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5 juin 2013 3 05 /06 /juin /2013 14:15

 

 

Médiapart

 

 

 

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Ce devait être l'arme fatale post-Cahuzac. Un moyen de renouer la confiance avec les Français, trop souvent écœurés par leurs élus. Le 3 avril, au lendemain des aveux de Jérôme Cahuzac, un François Hollande sonné proposait en urgence une batterie de mesures censées éviter un nouveau scandale : « lutter de manière impitoyable contre les conflits entre intérêts publics et privés », l'inéligibilité des élus « condamnés pénalement pour fraude fiscale ou corruption »mais surtout « la publication et le contrôle sur les patrimoines des ministres et de tous les parlementaires ».

Autant de mesures intégrées à toute vitesse dans un projet de loi présenté le 24 avril en conseil des ministres, alors que dès le 15 avril, les ministres publiaient leur patrimoine :


Inédite dans la culture politique française, l'annonce de la publication du patrimoine des élus a beaucoup fait parler. Cette mesure, à elle seule, n'aurait sans doute pas évité un nouveau scandale Cahuzac mais que François Hollande et Jean-Marc Ayrault le veuillent ou non, elle était devenue une sorte de symbole.

Sauf que l'élan de départ s'est estompé. Face à la fronde des parlementaires – à commencer par le président de l'Assemblée nationale, Claude Bartolone, qui a mené une véritable guérilla – la transparence a été édulcorée. Alors qu'il était question d'instaurer une incompatibilité de principe de tout mandat parlementaire avec une autre activité, l'idée s'est évaporée. Si bien que députés et sénateurs pourront continuer, dans une certaine limite (a priori, la moitié de leur indemnité parlementaire, qui s'élève à 5 500 euros brut) à exercer une activité professionnelle annexe.

Résultat : les textes de « transparence de la vie publique » qui seront examinés à l'Assemblée nationale entre le 17 et le 21 juin présentent de vraies avancées sur le contrôle des patrimoines et la prévention des conflits d'intérêts. Mais paradoxalement, c'est bien le renoncement sur la transparence du patrimoine que risque d'en retenir l'opinion.

Mardi soir, en commission, les députés ont acté le deal conclu ces derniers jours entre l'Élysée, Matignon, et l'Assemblée nationale. Un arrangement arraché au forceps. Car jusqu'au bout, Claude Bartolone a bataillé sec pour éviter toute publication du patrimoine des élus.

Depuis des semaines, l'ancien président du conseil général de Seine-Saint-Denis, député depuis 1981, fustige la « démocratie-paparazzi ». Bartolone en a fait une affaire personnelle. En avril, lors d'un petit-déjeuner de la majorité, certains l'ont entendu menacer de quitter la vie politique si une telle mesure était adoptée. Quand Le Canard enchaîné a publié la photo de sa belle maison d'architecte aux Lilas (évaluée à 1,2 million d'euros selon lui), Bartolone a vu rouge et voulu croire que la fuite venait de Matignon.

Son opposition personnelle est toutefois au diapason de celle de nombreux députés, vieux briscards ou plus jeunes, hostiles par principe à l'étalage de leurs patrimoines personnels et de celui de leurs proches. Tous l'assurent : s'il avait persisté, le gouvernement n'aurait d'ailleurs pas eu de majorité sur ce texte emblématique. Ce qui, après un tel scandale, aurait été déflagratoire.

L'exécutif a donc dû composer. Il y a une dizaine de jours, le député René Dosière, connu pour ses enquêtes sur les dépenses de l'Élysée, propose une solution : instaurer une obligation pour les élus de faire la lumière sur leur patrimoine… tout en limitant la possibilité pour le grand public d'y accéder. « C'est ce qui existe pour les déclarations fiscales depuis 40 ans ! » justifie Dosière. Personne ne le sait, mais un contribuable peut en effet accéder aux principaux éléments de la déclaration fiscale d'un autre contribuable (à condition de dépendre du même centre des impôts).

 

Combi Volkswagen

 

Claude BartoloneC
laude Bartolone© Reuters

De la même façon, la solution imaginée par Dosière consiste à rendre possible la communication du patrimoine, mais seulement aux citoyens du département de l'élu concerné. Tout en leur interdisant, restriction de taille, de publier les informations ainsi recueillies sous peine de sanctions pénales.

La semaine dernière, la proposition est tour à tour acceptée par Jean-Marc Ayrault et François Hollande. Mais l'accord avec Claude Bartolone ne sera conclu qu'au cours du week-end. Et encore ce dernier n'a-t-il pas formellement dit oui. « Son obstination est incompréhensible… », s'étonne un député.

Sur la publication du patrimoine, le compromis a tout du deal bancal, surtout au regard de l'objectif affiché de clarté et de transparence.

On résume (sur la base d'un texte interne au groupe PS que nous nous sommes procuré) :  

  • Tous les parlementaires seront tenus de transmettre leur patrimoine à une nouvelle Haute autorité de la transparence de la vie publique (HAT). En début et en fin de mandat, mais aussi en cas de « changement substantiel » de leur situation. Cette nouvelle autorité remplace l'actuelle Commission pour la transparence financière de la vie politique, qui n'a jamais été dotée de moyens et de pouvoir suffisants. Le patrimoine des proches, y compris du conjoint, ne sera pas publié.

 

  • Ces dispositions concernent aussi : les parlementaires européens, les responsables d'exécutifs locaux des maires de villes de plus de 30 000 habitants, les membres des cabinets ministériels, les ministres, les « membres des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques », toutes les personnalités nommées en conseil des ministres, les dirigeants d'entreprises publiques, et peut-être même les collaborateurs parlementaires. Au total, plusieurs milliers de personnes.

 

  • Ces déclarations seront transmises à l'administration fiscale. Qui, en retour, « fournira à la HAT tous les éléments lui permettant d'apprécier l'exhaustivité, l'exactitude et la sincérité  » des déclarations.

 

  • « En cas de déclaration incomplète ou d'absence de réponse à ses demandes d'explication », l'élu encourt des sanctions pénales.

 

  • Les déclarations ne pourront pas être consultables par tous : pour consulter (au hasard) le patrimoine d'un élu du Lot-et-Garonne, il faudra être électeur dans le Lot-et-Garonne. Les électeurs pourront saisir la HAT s'ils jugent que la déclaration contient des anomalies. Mais il leur est interdit d'en dévoiler le contenu, sous peine d'écoper d'un an de prison et de 45 000 euros d'amende.

À droite, certains élus fustigent une « loi Cahuzac » (Guy Geoffroy). D'autres y voient « un parfum de robespierrisme, une dérive populiste au sommet de l'État » (Guillaume Larrivé). D'autres encore tiennent un discours un brin contradictoire, comme Philippe Houillon, qui s'inquiète de l'instauration du « contrôle fiscal pour tous » mais déplore aussi que le gouvernement « s'arrête au milieu du gué ».

« Ce n'est pas l'équivalent de l'idée d'origine, concède le ministre des relations avec le Parlement Alain Vidalies, qui aurait aimé aller plus loin. Mais c'est un point d'équilibre entre la protection de la vie privée et la création d'un droit d'alerte nouveau pour les citoyens. » De fait, François Hollande a exigé que dans le nouveau dispositif, les citoyens eux-mêmes puissent alerter la haute autorité (certains responsables du groupe PS, à commencer par le rapporteur du texte Jean-Jacques Urvoas, voulaient cantonner ce droit aux associations type Anticor).

« Aujourd'hui, tout le monde est content, c'est la bonne formule », applaudit René Dosière. « On atterrit avec raison et efficacité », se félicite l'entourage de Bartolone. « Il va y avoir un fort niveau de contrôle et la vie de nos proches ne sera pas mise sur la place publique », dit le député PS Philippe Doucet. Une fois n'est pas coutume, le Front de gauche se satisfait d'un « bon point d'équilibre qui évite la tendance au populisme et à l'exhibition ».

 

Amendement Sarkozy

Reste qu'au PS, certains (minoritaires) trouvent le résultat de la discussion fort timide. « C'est plus que prudent. L'opinion publique ne sera pas satisfaite : elle exige une transparence totale des élus », déplore Christophe Castaner, proche de Jean-Marc Ayrault, qui a publié son patrimoine il y a plusieurs semaines avec pour seul résultat un léger boom de consultations pendant quelques jours sur son site, puis plus rien.

Certains socialistes s'interrogent aussi sur les moyens qui seront réellement dévolus à la haute autorité. « Aura-t-elle les moyens d'enquête ? C'est la question centrale », s'interroge Castaner. « La publication du patrimoine, je m'en fous, explique Jérôme Guedj, de l'aile gauche du PS. Ce que je veux, ce sont des contrôles efficaces, de vrais pouvoirs d'investigation fiscale pour cette autorité. On pourrait imaginer des contrôles aléatoires de certains patrimoines, comme c'est le cas pour les allocataires du RSA. »

Les écologistes, partisans de la publication des patrimoines (ils ont publié les leurs sur Internet), sont très remontés. « Il ne faudrait pas qu'une loi sur la transparence finisse par le secret et l'opacité », craint François de Rugy, coprésident du groupe écolo à l'Assemblée. « La haute autorité risque d'être dans une situation intenable : elle sera au cœur de toutes les contestations possibles. Et à quoi rime ce pseudo-système de publication qu'on ne peut pas rendre public ? On aura des soupçons, des rumeurs, des gens qui diront d'un air entendu “ah moi je sais des choses…”. »

Les écologistes s'inquiètent aussi des possibles répercussions pénales pour les journalistes, dès lors que dévoiler le patrimoine d'un élu deviendra un délit. « Un journaliste qui parle du combi Volkswagen de Jean-Marc Ayrault risquera-t-il 45 000 euros d'amende ? » s'inquiète l'autre coprésidente écolo, Barbara Pompili. « C'est un souci », concède le socialiste René Dosière, qui pourrait déposer un amendement lors de l'examen du texte en séance. Interrogée mardi, la porte-parole du groupe PS, Annick Lepetit, a fait aux journalistes cette étrange réponse : « Si vous enquêtez sur quelqu'un, vous verrez avec lui ce que vous pourrez diffuser ». Incompréhensible.

Les écolos sont tombés de haut quand ils se sont aperçus que les dispositions encadrant les activités parallèles des parlementaires avaient disparu. Terminée l'idée, un temps évoquée et contenue dans le projet de loi initial, d'interdire a priori les députés d'exercer toute activité parallèle, en particulier les activités de “conseil”. Là encore, Claude Bartolone (mais aussi le ministre de l'intérieur Manuel Valls) a mis tout son poids dans la balance. Les avocats de l'Assemblée, parmi lesquels plusieurs radicaux de gauche, ont mené un lobbying efficace. « Seuls 92 députés sur 577 ont une activité professionnelle, plaide Annick Lepetit. La solution retenue est plus simple et plus consensuelle. »

Aucun métier ne sera donc exclu. En revanche les revenus de cette activité annexe seraient plafonnés à 50 % de l'indemnité parlementaire. Mais qui contrôlera ? Difficile de le savoir pour l'heure. Et a priori, le député UMP de l'Oise Olivier Dassault, président du holding du groupe d'armement du même nom qui vit en grande partie de la commande publique, pourra continuer à exercer son activité.

Ces gros reculs feraient presque oublier les avancées du texte : l'encadrement des conflits d'intérêts, la limitation du pantouflage, des peines d'inéligibilité pour les élus condamnés (même si l'inéligibilité à vie évoquée par l'exécutif dans la panique post-Cahuzac n'est pas constitutionnelle). Ou encore cet amendement interdisant aux membres du Conseil constitutionnel d'exercer la profession d'avocat, discuté mercredi matin : c'est évidemment Nicolas Sarkozy qui est visé.

Mais ils permettent aussi de passer sous silence de nombreux sujets, jugés trop sensibles ou carrément tabous, qui ne sont pas abordés dans ces textes : le contrôle de l'utilisation de l'IRFM des députés, cette indemnité parfois utilisée pour payer des permanences parlementaires ou des dépenses personnelles ; les emplois familiaux, une pratique courante au Parlement ; les avantages divers (retraites, prêts gracieux) octroyés aux députés ou aux sénateurs. Ou encore le toujours très opaque financement des campagnes électorales.

 


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