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24 juin 2013 1 24 /06 /juin /2013 16:25

 

 

Marianne

 Lundi 24 Juin 2013 à 16:16

 

Francis Daspe*

 

Le contresens savamment entretenu sur la nature et les vertus supposées du commerce doit nous interroger au moment même où se négocient entre l’Union européenne et les Etats-Unis les termes d’un grand marché transatlantique. La violence de la réaction de Manuel Barroso critiquant la volonté de la France de soustraire la culture du champ conquérant de la marchandisation confirme nos inquiétudes.

 

Zhang Dejiang, membre du comité permanent du bureau politique du Parti communiste chinois
Zhang Dejiang, membre du comité permanent du bureau politique du Parti communiste chinois
Revisiter le passé à la lueur de l’actualité possède l’avantage, pour peu qu’on se défie de l’anachronisme, de pouvoir rétablir quelques vérités trop souvent perdues de vue. Il en va ainsi de la menace de la Chine de lancer une enquête anti-dumping et anti-subventions sur les vins français en représailles de la décision de la Commission européenne de taxer les importations de panneaux solaires et photovoltaïques chinois.
 
Certains s’évertuent à faire croire que le commerce équivaudrait à la paix. C’est notamment sur ce postulat complaisamment répandu que s’est construite l’Europe. On pourrait résumer la méthode Monnet de la sorte : « faisons des affaires, nous aurons la paix, et le reste viendra un jour ». Si l’on veut bien considérer que plus d’un demi-siècle après « le reste » est enfin venu, force est de constater que ce n’est pas le meilleur que nous avons obtenu.

Paraphrasons plutôt Jean Jaurès en l’adaptant à la situation. Comme la nuée porte l’orage, le commerce alimente des concurrences farouches et exacerbe les tensions diplomatiques. L’histoire de la Chine en apporte une illustration éclairante. Le XIX° siècle fut celui des « traités inégaux » que l’Europe infligea à l’empire chinois dirigé par une dynastie mandchoue sur le déclin. Par la « politique de la canonnière », avec notamment en points d’orgue la guerre de l’opium et celle des Boxers, les gouvernements européens se firent ouvrir le marché chinois.

 

Le prétexte de la sécurité des marchands et des missionnaires conduisit les Européens à demander toujours plus de concessions, accroissant par voie de conséquence l’humiliation de la Chine. On note au passage l’alliance du sabre, du goupillon et de la bourse dans toutes les aventures coloniales. Car c’est bien de cela dont il s’agissait : les historiens s’accordent pour classer la Chine dans la catégorie des « hypo-colonies » européennes à la fin du XIX° siècle. Les réactions vivaces du gouvernement chinois d’aujourd’hui ne sauraient être déconnectées de ce passé : elles s’inscrivent aussi dans une optique de revanche séculaire.

 

La confusion, ou la supercherie, réside dans l’expression « désarmement douanier » utilisée par les libéraux pour désigner une baisse ou une suppression des tarifs douaniers. L’OMC (organisation mondiale du commerce) reprend à son compte le mot pour justifier sa fuite en avant libre-échangiste. En réalité, qui désarme-t-on dans ces conditions ? Uniquement la puissance publique en réduisant la capacité des Etats à agir dans le sens de l’intérêt général.

Dans certains pays du tiers monde, les recettes douanières constituent un des premières sources alimentant le budget de la nation. Le commerce sans régulation renforce les rapports de force présidant aux relations entre Etats dans le seul but d’accumuler des profits : en d’autres temps le mot impérialisme aurait servi à désigner cette réalité.

La loi du commerce conduit au contraire à la dissolution des liens de solidarité. La réaction allemande est à cet égard édifiante. Sitôt la réaction chinoise exprimée, le gouvernement allemand s’est empressé de se désolidariser de la position européenne. La raison ? La volonté de préserver ses exportations. Les intérêts particuliers l’emportent sur toute forme de cohésion et de cohérence. Point de projet collectif à mener, mais un recentrage immédiat sur des solutions individuelles.

L’Europe et les Etats la composant sont-ils pour autant démunis face au rouleau-compresseur chinois ? Le sens des traités inégaux aurait-il changé de direction ? Non, absolument pas : les acteurs de la mondialisation sont interdépendants. Les Chinois craignent par-dessous-tout une fermeture du marché européen, ce qui priverait leur industrie de débouchés, aggravant les tensions sociales d’une société inégalitaire.

 

La peur des Chinois ? Le déclenchement de troubles sociaux pouvant dégénérer en révolte ou en révolution… C’est ce qui explique à la fois la vigueur de la réaction chinoise et la crainte d’une rupture, préférant tabler sur la conclusion d’un accord, non sans tenter au préalable de pousser au maximum les avantages visés.

 

Ce contresens savamment entretenu sur la nature et les vertus supposées du commerce doit nous interroger au moment même où se négocient entre l’Union européenne et les Etats-Unis les termes d’un grand marché transatlantique. La violence de la réaction de Manuel Barroso critiquant la volonté de la France de soustraire la culture du champ conquérant de la marchandisation confirme nos inquiétudes.

Par dogmatisme, nous nous désarmerions en liquidant l’exception culturelle tandis que nos concurrents savent défendre opportunément leurs intérêts vitaux. Le commerce version « concurrence libre et non faussée » n’est pas la paix. La promotion à l’échelle planétaire des valeurs de solidarité et de fraternité ne passe pas par l’acceptation des canons idéologiques de  l’OMC. Au contraire, le commerce doit se fonder sur le concept d’échanges satisfaisant nécessairement des intérêts réciproques, ceux des peuples et non le gonflement de chiffres d’affaires. Ce serait se situer aux antipodes des notions de compétition et de conquête.

(*) Secrétaire général de l’AGAUREPS-Prométhée (Association pour la gauche républicaine et sociale – Prométhée)

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