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13 février 2013 3 13 /02 /février /2013 15:19

 

 

 

Nguyen Van Hay, 60 ans, avait choisi un pseudo plutôt bon enfant : Dieu Cay, "la pipe à eau du paysan". Son blog, l'un des plus connus au Vietnam, exposait la corruption du gouvernement, et appelait à plus de liberté d'expression.

Incarcéré depuis 2008, Dieu Cay a été condamné, fin 2012, à 12 ans de prison, suivis de 5 années d’assignation à résidence, à l'issue d'une procédure digne d'un procès stalinien (accusations bidons, preuves fabriquées, droits de la défense bafoués, etc.).

Son crime : avoir osé dénoncer la main-mise de la République populaire de Chine sur la République socialiste du Viêt Nam, et la répression dont faisaient l'objet les défenseurs des droits de l'homme et de la liberté d'expression dans son pays.
 

En décembre 2007, Nguyen Van Hay écrivait un billet qui, vu d'ici, pourrait passer pour quelque peu "fleur bleu" :

Quatre mois plus tard, accusé de "fraude fiscale", il était incarcéré. Son avocat a depuis démontré que la police lui avait en fait tendu un piège, en ordonnant au service des impôts de refuser tout encaissement de sa part. Dieu Cay n'en a pas moins été condamné à 30 mois de prison.

A l'issue de cette première peine, et plutôt que de le relâcher, les autorités lui reprochèrent d'avoir violé l'article 88 du Code pénal vietnamien, qui punit de 20 ans de prison tout « crime de propagande contre l’Etat de la République socialiste du Vietnam », afin de le maintenir en détention, dans des conditions particulièrement difficiles : à son avocat, Dieu Cay expliqua ainsi avoir entendu l'un des responsables de la prison, le lieutenant-colonel Hoang Van Dung, lui expliquer sa mission : "détruire ta santé, et faire de sorte que tu meurres en prison".

Incarcéré dans... le couloir de la mort, privé de communications avec l'extérieur, Dieu Cay s'est également vu interdire de recevoir suffisamment d'argent pour pouvoir se nourrir correctement (au Vietnam, les prisonniers doivent payer pour manger, et les autorités lui ont interdit de recevoir de quoi survivre décemment).

« J'étais juste frustré par l'injustice »

En septembre 2012, le premier ministre de la République socialiste du Viêt Nam annonça qu'il punirait sévèrement toute critique du parti communiste -le seul parti autorisé dans ce pays-, citant nommément trois blogs, dont le sien. Dans la foulée, les 3 blogueurs, membres fondateurs d'un "Club of Free Journalists", étaient condamnés à des peine de 4 à 12 ans de prison.

D'après l'Agence France-Presse, Dieu Cay a expliqué aux juges qu'il n'avait "jamais été contre l'Etat, j'étais juste frustré par l'injustice, la corruption, la dictature, qui ne représentent pas l'Etat mais seulement quelques individus".

Le son de la retransmission, mise en place pour les journalistes et les diplomates dans une salle voisine, fut coupé après qu'il eut déclaré : "Les citoyens ont le droit à la liberté d'expression"... et la cour refusa de montrer aux avocats de Dieu Cay les 26 articles qui lui étaient reprochés.

Le juge Nguyen Phi Long estima de son côté que les accusés avaient « abusé de leur popularité sur Internet pour poster des articles qui sapaient, noircissaient les dirigeants, critiquaient le parti (...), détruisant la confiance du peuple en l’Etat ».

« Leur crime est particulièrement grave, avec une claire intention contre l’Etat. Ils doivent être sérieusement punis ».

Leur procès avait été reporté plusieurs fois : une fois parce que Barack Obama avait évoqué le cas de Dieu Cay dans un discours tenu pour la Journée de la liberté de la presse, une autre parce que la maman de Tan Phong Tan, blogueuse et membre elle aussi du "Club of Free Journalists", venait de s'immoler par le feu après avoir refusé, malgré les pressions policières, de dénoncer les "crimes" de sa fille.

Dieu Cay a été condamné à 12 ans de prison pour "propagande contre l’Etat" en septembre dernier, condamnation confirmée en appel le 28 décembre 2010.

Tan Phong Tan, 44 ans, ex-officière de police et membre du parti communiste vietnamien, créatrice d'un blog intitulé “La justice et la vérité”, et dont la mère s'était donc immolée par le feu, a de son côté été condamnée à 10 ans de prison -confirmés en appel.

Phan Than Hai, 43 ans, avocat et journaliste internet indépendant, a quant à lui écopé de 4, puis de 3 ans de prison en appel : contrairement à ses 2 co-accusés, il avait en effet accepté de plaider coupable, de reconnaître et "confesser" ses "crimes"...

Violée par des policières

Leur procès, interdit au public ainsi qu'aux observateurs étrangers, le fut également à leurs familles. Des centaines de policiers frappèrent d'ailleurs ceux qui avaient décidé de manifester leur soutien aux 3 blogueurs, et 12 d'entre-eux furent arrêtés, dont l'ex-femme et le fils de Dieu Cay.

Au Vietnam, les opposants sont habitués à être interrogés, harcelés, menacés, frappés ou victimes de "faux accidents" de voiture (comme de nombreux autres dissidents vietnamiens). Mais ce jour-là, Nguyen Hoang Vi, une blogueuse de 26 ans, eut droit à un traitement particulier : venue assister au procès, elle fut en effet arrêtée par des policiers "comme l’on arrête des animaux" :

"Un groupe de policiers m’a pris par les pieds et les bras. Ils m’ont balancée dans la voiture. Un autre groupe a couru après le blogueur Hanh Nhan. Ils l’ont fait tomber et l’ont tabassé alors qu’il était à terre. Ensuite, ils l’ont pris par les pieds et par les bras, comme on embarque un cochon."

Frappée dans la voiture, puis au commissariat, elle y fut dévêtue, de force.

"Une policière m’a dit qu’on me soupçonnait de cacher quelque chose d’illégal et qu’elle devait me fouiller. Quatre femmes me tenaient les bras et les jambes, comme on écartelait les gens autrefois. Ils m’ont retiré mes sous-vêtements, écarté les jambes et introduit leurs doigts dans mon intimité, sous les yeux des policiers masculins présents dans la salle. Toute la scène a été filmée.

J’ai alors réalisé que tout ceci n’était destiné qu’à m’humilier. Après avoir remis mes cheveux en ordre, je me suis tournée vers la caméra en disant haut et fort : « Vous qui filmez, n’oubliez pas de poster la vidéo sur le net pour que tout le monde puisse constater combien vous êtes ignobles ! »"

« La deuxième prison du monde après la Chine »

Deux musiciens, accusés d'avoir dénoncé les persécutions contre Dieu Cay & ceux qui osent critiquer la République socialiste du Viêt Nam, ont par ailleurs été condamnés, en octobre dernier, à 4 & 6 ans d'emprisonnement.

14 autres dissidents et blogueurs vietnamiens d'un vingtaine d'années viennent de leur côté d'être condamnés à un total de 113 années d'emprisonnement, en janvier dernier, condamnations mensongères & biaisées illustrant, pour l'ONG Reporters Sans Frontières (RSF), "la paranoïa des autorités qui, non seulement surveillent les moindres déplacements de ses citoyens mais sont aussi mal informées par leurs services de renseignement"...

Un autre blogueur, connu pour ses dénonciations de la corruption et des abus de pouvoir des plus hauts cadres du Parti Communiste et du gouvernement, vient pour sa part d'être interné en institution psychiatrique...

Classé au 172e rang sur 179 en terme de liberté de la presse par Reporters sans frontière, qui le considère comme un 12 pays classés "ennemis de l'internet", le Vietnam est "la deuxième prison du monde pour les net-citoyens après la Chine", selon RSF. 32 blogueurs y croupissent en ce moment en prison, condamnés ou en attente de jugement, pour avoir osé appeler à des réformes démocratiques, à la défense des droits de l'homme et de la liberté d'expression, sur leurs blogs...

Les informations qui m'ont permis de rédiger ce billet viennent en bonne partie d'un rapport sur les blogueurs et cyberdissidents vietnamiens publié conjointement ce 13 février par la Fédération Internationale des droits de l'homme, et le Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme, à l'occasion d'une campagne intitulée Nous sommes tous des blogueurs vietnamiens ! (voir aussi l'article du Monde.fr, Le Vietnam applique le modèle chinois pour réprimer blogueurs et internautes).

Le 19, ils demanderont la libération de tous les blogueurs emprisonnés, et ont donc besoin de votre soutien :

Rejoignez la campagne proposée sur Thunderclap en cliquant ici (nouveau, pratique et facile d’utilisation)

Postez l’image du texte de Dieu Cay sur votre Facebook et renvoyer vers cette page (image téléchargeable ici)

Twittez, mardi 19 février, le message suivant : #Vietnam : 32 bloggers behind bars : they need your support to get released ! #freeVNbloggers http://bit.ly/14HgYEG

Voir aussi :
Calais: des réfugiés aux doigts brûlés
Comment (ne pas) être (cyber)espionné ?
« L’Internet est libre »… mais pas notre pays.
Lettre ouverte au président de l’Azerbaïdjan

A quoi servent les « agents antiémeutes toxiques » français au Bahreïn ?

jean.marc.manach (sur Facebook & Google+) @manhack (sur Twitter)
Et pour me contacter, de façon anonyme & sécurisée (#oupas /-), c'est par là.

 

 

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