François Hollande avait annoncé en août dans Le Monde une « adaptation de la réglementation sur l'ouverture des magasins le dimanche ». Le projet de loi présenté mercredi 15 octobre par le ministre de l'économie, Emmanuel Macron, met en œuvre cette annonce et prévoit l'élargissement des dérogations à la règle du repos dominical.
Que prévoit la réforme ?
Le texte prévoit d'élargir les dérogations déjà existantes aux gares et aux « zones touristiques à fort potentiel économique ». Dans ces zones, les commerces auront une autorisation d'office à ouvrir cinq dimanches dans l'année , et jusqu'à douze en cas d'autorisation des maires.
Un repos dominical aux nombreuses exceptions
Le code du travail stipule, dans son article L3132-3, que « dans l'intérêt des salariés, le repos hebdomadaire est donné le dimanche ».
En pratique, le texte contient de nombreuses exceptions. Si l'on imagine difficilement voir les hôpitaux, par exemple, suspendre toute activité le dernier jour de la semaine, d'autres secteurs dérogent également à la règle en vertu de multiples dérogations géographiques, touristiques, économiques ou épisodiques. Ainsi, selon une étude de la Dares, en 2011, 29 % des salariés travaillaient le dimanche, et 16 % de façon occasionnelle.
Voir notre infographie complète : Combien de salariés travaillent le dimanche ?
Des dérogations CINQ dimanches dans l'année
Dans les commerces de détail non alimentaire, la règle du repos dominical peut être transgressée jusqu'à cinq fois par an, traditionnellement en période de fêtes ou de soldes. La décision est prise par le maire, sauf à Paris, où elle revient à la préfecture. La rémunération des salariés est dans ce cas au minimum doublée et une contrepartie de repos leur est également accordée.
Des zones exceptionnelles déjà créées
La loi Maillé du 10 août 2009 a créé des « zones d'intérêt touristiques ou thermales » et des « zones touristiques d'affluence exceptionnelle », délimitées par le préfet. Les commerces qui s'y trouvent sont autorisés à ouvrir le dimanche. En revanche, aucune compensation pécuniaire ni aucun jour de repos supplémentaire ne sont prévus pour les salariés, sauf conventions ou accords collectifs dans l'entreprise.
Le projet de loi du ministre Emmanuel Macron prévoit l'élargissement de ces zones aux gares et à des endroits très fréquentés. Par exemple, à Paris, les Champs-Elysées, une partie de la rue de Rivoli et la place des Vosges sont déjà concernés par le dispositif, mais le boulevard Haussmann, qui concentre les grands magasins très prisés et fréquentés, n'en bénéficie pas.
La loi Maillé a également créé des « périmètres d'usage de consommation exceptionnel » dans les agglomérations de plus d'1 million d'habitants (Paris, Lille et Aix-Marseille, mais pas Lyon). Ces dernières, délimitées par le préfet de région sur demande des mairies, permettent l'ouverture des enseignes tous les dimanches en raison d'« habitudes de consommation, importance de la clientèle et/ou étendue de la zone de chalandise ». En contrepartie, des compensations sont offertes aux salariés, comme le doublement du salaire, avec des garanties de repos compensatoire.
Une longue liste de dérogations permanentes
De nombreux secteurs sont toutefois autorisés à travailler le dimanche de manière permanente, la loi définissant très précisément la liste. Il s'agit de dérogations accordées dans les industries où une fermeture ponctuelle endommagerait la matière première. C'est notamment le cas des usines de produits laitiers, contraintes de travailler en continu, sous peine de voir leur production s'altérer. Dans ces entreprises, le travail dominical des salariés, effectué par roulement, est encadré par des conventions collectives. Aucun changement, en revanche, sur leur fiche de paye : la rémunération est la même que lors d'une journée normale.
Les magasins de bricolage ont récemment été officiellement et définitivement ajoutés à cette liste des dérogations par un décret publié le 8 mars 2014. Le gouvernement avait d'abord publié un décret provisoire en décembre 2013, mais ce dernier avait été suspendu en février par le Conseil d'Etat qui, saisi par les syndicats, avait estimé qu'il « existait un doute sérieux sur la légalité ».
Pour d'autres commerces, lorsque la fermeture du dimanche est considérée comme « préjudiciable au public » ou compromet son « fonctionnement normal », un préfet peut prendre la décision, au cas par cas, d'accorder l'ouverture d'une enseigne le dimanche. Dans ce scénario, le travail dominical se fait sur la base du volontariat.