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2 février 2014 7 02 /02 /février /2014 17:59

 

 

Source : rue89.nouvelobs.com

 

 

Sotchi 02/02/2014 à 16h12
Les JO de Sotchi ? Du grand n’importe quoi : la preuve en cinq histoires
Clément Guillou | Journaliste Rue89

 

l faut reconnaître deux choses au moins au Comité international olympique :

  • on n’a jamais autant parlé des JO d’hiver ;
  • les confier à une station balnéaire défraîchie n’était pas aussi absurde qu’offrir la Coupe du monde de foot à un émirat grand comme l’Ile-de-France, où les températures l’été atteignent 45 degrés à l’ombre.

Mais les mois de polémiques qui ont précédé les Jeux olympiques de Sotchi montrent à quel point le CIO a fait, en 2007, le choix le plus compliqué en choisissant cette petite ville du bord de la mer Noire. Aux dépens des candidatures, plus modestes et de saison, de Salzbourg (Autriche) et Pyeongchang (Corée du Sud).

Rappel, en cinq histoires, de la façon dont Poutine a préparé « ses » Jeux.

                                                                                                                                                                                                                              1 l y a quatre ans, il y avait une seule remontée mécanique à Sotchi


 


Sur une plage de Sotchi en 1992 (SICHOV/SIPA)

 

Un jour de l’hiver 2002, skiant en Autriche avec son ami oligarque Vladimir Potanine et le chancelier Wolfgang Schüssel, Vladimir Poutine fait le constat qu’il serait incapable d’en faire de même dans son pays, qui ne compte pas une seule station de sports d’hiver digne de ce nom.

Développer ce nouveau tourisme en Russie devient un nouvel objectif du sportif président, et c’est un Américain spécialiste des stations de sports d’hiver qui lui suggère le Caucase du Nord, plus particulièrement le village de Krasnaïa Poliana, comme lieu d’implantation.

Il confie le projet à Potanine, qui annonce la construction de la station de Rosa Khoutor (« Ferme rose ») en 2005.

En 2007, les inspecteurs du CIO découvrent un champ de neige. En 2010, l’actuel exploitant de Rosa Khoutor, le Français Jean-Marc Farini, visite un site doté d’une seule remontée mécanique. La station ouvre l’année suivante.

Trois ans plus tard, Rosa Khoutor revendique seize remontées mécaniques pour 77 kilomètres de pistes.

Moscou ambitionne de construire dix stations dans le Caucase du Nord, y compris au Daguestan et en Tchétchénie, et d’y attirer 3,5 millions de touristes par an.

Farini raconte au magazine Néon :

« Les Russes ont réalisé en quelques années ce que les Français ont fait en quarante ans de Plan neige. Peu de pays seraient capables de ça, même si on peut émettre des critiques. »

                                                                                                                                                                                                                                 2 Le pionnier des sports d’hiver en Russie a dû revendre sa station à Gazprom


 


Le chantier de la piste de bobsleigh des JO dans la station d’Alpika (LEON NEAL / AFP)

 

Ces dernières années, les expropriations abusives se sont multipliées dans la région de Sotchi (lien payant), comme avant les JO d’été à Pékin. Les habitants ont été relogés dans des barres HLM sans âme en périphérie.

Les immeubles ont poussé anarchiquement dans le centre-ville, défiant toute logique urbanistique, et les projets de l’oligarque Oleg Deripaska ne sont accessibles qu’aux touristes millionnaires.

Piotr Fedine, lui, n’a pas été exproprié. Mais on lui a fait une offre qu’il ne pouvait refuser.

Plusieurs journaux, dont Le Monde et Géo, ont raconté l’histoire de ce visionnaire amateur de ski extrême qui, dès 1992, a misé sur le développement des sports d’hiver dans le Caucase du Nord.

Il monte alors, avec ses petits moyens et ses trois enfants, la station de ski d’Alpika, autour de Krasnaïa Poliana. Un succès limité jusqu’à la visite du nouveau président Vladimir Poutine, en 2000. Il prend l’unique télésiège, dévale la piste avec adresse, et reviendra fréquemment, inspirant quelques admirateurs fortunés.

En 2008, peu après l’attribution des Jeux, un avion de la compagnie Gazprom, monopole d’Etat, se pose à Krasnaïa Poliana. Des hommes suggèrent à Fedine de l’accompagner et, sur le chemin du retour à Moscou, lui expliquent qu’il va falloir vendre.

Ce sera 15 millions de dollars, « alors que le prix est trois fois supérieur », s’est-il plaint au Monde (lien payant) :

« Après trois ans de pressions, on a dû affronter des plaintes absurdes en justice, ainsi que des tentatives de liquidation judiciaire. Je n’en pouvais plus. »

A Alpika seront disputées les épreuves de bobsleigh.

                                                                                                                                                                                                                               3 Le maire de Sotchi a obtenu 77% des voix aux élections


 


Anatoli Pkhomov, maire de Sotchi, brandit le drapeau olympique que vient de lui donner Jacques Rogg, président du CIO, à Vancouver en 2010 (Jae C. Hong/AP/SIPA)

 

Vladimir Poutine s’est rendu fréquemment à Sotchi pour surveiller l’avancée des travaux. Mais il lui fallait tout de même placer un fidèle à l’hôtel de ville. En 2009, une parodie d’élections a permis à Anatoli Pakhomov d’être réélu à 77% – 25 candidats déclarés, six habilités à se présenter, un seul autorisé à dépasser les 50%.

Le libéral Boris Nemtsov, originaire de Sotchi et ancien vice-premier ministre de Boris Eltsine, faisait figure d’opposant crédible. Il fut aspergé d’ammoniac et sali dans des clips diffusés par la télévision locale.

Dans un reportage (lien payant) réalisé à l’époque des élections, la correspondante du Monde en Russie, Marie Jégo, écrivait :

« Une semaine avant le scrutin, les fonctionnaires – enseignants, médecins, employés – ont été incités à voter par anticipation, au prétexte qu’ils travailleront dimanche 26 avril.

“Je n’y comprends rien. En réalité, nous ne travaillons pas le dimanche, or on nous emmène voter pendant nos heures de travail”, s’étonne un instituteur ramené en autobus, mercredi 15 avril, dans un bureau de vote improvisé à Adler, à dix kilomètres de Sotchi.

Lui et des centaines d’autres personnes vont cocher leur bulletin autour d’une table ronde, sous l’œil attentif de leur hiérarchie. »

Le maire Pakhomov, un apparatchik rondouillet, est plus poutinien que le président lui-même. Il est persuadé qu’il n’y a pas d’homosexuels dans sa ville de 400 000 habitants, pourtant dotée de deux bars gays. Et demande à ceux qui viendront pendant les Jeux de ne pas « imposer leurs habitudes aux autres », en vertu de la loi contre la « propagande homosexuelle ».

                                                                                                                                                                                                                             4 Les tremplins de saut à ski ont coûté 200 millions d’euros et deux exils

 


Le chantier de construction d’un tunnel train-route entre Sotchi et Alpia, en 2010 (MIKHAIL MORDASOV / AFP)

 

La gabegie des Jeux de Sotchi est illustrable par mille exemples. Le plus connu : la route et le chemin de fer reliant Adler, dans la banlieue de Sotchi, aux montagnes de Krasnaïa Poliana, pour un coût estimé de 6,5 milliards de dollars, l’équivalent du coût total de l’organisation des JO de Vancouver.

Un désastre environnemental, « l’une des plus grandes escroqueries de l’histoire des Jeux », selon l’opposant Boris Nemtsov. Une prouesse technique équivalente au TransSibérien, selon son promoteur, la président de la compagnie ferroviaire publique russe.

Le magazine russe Esquire a calculé qu’on aurait pu, pour ce prix, recouvrir la route d’un centimètre de caviar Beluga (ce qui eût été pire gâchis encore).

Le cas du tremplin de saut à ski est tout aussi absurde et vaut aujourd’hui un exil londonien à deux frères jusqu’à peu très en cour au Kremlin. Comme pour tant d’autres installations, les scientifiques ont été plutôt négligés avant le début des travaux.

Le chantier, qui doit coûter initialement 28 millions d’euros, commence en 2008 sans étude géologique préalable selon l’enquête de Bloomberg Businessweek. Sur un sol trop meuble, gorgé d’eau, sujet aux glissements de terrains. Au printemps 2012, des millions de tonnes de boue dévalent la colline où le tremplin est en cours de construction.

A ce stade, la facture est déjà de 100 millions d’euros. Elle doublera. Victime de ce fiasco : les frères Bilalov, « gagnants » du contrat. Magomed l’entrepreneur, Akhmed le politique, copain du gouverneur régional et vice-président du Comité olympique.

Lorsque Vladimir Poutine vient visiter le chantier le 6 février 2013, un an avant les Jeux, il feint de découvrir que le tremplin n’est pas terminé et que les coûts ont explosé. Devant les caméras, manteau noir et visage fermé, Poutine lâche un sarcastique : « Bravo, bon boulot. » Le sort des Bilalov est scellé.

Ils vivent aujourd’hui à Londres après un passage, selon eux, à l’hôpital de Baden-Baden pour soigner un empoisonnement au mercure.

Depuis avril, Akhmed Bilalov est poursuivi par la justice russe pour abus de pouvoir. Ses dépenses somptuaires aux frais de l’Etat ont été étalées dans la presse. Leurs parts majoritaires dans l’entreprise Krasnoïa Poliana ont été rachetées pour une bouchée de pain.

                                                                                                                                                                                                                              5 Les combats dans la région ont fait près de mille morts l’an dernier

 


Des policiers en patrouille sur un site olympique de Krasnaya Polyana samedi (Gero Breloer/AP/SIPA)

 

Vladimir Poutine a fait de l’événement un enjeu de politique intérieure. Il s’agit aussi d’affirmer le pouvoir du Kremlin dans la région, où les islamistes opèrent sur un territoire grandissant. Des Jeux sans incident majeur justifieraient son virage en la matière ces derniers mois, décrit comme « maladroit » par le groupe de réflexion International Crisis Group :

« Au Daguestan, par exemple, les tentatives de réinsertion des insurgés et de dialogue avec les salafistes les plus modérés ont fait place à une large répression contre les fondamentalistes. La même politique a été appliquée en Ingouchie et la sécurité a été renforcée partout.,

Ces mesures pourraient temporairement supprimer les symptômes de l’insurrection au Caucase du Nord, mais elles ne peuvent mettre fin aux problèmes de fond. La région a besoin d’une paix durable, plus d’opérations à grande échelle. “

Sotchi et Krasnaïa Poliana vont ressembler à des forteresses avec, selon les sources, entre 37 000 et 100 000 hommes sous l’autorité du FSB, pour 343 000 habitants en temps normal. L’atmosphère risque d’être un peu moins légère que lors d’autres éditions des JO d’hiver. Ils étaient 6 000 policiers à Vancouver, il y a quatre ans.

Une loi d’exception interdit certains déplacements en voiture, donne aux forces de l’ordre des moyens d’écoute et des pouvoirs d’enquête et d’interpellation faisant passer les services français pour de gentils militants des droits de l’homme.

Les autorités américaines affichent leur inquiétude et laissent à disposition en cas de crise deux vaisseaux de l’US Navy en mer Noire ; les athlètes français seront accompagnés par le Raid et le GIGN. Bonne ambiance.

Il faut dire que le conflit armé dans le Nord-Caucase a fait 986 victimes en 2013 (selon le site Caucasian Knot) et que trois attentats suicide ont frappé Volgograd en fin d’année.

Les cibles des forces russes sont les ‘veuves noires’, des compagnes d’islamistes tués et coupables des attentats suicide les plus marquants ces dernières années en Russie . Tous les agents patrouillant à Sotchi ont sur eux des photos de jeunes femmes du Daguestan, couvertes d’un foulard ou d’un hidjab, et qui se sont évanouies dans la nature ces dernières semaines.

Plus Poutine lie son image au succès des Jeux de Sotchi, plus ceux-ci deviennent une cible de choix pour les islamistes. Mais les experts soulignent que plus Sotchi devient difficile à frapper, moins les autres villes russes sont sécurisés.

 

 

Source : rue89.nouvelobs.com

 

 

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