre deux coups de masse pour faire tomber un mur, Nicolas prend le relai du récit. Il fait partie du projet comme architecte associé, avec Jean-Marc et Sophie. À eux trois, ils ont acheté un lot pour monter leur cabinet dans la résidence. Si Nicolas ne compte pas habiter ici, il est maître d’œuvre pour trois des propriétaires de la résidence. Mais surtout, il participe activement aux corvées qui font travailler tous les membres du collectif sur les parties communes.

« Il y a trois grands corps de bâtiment : ce qu’on appelle « le bloc », qui est le plus récent, formé de deux immeubles de 4 et 5 étages ; les arcades, sur deux étages avec les coursives et dont le rez-de-chaussée est au niveau de la rue ; les communs, essentiellement la cour, la terrasse et les pièces et dessous – l’atelier, le gymnase dont on va peut-être faire une salle des fêtes et un local à vélo. D’après nos recherches, c’était un monastère des pénitents blancs au 17e siècle. On voit encore la façade de la chapelle depuis la rue. Il semblerait même que sur ces terrasses, on ait cultivé la fameuse poire d’Auch, servie sur la table des rois.

Les arcades et les colonnades ont dû être ajoutées au XIXe siècle, car on n’en trouve pas trace dans le cadastre napoléonien. Ensuite, il y a eu une école primaire et maternelle au XXe siècle et à partir des années 70, elle a été aménagée en IME. L’IME a été contraint d’abandonner ces bâtiments devant l’impossibilité de les mettre aux dernières normes et a déménagé en 2008 aux confins de la ville. Depuis, le bâtiment est resté en vente. Pas facile de vendre un espace pareil aussi peu accessible bien qu’en plein centre-ville ! Qui pouvait acheter quelque chose comme cela ? Sans compter qu’il y avait deux vendeurs, la mairie et l’ADSEA (Association départementale de la sauvegarde de l’enfance et de l’adolescence). Au départ, le prix était de un million d’euros. Lors de la première visite, ce n’était plus que 250 000 euros. Et là, ça change tout ! »

 

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Vue sur la ville
Arcades, coursives, niveaux imbriqués et ouverture sur la ville : c’est un voyage immobile sur les ponts d’un paquebot qui domine la ville.
Un projet démocratique et intergénérationnel, avec une grande mixité sociale

Pour comprendre le fonctionnement de cet endroit, il faut parler avec Manu. Instituteur militant, il ne s’est jamais imaginé propriétaire : trop cher, trop lourd, pas pour lui. Mais voilà, il y a la magie du lieu, l’enthousiasme de ses amis Sylvie et Fred, et la possibilité de construire un projet d’habitat partagé compatible avec ses valeurs profondes et ses petits moyens. C’est lui qui a rédigé la charte qui doit permettre à tous les résidents de vivre en bonne harmonie.

« Il a fallu 18 mois de tractations entre la première visite et la conclusion de la vente. Il fallait constituer un collectif. Il y a eu du mouvement, des gens qui ont laissé tomber et d’autres qui sont arrivés. Un couple proche de la retraite a préféré se retirer à cause de l’accessibilité. Il nous fallait décider de la manière dont nous allions répartir les lots afin d’être le plus équitables possible. Nous sommes arrivés à un total de 14 lots avec des prix et des contraintes différentes. Mais nous ne voulions pas d’une simple copropriété. Il y a donc des communs.

Nous voulions un projet démocratique, ouvert, intergénérationnel, avec une grande mixité de classes sociales. Nous voulions surtout en profiter pour permettre à des personnes modestes d’accéder à la propriété. Toutes les décisions sont prises par consensus. Nous avons aussi intégré des propriétaires bailleurs en plus des propriétaires habitants pour améliorer encore la mixité sociale. »

 

- Comment répartissez-vous les décisions ?

« Il y a deux niveaux d’accès au projet : les 14 lots qui correspondent aux habitats privés et le collectif qui gère les communs. Au départ, nous voulions que les communs appartiennent à l’association du collectif. Mais le notaire nous a dissuadé de ce montage, compliqué et coûteux à gérer dans le temps. Donc, les lots sont intégrés dans une copropriété classique et les communs sont rattachés à la copropriété sur la base des tantièmes. Mais les communs sont aussi gérés par un collectif que nous allons transformer en association. Tous les propriétaires habitants doivent participer au collectif, mais c’est optionnel pour les propriétaires bailleurs et les locataires. Cela dit, à peu près tout le monde a choisi de participer au collectif. Dans le collectif, on part du principe que tout le monde est égal. Donc, nous avons aussi décidé que les enfants qui le souhaitent participent également au collectif. »

 

- Tu veux dire qu’un enfant a le pouvoir de bloquer le consensus sur l’usage des communs ?

« Oui, c’est l’idée. Jusqu’à présent, nous sommes toujours parvenus au consensus, même si cela nous prend pas mal de temps et n’est pas facile tous les jours. Appartenir au collectif permet de décider de l’usage des communs et d’y accéder. Nous comptons y installer un garage à vélos, un congélateur collectif et probablement une sorte de salle des fêtes commune. Appartenir au collectif signifie également participer aux corvées sur les communs, exactement comme aujourd’hui où nous sommes tous réunis pour élaguer et évacuer le figuier qui a poussé contre le mur de la salle commune, remplir les tranchées de la terrasse et surtout démonter l’escalier métallique du bloc. »

 

- Mais si vous n’arrivez pas au consensus, comment ça se passe ?

« Ce sont les règles standards de la copropriété qui prennent le relai, avec décision à la majorité (un lot = une voix). Mais jusqu’à présent, nous avons réussi à faire autrement. Cela vient peut-être du fait que nous n’avons pas le profil de propriétaires fonciers : nous sommes pratiquement tous des familles recomposées, c’est-à-dire des ménages monoparentaux majoritairement modestes, avec des enfants en gardes alternées, ce genre de choses. Aucun de nous ne pensait avoir les moyens d’accéder à la propriété un jour.

Nous avons chiffré les besoins en financement de la réfection des parties communes à 150 000 euros. Autrement dit, le ticket d’entrée pour chaque lot commençait à 10 000 €. Dans mon cas, pour mon duplex de 70 m² avec jardin sur la terrasse, j’ai payé 30 000 € en tout. Bien sûr, pour cette somme, on a surtout les murs. Mais après chacun finance l’aménagement intérieur à son rythme et selon ses moyens. J’espère aménager d’ici la fin de l’été ».

 

« Sans le collectif, 90 % d’entre nous n’auraient pas pu devenir propriétaires »

 

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Déblayer les gravats, ensemble
Le principe de la corvée est que tout le monde participe en fonction de ses possibilités, sans distinction de genre.
 

Même si le ciel se couvre, la petite communauté des corvées du jour continue de s’activer. Pour démonter l’escalier, c’est Loïc le charpentier qui fait profiter le groupe de son expertise. Il a acheté un lot de 127 m² de plain-pied dans le bloc, au niveau de la rue, pour 41 000 euros. Il s’agit d’une partie qui demande moins de travaux, d’anciens bureaux. Il ne sait pas encore s’il va louer ou habiter son lot. Il n’a pas envie d’abandonner son petit jardin, mais Sophie, sa compagne, préfère l’accès piéton au centre-ville et la perspective de voir son petit Achille grandir avec les autres enfants de la résidence :

 

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Huile de coude, grandeur nature
Démontage de l’escalier de service du bloc façade ouest : tout doit se faire à la force des bras.

 

« Ce que j’apprécie beaucoup ici, c’est le principe de solidarité : sans le collectif, il n’y aurait pas eu de projet. Comme toujours, au fur et à mesure des travaux, on a eu des mauvaises surprises, comme la cuve à fuel chez Manu, l’insuffisance d’étayage des poutres porteuses du loft de Stéphane, ou un mur porteur affaibli chez Frédérique. Nous avons débattu de chacun de ces problèmes et décidé de répartir la charge supplémentaire de travaux sur les communs plutôt que de planter un membre du collectif. Parce que sans cette idée de collectif, de mutualisation, 90 % d’entre nous n’auraient pas pu devenir propriétaires.

D’ailleurs, dans la charte, il est prévu qu’en cas de départ et de revente, nous nous engageons à ne pas revendre au prix du marché, mais de rester dans la démarche d’accessibilité aux foyers modestes. »

Valérie est comédienne et fait partie du groupe des fondateurs :

« Si l’idée d’investir cet endroit a été enthousiasmante dès le départ, très rapidement, on s’est mis à tourner en rond, entre les visites, les départs, les atermoiements. À moment donné, il a fallu réellement lancer le projet. Ça a commencé par le chiffrage, le fait d’évaluer le cout réel du projet, et d’arrêter un groupe pour le porter. C’est là que l’aide de professionnels comme Jean-Marc est décisive pour évaluer les possibilités concrètes que nous avions, le coût des travaux de viabilisation des communs, etc.

Ce projet implique avant tout de vivre les contraintes du collectif : les corvées – en fonction des disponibilités des uns et des autres – le fait de vivre ensemble, de fonctionner sur la base du consensus. Il nous a fallu un an de réunions et de débats pour arriver à concrétiser tout ça. »

 

« Nous avons bâti des murs, mais nous avons aussi percé des portes ! »

Jean-Marc est l’un des trois architectes du futur cabinet qui va s’installer dans la résidence. Il compte travailler ici, mais aussi y vivre et y installer son atelier bois. Pour ne pas créer de futures tensions, il a refusé de mener les chantiers chez ses futurs voisins. Mais il est maitre d’œuvre de la réfection des communs. Ce qui est bien pratique puisqu’il est agréé par les Bâtiments de France. Le quartier est classé historique.

 

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Un lieu incroyable
Les arcades côté est dominent la ville et leurs magnifiques éléments en pierre taillée qui vont être préservés par le collectif.

 

« C’est vraiment un lieu incroyable. Quand on l’a découvert, on s’est dit qu’il y avait un truc à faire, réinvestir le centre-ville, pour reconquérir les mobilités douces. C’était vertigineux. L’Agence nationale de l’habitat nous a tout de suite soutenus, ses aides à l’amélioration thermique vont financer 50 % des travaux des foyers les plus modestes. C’est la force du collectif : trouver des réponses ensemble.

Il nous a fallu 18 mois pour arriver à la signature. Cela aurait pu trainer encore un peu, mais des promoteurs ont commencé à présenter des projets concurrents et à faire pression sur le prix. Ce qui nous a sauvés, c’est que nous avons été capables de nous mettre d’accord pour présenter une offre ferme, alors que les promoteurs coinçaient sur la question de l’accessibilité. Les promoteurs doivent proposer une place de garage pour chaque lot vendu, ce qui, vu la configuration, est très difficile à mettre en œuvre. Certains avaient réfléchi à un ascenseur à voitures, creusé directement dans la roche, quelque chose qui récupère la voiture au niveau de la rue et la range automatique dans les sous-sols... Rien que cela, ça devait couler leurs budgets !

Le fait que nous cherchions à nous affranchir de la voiture et que nous ne sommes pas soumis à cette règlementation en tant que particuliers nous a particulièrement aidés. Nous nous sommes donc lancés, sans clause de résiliation. »

Un échange constant d’idées, de coups de main et de dialogue

 

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Un travail de sherpas
Chaque tronçon d’escalier doit être évacué à la main. Une caractéristique du terrain qui a fait fuir bien des entrepreneurs et qui nécessite une main-d’œuvre abondante et volontaire.

 

Frédérique est la voisine de Manu, et la dernière arrivée sur le projet en juillet 2014, juste avant la signature. Elle n’imaginait sans doute pas alors, que moins d’un an plus tard, elle serait embarquée dans des travaux de terrassement. Son père, Gérard, passe très régulièrement dans la résidence pour donner un coup de main. C’est en fait une sorte d’auberge espagnole de la construction, avec les amis et la famille qui participent aussi à l’aventure. C’est un échange constant d’idées, de coups de main et de dialogue.

« Je vis à Mauvezin (petit village à 30 km) et je travaille à Auch, avec Fred (le compagnon de Sylvie : il faut suivre, il y a au moins trois Fred embarqués dans cette aventure !). Je cherchais à me rapprocher pour arrêter tous ces trajets en voiture. Fred m’a parlé d’un studio à vendre dans le collectif, mais c’est un format qui ne convient plus à grand monde. Jean-Marc a fusionné le studio qui demandait trop de travaux avec son lot et du coup, je suis devenue voisine de Manu, dans un duplex. »

Aurélie ne s’est pas embarquée dans l’aventure pour ses implications politiques, mais bien pour son côté pratique :

« J’ai deux enfants avec Jean-Marc. Je n’adhère pas vraiment à tous ces trucs collectifs, les débats qui n’en finissent plus, le fait qu’il faille écouter le point de vue de chacun sur tout, mais depuis qu’on est passés aux choses concrètes, c’est nettement plus stimulant. J’ai toujours eu envie de m’investir dans un gros projet de « retape ». Là, il y avait le côté pratique pour les enfants qui pourront facilement aller de chez moi à chez leur père. Mais ce qui me plait vraiment, c’est qu’à présent nous faisons tout cela ensemble. Cela permet de surmonter la difficulté de l’entente au quotidien. En fait, j’adore ça ! »

Un ensemble de difficultés et de défis à surmonter ensemble

Manu a fini de boucher les tranchées de la terrasse, de déménager les fagots de figuier et surtout de transporter avec les autres les tronçons de l’escalier de service.

 

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La force du collectif
La disparité des moyens financier pour les parties privées attise un peu les jalousies et les récriminations, mais les conflits se résolvent mieux en mode participatif, comme lors de la pause repas commune pendant les corvées.

 

« L’un des grands défis du projet : le déblaiement de la terrasse. Il y avait des préfabriqués et une maison branlante collée au bloc que personne ne voulait habiter. Quand les bâtisseurs contactés ont vu que notre terrain était inaccessible aux engins, ils sont partis en courant. Finalement, on est tombé sur Gilles Duplan, un gars vraiment inventif et volontaire, dont on a fêté tous ensemble les 70 ans. Il a monté une sorte de passerelle qui partait de la cour des arcades, niveau rue et qui traversait toute la terrasse en surplomb. Dessus, il fait tourner des brouettes thermiques, ces sortes de mini-chenilles qui passent partout.

Avec ça, on a sorti 150 m³ de gravats de la terrasse avec nos bras. Comme des sherpas. On a rempli 80 bennes de chantier qui tournaient dans la rue. Sans l’ingéniosité de Gilles, rien n’était plus possible. On a tout fait entre septembre et décembre 2014. C’est ça l’histoire du collectif : un ensemble de difficultés et de défis que nous avons surmontés tous ensemble, en se serrant les coudes. »

La pluie menace franchement et l’activité ne faiblit pas. Car beaucoup d’entre eux s’apprêtent à investir les lieux définitivement dans les prochaines semaines. Sylvie et Fred sont dans les cartons, d’autres ont posé leurs préavis. Alors, il faut bien que ça avance. Mais les écueils sont toujours plus faciles à supporter à plusieurs, même si les tensions finissent toujours par survenir.

« En fait, il y a un seul truc sur lequel on n’a toujours pas réussi à se mettre d’accord ! »

Tout le monde sourit d’un air entendu.

C’est sur le nom que nous allons donner à cet endroit !

Agnès Maillard (texte et photos)

- Voir ce reportage en grand format.

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29 avril 2015 3 29 /04 /avril /2015 12:59

Info reçue par mail

 

le-village-du-possible

 
 

L'autonomie : ça se construit dès maintenant!

Des outils simples et accessibles existent pour que d'autres mondes soient possibles.

 

 

 

Jardin collectif auto-géré, habitat autonome en auto-construction, chauffe eau solaire simplifié (pour 60 euros), four à pain, pédagogie alternative, etc. Découvrez l'éco-lieu d'Alter'éco 30.

 

 

 

 

 

 

Je vous invite également à découvrir le site du Territoire en Transition Petite Camargue et sa page facebook (territoires en transition).

 

 
 

 

 

 

Merci de diffuser si vous le jugez bon et à très bientôt.
 
 
 
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27 avril 2015 1 27 /04 /avril /2015 15:05

 

Source : http://www.slate.fr

 

 

Je co-worke, tu co-voitures, elle co-robe: la journée-type d’un nouveau consommateur
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23 avril 2015 4 23 /04 /avril /2015 17:36
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22 avril 2015 3 22 /04 /avril /2015 15:28

 

Source : http://www.reporterre.net

 

En Catalogne, une colonie éco-industrielle invente une façon de vivre libérée du profit

22 avril 2015 / Emmanuel Daniel (Reporterre)
 


 

 

Construire un analyseur d’eau, des systèmes d’éclairage écolos, brasser de la bière ou créer un réseau de téléphone alternatif... Voilà à quoi s’affairent une vingtaine de Géo Trouvetou installés dans une usine délabrée transformée en communauté rurale libertaire et high-tech. Cette « colonie éco-industrielle post-capitaliste » invente des façons de vivre et de produire libérées de la logique du profit.

 

- Calafou (Espagne), reportage

Pour accéder au fond de la vallée, le véhicule doit naviguer entre les bosses d’un chemin de terre mal entretenu. A l’arrivée, on est acccueilli par une barrière levée et rouillée qui semble bloquée dans cette position depuis des décennies. Sur le muret d’enceinte, on peut lire en lettres vertes et noires sur fond blanc : « Calafou, colonie éco-industrielle post-capitaliste ».

De prime abord, le post-capitalisme n’a rien de séduisant. Des murs grisâtres défraîchis par le temps, des embrasures de portes sans portes, des carreaux brisés qui laissent passer le vent frais de février. Certains bâtiments donnent l’impression d’avoir été abandonnés avant même d’avoir été finis. Derrière l’un d’eux, une cheminée industrielle pointe encore son nez vers le ciel mais cela fait longtemps qu’aucune fumée n’en est sortie.

 

 

Adossée au bâtiment principal, une petite église investie par la végétation sert de débarras. Sans la présence de voitures et de caravanes, on pourrait penser que Calafou fait partie de la centaine de colonies industrielles désaffectées qui pourrissent près des rivières catalanes, vestige du passé industriel de la région.

Souveraineté technologique

« Au siècle dernier, plusieurs dizaines de familles vivaient ici et produisaient du papier, du textile ou plus récemment des plaques de métal », me raconte Pablo, un doctorant en biologie, en s’appuyant sur les souvenirs de l’ancien propriétaire et les quelques archives dénichées dans les sous-sols de Calafou. Abandonnée depuis l’incendie d’un des bâtiments au milieu des années 2000, cette friche industrielle située à 60km à l’ouest de Barcelone a été rachetée il y a quatre ans par une bande de néo-ruraux pas comme les autres.

Didac, un des initiateurs du projet explique qu’ici « l’objectif n’est pas tant d’arriver à l’autosuffisance alimentaire qu’à la souveraineté technologique ». Pour ce sociologue qui a vécu plus d’un an sur place, Calafou s’inscrit dans une logique de réappropriation de la technique et des outils qu’il refuse de laisser « entre les mains des entreprises capitalistes internationales ».

En quatre ans, de nombreux travaux ont été effectués. Mais malgré les efforts des habitants, les 28 000 m² de hangars offrent encore un paysage que Didac qualifie de « post-apocalyptique ». Et c’est précisément ce qui a attiré Maxigas, doctorant en production collaborative.

 

 

Installé devant un écran traversé par des lignes d’écriture verte qui semblent venir directement de la planète Mars, une tasse de maté fumante à la main, il m’explique les raisons de sa présence ici : « Vu que la société est une ruine, j’aurais l’impression de me mentir à moi-même si j’habitais dans un appartement propret aux finitions parfaites. J’aime les ruines et les univers chaotiques, ils m’ont l’air plus réels ».

 

Biologie, porno et bricolage

Ulyses, un trentenaire au sourire ineffaçable se charge de faire visiter les lieux aux cinq personnes arrivées ces derniers jours. On découvre que derrière ces mastodontes de béton se cache une Silicon Valley rurale et anti-capitaliste.

Le long d’un grand hangar à ciel ouvert, quelques portes donnent sur des ateliers abrités par la seule partie du toit épargnée par les flammes. Derrière l’une d’elles, on trouve un laboratoire de biologie où Pablo analyse notamment l’eau et la terre des environs qu’il soupçonne d’avoir été souillées par les rejets industriels des dernières décennies.

 

 

Sur la table et les étagères de ce minuscule local, quelques instruments d’analyse et de stérilisation traînent aux côtés d’un cendrier et d’une pile de bouquins. Mais faute de moyens, l’équipement du labo est minimaliste. Heureusement, ses utilisateurs ne manquent pas de créativité :

« On a construit notre propre incubateur avec un appareil photo, des lumières et du wifi. Grâce à ça, on peut voir les bactéries en train de se développer à distance », raconte-t-il avec fierté en ouvrant le vieux frigo dans lequel leur création est conservée.

Quelques portes plus loin, des inscriptions à la bombe nous indiquent l’entrée du Penchblenda, un « trans-hack feminism lab ». Dans ce cabinet des curiosités à peine plus grand qu’un studio d’étudiant, chaque centimètre carré est utilisé pour stocker une des inventions de Pin, une des taulières du lieu.

 

 

Cette autodidacte aux cheveux roses et rebelles nous fait visiter son antre avec un enthousiasme communicatif. A côté d’un détecteur gérant le remplissage d’une cuve à eau, d’une dynamo artisanale, d’un projet de LEDs, de piezo-électricité et d’un microscope fabriqué avec une caméra USB, elle nous montre des godemichés moulés sur place dans une matière caoutchouteuse innovante, des instruments de musique corporels, des outils pour faire soi-même son diagnostic gynécologique et des photos de « post-porn ».

Une cohabitation surprenante d’objets et de concepts qui répond pourtant d’une même volonté : reprendre la main aussi bien sur son corps que sur son environnement. Transformer et bidouiller tout ce qui a été standardisé et par le capitalisme et « l’hétéro-patriarcat ».

 

Pirates des temps modernes

A l’étage inférieur, je pénètre via une porte branlante dans un des lieux phares de la colonie : le Hackafou. Sous le regard rieur de Jolly Roger, le drapeau pirate qui flotte au milieu de la salle, des hackers s’affairent.

Pendant que la coque d’un analyseur d’eau sort couche par couche d’une imprimante 3D, un homme installe Linux sur un ordinateur pendant qu’un autre s’amuse à pirater mon appareil photo. C’est à ce moment que Pin surgit et repart avec sous le bras une pile de vieux ordinateurs portables qu’elle entend ressusciter.

Dans ce repère où cohabitent des petits génies, du matériel high-tech, un poêle à bois antédiluvien et des revendications politiques, plusieurs équipes ont travaillé sur le développement d’outils destinés aux mouvements sociaux comme un réseau social alternatif ou un réseau téléphonique gratuit et sécurisé.

 

 

Mais c’est le Bitcoin, une monnaie virtuelle cryptée, qui a apporté une renommée internationale à Calafou, au grand dam des habitants actuels. Amir Taaki, surnommé le « Guru du bitcoin » a séjourné plusieurs mois à la colonie avec son équipe, attirant des journalistes laissant entendre dans leurs articles que Calafou était le QG du Bitcoin.

Cette publicité indésirable ramène encore aujourd’hui des curieux du monde entier en quête d’informations sur cette la fameuse monnaie qui prend de l’ampleur hors de tout contrôle étatique. Sauf que les occupants acceptent difficilement d’être associés à cette monnaie « anarcho capitaliste » et ils sont nombreux à la colonie à garder un souvenir amer du Guru et de son équipe.

Peuplée de punks, de technophiles, de féministes radicales et de bricoleurs, Calafou n’a rien d’une communauté de hippies. « On ne ressemble pas aux communautés néo-rurales classiques qui font pousser des légumes. Moi je voulais vivre à la campagne et faire des choses liées à la science et à la technologie », raconte Pablo.

 

 

Dans cette atmosphère technophile fleurissent néanmoins des projets divers. Près du bâtiment principal, dans une salle carrelée, trois personnes surveillent un thermomètre plongé dans une cuve. De là sortira la Rosa de Foc (Rose de feu, surnom de Barcelone), la bière artisanale dont ils produisent 800 litres par mois.

Ulyses explique qu’à Calafou on trouve également un mini cirque, une fabrique de savon, un projet de numérisation de livres, un centre social, un jardin... La colonie compte aussi un énorme atelier équipé d’une dizaine de machines dédiées au travail du bois. Ces outils sont collectivisés et n’importe qui peut les utiliser gratuitement à condition de reverser une part à Calafou en cas de profit.

 

Une économie alternative

Certains projets comme le centre social ou le laboratoire de biologie sont dits collectifs et à ce titre bénéficient du soutien de la Colonie et de locaux gratuits. Les autres, comme la brasserie ou la fabrique de savon, sont dits autonomes. Ceux-ci louent l’espace utilisé à raison d’1€ par mois et par m² et doivent reverser une partie de leurs bénéfices à la communauté.

Généralement, les projets autonomes versent 1/3 des recettes à ceux qui y participent, 1/3 pour consolider le projet et 1/3 pour la colonie. Pour le moment l’équilibre financier est fragile et la Colonie a bouclé l’année dernière avec difficulté. « Mais ça va mieux. Cette année, on va mettre le paquet », assure Pablo.

Et puis, en cas de problème, ils ne sont pas seuls. Calafou est un des projets autonomes de la Coopérative intégrale catalane (CIC), un mastodonte de l’alternative doté d’un budget d’un demi million d’euros issu de « l’insoumission fiscale », en clair, de l’évasion fiscale à des fins sociales. Avec cet argent, ils développent des outils juridiques, techniques et économiques afin de faciliter la construction d’alternatives dans le domaine de la santé, de l’éducation ou encore du logement. On trouve à Calafou un bon exemple de ce que permettent les outils crées par la commission logement de la CIC.

Au fond du terrain, caché entre un flanc de montagne et l’énorme hangar au toit carbonisé, se trouve la coopérative de logement social, une des sources principales de rentrées d’argent de Calafou. Le bâtiment compte 27 appartements et près d’une vingtaine sont pour l’instant occupés. Les habitants peuvent payer un loyer de 175 € à la coopérative ou acheter le droit d’usage de l’appartement pour 16 800 €.

 

 

C’est ce qu’a choisi de faire Karioka. Il peut en jouir à vie et récupérer sa mise en cas de départ, mais les murs continuent d’appartenir à la coopérative. Il ne peut donc pas revendre son logement. « L’avantage du droit d’usage est qu’on ne peut pas spéculer sur l’immobilier », explique ce grand gaillard avec sa voix puissante et un cheveu sur la langue.

C’est notamment cet argent qui a permis d’acheter la colonie vendue 400 000€ par son propriétaire. Près de la moitié a déjà été remboursée et ils entendent se libérer de la dette en moins de dix ans. Les habitants qui ne peuvent ou ne veulent pas payer pour un appartement personnel résident dans la « maison rouge », bâtiment en brique composé de dortoirs où logent également les invités.

 

Vers le post-capitalisme

En cette fin février, la colonie ne déborde pas d’activité et on se demande si les vingt-cinq personnes qui y vivent actuellement ne sont pas entrées en hibernation. Rox explique que le climat n’y est pas pour rien. « L’hiver a été très froid et sans la structure pour affronter ce froid, c’est dur d’être productif. En été, quand on peut faire des choses sans avoir cinq épaisseurs de vêtements sur soi, ça change la donne », raconte cette Italienne dont les mèches bleues dépassent de ses deux capuches.

Mais ce n’est pas la seule raison. « Beaucoup d’activités ici ne sont pas visibles. Le lieu est très grand donc personne ne te voit travailler », continue-t-elle. En effet, chaque jour passé sur place, j’ai découvert au moins une nouvelle pièce dans ce dédale industriel...

 

*Suite de l'article sur reporterre

 

 

Source : http://www.reporterre.net

 

 

 

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22 avril 2015 3 22 /04 /avril /2015 15:00

 

Source : http://rue89.nouvelobs.com

 

 

Pour l’Afrique et ailleurs 22/04/2015 à 13h18
Des ordis dans des bidons
Claire Richard | Journaliste Rue89

 

 
 

Récupération et coûts minimum : le mouvement des Jerrys diffuse un accès facilité à l’informatique avec des composants d’ordinateur et des logiciels libres dans des jerrycans et autres matériaux simples.

 

Un jerry ouvert (Jerry-DIT)

Installer un ordi dans un bidon, une calebasse ou une mappemonde ? Oui, c’est possible. Un peu partout dans le monde, la communauté des « Jerrys » s’affaire à organiser des ateliers pour fabriquer des ordis de récup’. L’idée : lutter contre la fracture numérique et se réapproprier de façon ludique la technologie.

 

Un ordi dans un bidon

Les Jerrys sont nés en 2011, à l’Ecole nationale supérieure de création industrielle (l’ENSCI), d’une collaboration entre des étudiants et l’entreprise Hedera, qui voulait fabriquer des serveurs à bas prix pour les pays en voie de développement. Justine Hannequin, membre de Jerry Paris, raconte :

« En faisant des études de terrain en Afrique, ils s’étaient rendu compte que ces populations n’avaient pas accès aux technologies à cause des coûts d’acheminement. A cette époque, il n’existait pas d’usine de production de serveur ou d’ordinateur en Afrique. Les coûts étaient donc exorbitants : au coût des composants s’ajoutait le transport de la matière des carcasses qui les entourent. »

Pour que l’hébergement des composants informatiques coûte moins cher et que le coût des infrastructures diminue, trois étudiants proposent d’utiliser un bidon. Car les bidons sont très courants en Afrique et ailleurs, très résistants mais aussi faciles à découper et à modifier. L’idée s’impose et les étudiants créent une association pour diffuser cette idée simple : installer les composants d’un ordinateur dans un bidon.

Du « Do It Yourself » au « Do It Together »

Jerry est d’abord un projet « Do It Yourself » (faites-le vous-mêmes) : on est censé lire la méthodologie et les tutoriels, et le faire soi-même.

 

 

Mais rapidement, le projet prend de l’ampleur. En 2012, des étudiants algériens contactent les membres de Jerry Paris, pour qu’ils les aident à installer des jerrys dans leur fac.

« On y a passé un mois et on les a aidés à organiser deux semaines d’ateliers. C’est ça qui a marqué le tournant vers le Do It Together, l’idée de faire à plusieurs. Là-bas, on a compris que c’était une composante essentielle du projet. »

Jerry s’étoffe et devient une communauté, avec un projet social et pédagogique. Les jerrys se fabriquent en « workshop », à plusieurs. A chaque fois, c’est l’usage qui prime sur la méthode : le groupe commence par se demander à quoi servira le jerry avant de le construire.

« De là, on sait qu’on va avoir besoin d’un disque dur qui fasse minimum telle taille, une carte-mère qui ait un minimum de telle ou telle puissance... L’idée ce n’est pas de générer de nouveaux déchets, mais de les confier à des organismes capables de les retraiter. »

Car Jerry est aussi un outil de recyclage, face au problème grandissant des déchets électroniques en Afrique.

Leçon de choses

Concrètement, comment ça marche ? Pour nous l’expliquer, Justine Hannequin nous a amené un jerry, installé dans un bidon bleu. Elle l’a ouvert pour nous donner une petite leçon de choses sur le fonctionnement des ordinateurs.

En sortant un à un les composants du bidon, elle explique :

 

Justine et son « jerry bleu » (Claire Richard)

 

« Il faut toujours trois composants : la carte mère, qui fait les calculs, le disque dur, qui fait office de mémoire, qui va stocker les données, et l’alimentation, qui fournira en électricité les autres composants.
Ça c’est la base. »

 

On branche la carte mère... (Claire Richard)

 

« Il te faut aussi un système, qui consiste en une sorte de livre de recettes pour l’ordinateur, si tu veux. Puis tu connectes les composants les uns aux autres, tu les alimentes en électricité, et tu installes ensuite le système, que tu mets sur une clef USB ou un disque.

Après, on peut avoir besoin de cartes graphiques puissantes, si on veut installer des logiciels 3D ou jouer à des jeux vidéo, ou d’une carte son, si tu veux faire de la musique. Et donc tu as des périphériques qui viennent se rajouter.

Si tu veux faire du réseau, si tu veux que ton jerry serve de serveur wifi local, par exemple, il te faut une carte réseau. »

Et voilà : un petit ordinateur qui fonctionne, pour un coût proche de zéro.

 

On range tout et on referme le bidon (Claire Richard)

Est-ce pour autant facile à faire dans sa cuisine ? Les membres de la communauté Jerry ont beaucoup travaillé pour mettre en ligne beaucoup de ressources : un manuel (PDF), un wiki et des tutoriels vidéo. Mais, reconnaît Justine, pour la plupart des gens, cela ne suffit pas. D’où le modèle du Do It Together.

Concrètement, à quoi servent les jerrys ?

Le plus fou c’est que ça marche. Les jerrys sont particulièrement utiles dans les zones où l’accès à Internet est lent ou inexistant, et l’accès à la technologie coûteux. Ils s’adaptent à chaque cas.

Le site Adopt A Jerry présente une galerie de jerrys, venus de France et d’Afrique :

 

Jerry Junior, Tchad

 

Ce jerry héberge le service OpenStreetMap, pour servir à la cartographie libre, au Tchad.

 

Jerry Marathon, Côte d’Ivoire

 

Ce jerry héberge un serveur d’envoi de SMS pour des étudiants d’Abidjan, qui leur envoie régulièrement des informations comme les dates de rentrées, les horaires de leurs cours et quand leurs bulletins sont disponibles.

 

Jerry dans une calebasse, Burkina Faso

 

Ce jerry installé dans une calebasse, premier du genre, a servi à cartographier le réseau de bus de Ouagadougou en hébergeant le service OpenStreetMap.

Bref le jerry est flexible et s’adapte aux besoins et aux circonstances.

Ainsi, en Côte d’Ivoire, le clan Jerry a commencé par une idée potache : proposer un service d’envoi de SMS romantiques aux amants en mal d’inspiration, ou envoyer les scores des matchs de foot pendant la Coupe du monde. Mais ils ont ensuite développé un service pour les femmes enceintes en zones rurales : le système envoie des SMS de conseils et de recommandations – utiles pour des femmes qui habitent souvent très loin d’hôpitaux et ont souvent du mal à faire un suivi médical optimal.

A Saint-Etienne

Mais pas besoin d’aller en Afrique pour trouver des zones mal connectées. La fracture numérique existe aussi en France. Plusieurs projets Jerrys ont été menés avec des écoles ou des centres sociaux en France. Simon Jacquemin a ainsi fabriqué en 2013 un Jerry avec des jeunes de Saint-Etienne.

« Certaines salles d’écoles ou de centre sociaux ne possèdent pas d’ordinateur ou/et de connexion internet. Nous avons voulu installer sur l’ordinateur Emmabuntüs, un système d’exploitation libre développé par une association affiliée à Emmaüs.

Ce système propose des logiciels éducatifs et une suite Office pour travailler. Le gros plus que nous avons ajouté à ce Jerry, c’est une version de Wikipédia accessible en hors ligne pour aider aux recherches dans le cadre des devoirs.

Pour faire ceci nous avons téléchargé, absorbé l’ensemble du contenu textuel de Wikipédia (près de 20 gigaoctets de données) pour le mettre sur le disque dur du jerry. Avec un logiciel comme Kiwix il était ainsi possible de faire une recherche sur ce Wikipédia Hors ligne. »

Ici encore, l’enjeu est pédagogique : il s’agit de sensibiliser aux enjeux du logiciel libre. Justine Hannequin :

« C’est aussi une façon d’expliquer comment fonctionne Internet - parce que la plupart du temps, on en reste à un côté un peu magique. Quand on voit qu’on peut accéder à Wikipédia même sans Internet, on comprend qu’Internet c’est une série d’ordinateurs connectés les uns aux autres, qui rendent leur contenu accessible. »

D’autres valeurs pour la technologie

L’intérêt du jerry est donc aussi de nous faire penser autrement notre rapport aux technologies et à la technique. Jerry s’est ainsi doté d’un manifeste, très ancré dans la tradition du mouvement du « faire » et des makers. On y lit ainsi la déclaration suivante :

« La technologie est un outil. Nous préférons créer et maîtriser nos outils plutôt que leur être soumis. Les ordinateurs peuvent stocker, traiter, recevoir et transmettre de l’information. Nous exploitons ces capacités selon nos besoins et nos désirs, pour communiquer et trouver des solutions créatives à des problèmes. »

Bien sûr, il est très difficile de comprendre entièrement le fonctionnement d’une machine. Car aux mystères du « hardware » s’ajoutent les opacités du « software », des logiciels et algorithmes de plus en plus complexes.

« Il y a une espèce de surenchère des techniques fermées qui fait qu’on perd de plus en plus d’autonomie. On exécute, mais on n’est pas dans la réflexion de : comment je vais faire ? Pourquoi je fais comme ça et pas comme ça ? »

De bidons en calebasses, Jerry propose un premier pas vers une réappropriation de la technologie. Et pointe, de façon critique, l’importance de penser à l’impact de l’informatique sur l’environnement.

 

Source : http://rue89.nouvelobs.com

 

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21 avril 2015 2 21 /04 /avril /2015 17:29

 

 

Source : http://www.bastamag.net

Bien commun

Troc de graines : des espaces autogérés pour faire vivre les semences libres

par 21 avril 2015

 

 

 

 

 75 % du marché mondial de semences est contrôlé par dix multinationales. Face à cette mainmise sur le premier maillon de la chaine alimentaire, des citoyens organisent des trocs de graines et de plants partout en France. Dans ces espaces autogérés, les jardiniers amateurs échangent semences et conseils afin de contribuer à préserver la biodiversité cultivée. Une biodiversité libre de tout droit de propriété intellectuelle. Reportage sur un troc de graines, à Pélussin, dans la Loire

« Il y a une fortune sur cette table ! », s’enthousiasme une jeune femme. Plants de persil géant d’Italie, origan, mélisse pour tisanes et sirops, consoude pour de futurs purins... A quelques pas de ces plantes aromatiques et médicinales, d’autres tables regorgent de semences de fleurs et de potagères (fruits et légumes). « Ici, c’est un lieu où l’on troque », explique Marie-Claude Courbon qui accueille cet échange dans la cour de sa maison, près de Pélussin (Loire). « Le principe : échanger des graines et des plants que l’on a en trop dans son jardin. Cela permet de découvrir gratuitement de nouvelles variétés, auxquelles on n’aurait jamais pensé ! »

Sur le modèle des « zones de gratuité » (voir notre article), chacun amène ce qu’il veut et prend ce qu’il souhaite. « On a fait des petites graines, on les met où ? », interroge Christelle, accompagnée de ses deux petites filles. Dans son panier, des graines de courges, de lin et des œillets d’inde. Elle repartira un peu plus tard avec des plants de framboisiers. « Je suis content car j’ai donné quelque chose cette année », lâche un généreux donateur, qui participe pour la deuxième fois. « Le troc de graines, c’est un truc génial, j’adore ça !, renchérit Brigitte. L’échange est formidable. Ces semences et ces plants, ce sont des cadeaux de la nature. Nous sommes juste là pour en refaire cadeau à d’autres. »

 

Réapprendre les savoirs et savoirs-faire

Sur les tables, les graines sont stockés dans toutes sortes de récipients : boites de bonbons « Tic-tac » ou de pellicules photos, bocaux de confitures, enveloppes miniatures faites main... Ici, on recycle, et on échange conseils et idées de bouquins. Des discussions sur les dates de semis, sur la manière dont on peut multiplier ses graines, ou sur les petits soucis rencontrés avec les rongeurs. « Quelqu’un sait quelle plante peut repousser les rats taupiers ? », demande une voix. La réponse fuse à l’autre bout de la cour : « Oui, le tourteau de ricin ». « Attention, c’est toxique pour les chats et les chiens », prévient une dame. « C’est pour cela qu’il faut enterrer le tourteau », entonne un voisin.

 

 

« Les trocs de graines sont des moments précieux pour apprendre les savoirs et savoirs-faire des jardiniers et agriculteurs qui produisaient quasiment tous leurs semences », explique Marie-Claude. Un constat partagé par Raphaëlle, convertie au jardinage depuis peu de temps. « Il faut discuter avec les autres de ses expériences et de ses déconvenues, pour trouver comment l’on veut faire du jardin. Personnellement, je veux un jardin qui vit mais qui ne nécessite pas un entretien important. Alors j’apprends, d’une rencontre à l’autre. »

 

Lutter contre l’effondrement de la biodiversité

Adhérente de la maison des semences de la Loire, lancée en 2012, Marie-Claude veut contribuer à défendre la biodiversité en la cultivant et en l’échangeant. Elle dénonce un cadre législatif qui confisque les droits d’échanger ou de donner des graines et des plantes, pourtant conservées dans les champs et les jardins depuis des centaines d’années (lire notre dossier Main basse sur les semences). « La biodiversité est en train de s’effondrer : les grands semenciers s’intéressent à des variétés issues d’une base génétique de plus en plus étroite. Or, les graines que nous échangeons et ressemons se modifient légèrement d’une année à l’autre, c’est très précieux. Et quelle joie de voir le résultat quand ça marche ! »

 

 

Grâce à ces échanges de graines, qui se multiplient partout dans l’Hexagone, les citoyens évitent d’acheter des semences hybrides non reproductibles vendues par l’agro-industrie. « Il faut se réapproprier la nourriture que l’on mange et le jardin floral pour éviter de se faire bouffer par les grands semenciers », appuie Bernard. Depuis deux ans, cet apiculteur à la retraite collectionne les sauges. « Il existe au moins 800 variétés de sauges et je n’en ai que 40 ! », explique ce passionné, prêt à en donner pour assurer leur reproduction dans de multiples lieux. Trois ans après sa création, la maison de la semence de la Loire a multiplié ses activités : dans les fermes, les jardins, les associations... Ce qui fait la richesse de cette « maison », c’est le réseau qui la fait vivre. « Ici, c’est un tout petit bout de la maison de la semence, se réjouit Marie-Claude, elle est un peu répartie partout ». Et elle ne demande qu’à essaimer.

 

Texte et photos : Sophie Chapelle
@Sophie_Chapelle sur twitter

 


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17 avril 2015 5 17 /04 /avril /2015 21:45
 
 
 
 
à 14:00 - 23:00
 
 

3622 chemin de la cigale, 30900 Nîmes

 
 
Bonjour tout le monde, une date est enfin posée :-) Comme les dossiers pour avoir l'autorisation de la mairie sont traités après 3 mois, on a décidé de faire une gratiféria chez moi, dans les hauts de Nîmes. Pour ceux qui ne connaissent pas c'est une sorte de marché aux puces mais le principe c'est le don. Vous pouvez venir avec les trucs dont vous ne voulez plus, ou pas, et prendre ce qui vous plait des autres. Vêtements, objets, meubles, jouets, livres... tout est bienvenu!
Le soir, on prévoira un concert, ou des concerts, à voir avec les artistes, on vous tiendra au courant, et on fera un BBQ, donc amenez de quoi boire et manger, ce que vous voulez!
 
 
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13 avril 2015 1 13 /04 /avril /2015 17:03

 

Source : http://www.bastamag.net

 

Artisanat

« Un métier n’est pas là pour vous emprisonner mais pour vous rendre libre »

par

 

 

 

 

Daniel Testard est un boulanger atypique. Il ne travaille que deux jours par semaine pour pouvoir s’occuper de son jardin, pratiquer le chant et la musique, écrire et s’exercer à la méditation. Il ne vend pas lui-même son pain : il fait confiance à ses clients qui paient directement leurs achats, dans une corbeille. Il récupère l’eau de pluie, qu’il filtre et incorpore aux farines de blé anciens, biologiques, qu’il se procure illégalement. « J’ai toujours résisté à l’idée que soit on augmente son chiffre d’affaires, soit on disparaît. » Une pratique construite depuis 30 ans, à Quily, dans le Morbihan, qui vise à bâtir une vie harmonieuse où le travail n’aliène pas mais rend libre.

Un petit livret à la couverture orange, une impression ancienne, un objet que l’on a envie de garder précieusement. Il l’a écrit il y a quelques années, après avoir réinventé son métier. Parce que la formule vaut le coup d’être dupliquée, il voulait la partager... Avec son idée, il est possible de retrouver des commerces dans les villages, de la vie dans les campagnes. Des artisans qui sont heureux et qui ne manquent de rien.

À la base, il y a beaucoup d’envies : être proche de sa famille, produire sa nourriture, avoir du temps pour soi, écrire, avoir deux mois de congé l’été pour partir. La solution, il l’a inventée à partir de ces idées-là. Et au final, cela correspondait bien à son métier passion, à son métier d’origine, la boulange. Deux jours de pain dans la semaine, parce qu’il aime faire naître la vie dans la pâte, il aime son monastère panaire, ermite dans la nuit à converser avec les étoiles. Il participe ainsi à la vie du pays dans lequel il vit, 700 pains pour nourrir 150 familles, peut-être 300 à 500 consommateurs.

 

 

Et comme il ne pouvait pas vendre son pain en même temps qu’il le faisait, Daniel a choisi de ne pas le vendre lui-même. Il a ouvert son fournil à ses clients, qui viennent chercher leur pain quand ils le souhaitent et qui payent directement dans la caisse. « L’avantage du système, c’est que personne n’est prisonnier de l’autre. Les gens peuvent venir quand ils veulent, même la nuit, même le lendemain, et moi, je peux être là ou pas là. » Comme il faut autant de temps pour vendre son pain qu’il n’en faut pour le fabriquer, il gagne ainsi deux jours par semaine de liberté.

Et cela dure depuis 30 ans...

Pour voir la suite du reportage (photos, sons, vidéos).


Reportage réalisé par le site SideWays, web-série documentaire présentant des initiatives solidaires, positives et originales, qui sont « des idées pionnières ou bien des remèdes au système actuel, dans lequel de moins en moins de personnes se retrouvent », expliquent les initiateurs du projet, Hélène Legay et Benoit Cassegrain de l’association Contre-courant. Chaque épisode se décline sous un même format : une vidéo de 5 min, un article multimédia et un espace de discussion avec les protagonistes et les auteurs.

Pour en savoir plus : le site de SideWays.

 

 

Source : http://www.bastamag.net

 

 

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7 avril 2015 2 07 /04 /avril /2015 17:35

 

Source : http://rue89.nouvelobs.com

 

 

Sur le terrain 07/04/2015 à 12h05
Le compost magique de Jean Pain, vieille invention française (presque) oubliée
Thibaut Schepman | Journaliste Rue89
 
 

Trente ans après sa mort, le Français Jean Pain fait des émules jusqu’en Amérique du Nord. Sa méthode de chauffage par compost, décrite dans une mystérieuse vidéo YouTube, fait aussi son retour dans le Sud.

Des tomates qui poussent par -35°C, en janvier, le tout sans « un sou d’électricité ». La prouesse a fait grand bruit au Canada. Fin mars, l’agronome Vincent Leblanc a enfin expliqué au Journal de Montréal comment il a procédé :

« J’ai récupéré du fumier d’une écurie du coin et j’ai ajouté des copeaux de bois pour avoir un bon compost. La chaleur créée par les bactéries du compost est récupérée par un système de tuyauterie qui chauffe l’eau de mes bassins [qui sont placés dans une serre, ndlr]. Les racines de mes plantes trempent dans l’eau chaude. »

Sur sa page Facebook, l’homme dit s’inspirer d’un système en vogue ces derniers mois en Amérique du Nord, appelé « méthode Jean Pain ». Déjà, en 2013, une vidéo très remarquée – tournée chez le célèbre fermier du Vermont Ben Falk par Possible, un média alternatif canadien –montrait une serre chauffée de la même manière. mo

 

 

Un film sur Jean Pain publié sur Youtube en 2008

 

Une 2CV qui roule au compost

J’ai demandé à Ben Falk d’où il avait tiré cette idée géniale. Il m’a répondu par e-mail ces trois mots, comme une évidence : « Online on YouTube [une vidéo postée sur YouTube ndlr]. » Grâce à Olivier Asselin, fondateur de Possible, j’apprends que l’homme qui a installé ce système chez Ben Falk (mais aussi par exemple dans l’université de Burlington, dans le Vermont), s’appelle Gaelan Brown.

En interrogeant ce dernier, je découvre que le récent attrait pour la méthode Jean Pain est décidément une histoire de vidéos. Gaelan Brown a en effet commencé à s’y intéresser il y a sept ans... en découvrant les images ci-dessous.

 

Un film sur Jean Pain publié sur Youtube en 2008 Allemand sous-titré anglais

 

 

Dans ce film de très mauvaise qualité, d’origine inconnue et en langue allemande, on voit Jean Pain former un grand tas de broussailles broyées qui a au moins trois utilités :

  • il donne en quelques mois un très bon compost qui permet de cultiver de grandes quantités de légumes ;
  • la chaleur du tas de compost permet de chauffer sa maison pendant dix-huit mois ;
  • le tas de compost produit du méthane qui permet d’alimenter la 2CV, dans laquelle roule Jean Pain au début de la vidéo.

C’est donc l’invention d’un Français, datant des années 70, qui passionne aujourd’hui les maraîchers d’Amérique du Nord.

 

« Toutes des héritières de Jean Pain »

Jean Pain (Vincent Gobbe)

 

Comment expliquer la diffusion lointaine et tardive de la méthode Jean Pain, plus de trente ans après sa mort ? Vincent Gobbe – qui a travaillé avec Jean Pain à la fin des années 70 et a cofondé en Belgique un comité dédié à la préservation de cette technique – m’a aidé à reconstituer cette folle histoire :

« Jean Pain vivait en Provence, sur un terrain de 250 hectares dont il avait le gardiennage, dans une région où des incendies provoquaient régulièrement des drames. A la fin des années 60, il a commencé à débroussailler son terrain pour éviter les feux.

 

Des tomates dans le jardin expérimental de Jean Pain (Etienne Bonvallet)

 

Il a trempé les broussailles dans une mare et les a broyées pour les composter. Il s’est rendu compte à ce moment-là que ça donnait un très bon compost, il a réussi à y cultiver des plants de tomates de 3 m de haut sans aucun arrosage.

Au début des années 70, un marchand de vin qui s’appelait Armand Ell est tombé par hasard sur Jean Pain. Il a vu que sa méthode de production de compost était formidable, et il a reproduit la même chose à Bruxelles, dans le parc de Schaerbeek. Il a commencé par y planter de la vigne et des tomates et il a lui aussi eu des résultats impressionnants.

 

Les pommes de terre de Jean Pain (Etienne Bonvallet)

 

Frederik Vanden Brande, un Belge qui présidait une association d’agriculture biologique, a vu ça en 1974. Il a décidé d’aller rencontrer Jean Pain et de reproduire le concept à Londerzeel, dans le Brabant Flamand, où il a couvert de compost un terrain de 80 ares, c’est qui est énorme. Il a ensuite créé le comité Jean-Pain en Belgique 1978, à la demande de Jean Pain. Mais Jean Pain est mort trois ans plus tard et le comité est toujours resté un peu dans l’anonymat du grand public.

 

L’installation de Jean Pain (Etienne Bonvallet)

 

Par contre, juste avant la mort de Jean Pain, le Reader’s Digest a publié un article en seize langues qui a fait connaître la technique partout dans le monde. On a reçu à ce moment-là 25 000 lettres de gens intéressés. Encore aujourd’hui, on entend parfois parler de gens qui s’en servent pour le chauffage. On a un exemple comme ça en Hongrie je crois, mais c’est surtout pour le compost que le travail de Jean Pain perdure. On peut dire que les plateformes de compostage de déchets verts d’aujourd’hui sont toutes des héritières de Jean Pain. »

 

L’installation de Jean Pain (Etienne Bonvallet)

 

Pas possible pour un particulier ?

Le neveu de Jean Pain, Etienne Bonvallet, a poursuivi l’œuvre de son oncle et dirige aujourd’hui une entreprise qui commercialise des broyeurs à végétaux. Il confirme qu’un large pan des découvertes de Jean Pain est tombé dans l’oubli après sa mort :

« La méthode Jean Pain a eu une audience planétaire pendant le choc pétrolier, parce qu’il parlait un peu d’énergie. Mais le cœur de son concept, c’est le compost, qui apporte au sol une matière vivante, fraîche et très fertile. Il a vendu au moins 100 000 livres un peu partout dans le monde et il a été fait Chevalier du mérite agricole pour cette découverte. Beaucoup de jardiniers se servent de sa méthode aujourd’hui mais on n’a bien sûr aucun décompte, aucun suivi.

Par contre, l’utilisation du tas de compost pour le chauffage est très marginale. Il faut des quantités de matière énorme, on estime qu’il faut un volume de broussailles égal au volume de la maison à chauffer. Ça ne me paraît pas vraiment possible pour un particulier. »

Et pourtant. Sur les pages Facebook dédiées à la permaculture, nombre de Géo Trouvetou français disent depuis quelques semaines vouloir imiter les succès enregistrés au Canada. Dans cette micro-communauté, un post de blog publié à la fin du mois de mars a fait l’effet d’une bombe. Il commençait par ces mots :

« Grosse émotion....

Cet après-midi, j’ai branché deux mois de travail acharné, plus de 200 heures de travail, des années d’études et d’insomnies.

J’ai rempli le circuit d’eau froide... Moins de dix minutes plus tard, je fixe en hâte le bulbe du thermomètre sur le collecteur de sortie. Et là, le miracle de la nature. »

 

L’installation de Pierre1911 (Thibaut Schepman/Rue89)

 

Trente ans après la mort de Jean Pain, la technique de chauffage par tas de compost venait de faire son retour en France, en partie grâce au travail de quelques Belges et Canadiens opiniâtres.

Je suis allé à la rencontre de ce blogueur anonyme, qui répond au pseudo de Pierre1911 et vit à 20 km d’une grande ville du Sud de la France.

 

L’installation de Pierre 1911 (Thibaut Schepman/Rue89)

 

Renversé par une voiture alors qu’il roulait à vélo il y a quelques mois, cet écologiste a dû cesser son travail et une bonne partie de ses actions militantes. Ses réflexions sont maintenant entièrement consacrées à son domicile.

Avec ses poules, son élevage de lombrics et maintenant son réacteur Jean Pain, sa maison est un petit laboratoire d’écologie pratique à tendance survivaliste :

« J’ai longtemps pensé à l’échelle macro, je luttais pour des changements en France et en Europe ; maintenant, je suis passé au local et même au niveau pico. Je n’ai plus envie de convaincre, j’ai envie de faire des choses qui marchent et qui soient reproductibles. Surtout, je vois toutes ces avancées comme des boîtes qui doivent êtres connectées. A quoi ça sert d’avoir des toilettes sèches si on ne sait pas quoi faire du résidu ? »

Quand Pierre1911 raconte l’écosystème dans lequel il vit, il me fait penser à la narration en « poupées russes » du court-métrage culte « L’Ile aux fleurs » :

  • les déchets alimentaires de Pierre et sa famille nourrissent des lombrics ;
  • les poules mangent des vers de farine, les déchets de Pierre et sa famille et elles mangent aussi les lombrics qui mangent les déchets de Pierre et sa famille ;
  • la famille de Pierre mange les œufs des poules qui mangent des lombrics qui mangent les déchets de… (on s’arrête là) ;
  • les déchets des poules et le produit des lombrics servent de compost qui aide à produire des légumes.
  •  

 

Bientôt s’ajoutera une nouvelle brique à cet écosystème. Les déchets des poules, le compost produit par les lombrics et les excréments familiaux pourront chauffer la maison. A condition d’y consacrer des dizaines d’heure de travail et d’y ajouter des dizaines de mètres cube de déchets végétaux. La compagne de Pierre1911 me l’a dit :

« Il est fou, c’est un bourreau de travail. »

Pierre – qui répond aux e-mails dès 5 heures du matin et est venu me chercher à vélo malgré ses problèmes de santé et l’énorme dénivelé – confirme :

« J’ai quasiment tout fait tout seul et à la main. J’ai fait plus de 500 allers-retours à vélo pour remonter le broyat de bois. J’ai rempli plus de 200 sacs de pommes de terre avec ce broyat, à raison de cinq sacs par heure. C’est inhumain. Mais ça m’a aussi beaucoup rapproché des gens du coin. Ici, tout le monde a un rapport avec la nature, il y a une vraie communauté. Quand un voisin a perdu sa maison dans un incendie, quelques jours plus tard, on était 200 à lancer un chantier participatif.

J’ai donné pas mal de coups de main autour de moi et j’ai aussi beaucoup reçu, un paysagiste me donne son broyat de végétaux et moi, je lui donnerai du compost ; un voisin me donne des cours de jardinage tous les samedis matin. Au début, les gens se sont demandés ce que je faisais, ils m’ont pris pour un fou. Aujourd’hui, ils viennent me voir et certains me disent : “Si ça marche ton truc je vais faire pareil.” »

 

L’installation de Pierre1911 (Thibaut Schepman/Rue89)

 

De même, Pierre voit aussi son blog – qui regorge de tutoriels d’une qualité rare – comme une partie d’une communauté :

« On aspire à revenir à certaines valeurs, au local et à certains savoir-faire. Mais on veut vivre dans la société, avec notre époque. Je suis un passionné de forums assez techniques, comme le forum Vélotaf par exemple. Je trouve que le blog est un outil incroyable et ça m’a paru normal de partager mon travail, de raconter mes erreurs.

C’est comme ça que j’ai pu recevoir l’aide du réseau Apper, qui m’a aidé à comprendre comment connecter mon installation à mon chauffage existant. Grâce à ce blog, j’ai aussi reçu l’aide financière d’un mécène, ça va me permettre de mettre tout un tas de capteurs dans mon réacteur et de produire des données. Tout ça forme un réseau qui va me permettre d’améliorer les techniques et, j’espère, les rendre reproductibles. »

J’avais failli oublier de demander à Pierre comment il a découvert Jean Pain :

« Je faisais des recherches sur Internet, et je suis tombé sur une vidéo qui m’a passionné, alors que c’était en allemand et que je ne parle pas allemand. Je m’en souviens bien ; au tout début, on voit Jean Pain qui arrive en 2CV, tu vois laquelle c’est ? »

Sur le web : Data animé - A qui profite la déforestation ?

 

 

Source : http://rue89.nouvelobs.com

 

 

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