
Voilà en résumé, la prose du journaliste Georges Trangas ce matin sur la radio Real-Fm. Trangas a bu du petit lait car l'histoire immédiate lui donne raison, sur la plus longue durée par contre, rien n'est encore certain.
Mais d'abord les résultats :

Inscrits : 9.901.323
Participation : 65,06 %
Bulletins blancs/nuls 2,36 %
Voix exprimées : formations qui n'entrent pas au Parlement : 19,03 %
(seuil : 3 %)
(*) Formations politiques exprimant clairement leur opposition au Mémorandum.
Non, l'époque du méta-mémorandum n'est pas encore venue. Pourtant, l'air d'un autre temps, d'un autre calendrier politique, a soufflé très fort. Cet air du temps est d'abord celui de la dignité. Depuis, notre instantané historique se déchire enfin comme il se doit, en deux morceaux. L'ancien système politique du bipartisme a reçu un coup mortel, tandis que l'improbable (?) nouvelle coalition des anti-Mémorandum, ne se réalise pas encore. Même ce Vénizélos de l'ultime Pasok vient d'admettre que « l'ancien bipartisme n'a plus la légitimité nécessaire pour gouverner ». Il propose donc l'idée d'un gouvernent « national de coalition non pas sur la ligne de fracture du Mémorandum, mais sur celle existante, entre forces favorables à l'Europe et les autres », d'autres « journalistes », lancent ainsi l'idée d'un gouvernement « technocrate, pour ainsi garder une certaine stabilité, indispensable aux reformes entreprises ». C'est une honte. Le grand journal du soir en France, a adopté (sur son site), le même syllogisme : « Percée des néonazis en Grèce, Vénizélos appelle à l'union nationale. L'effondrement des partis de gouvernement à l'élection législative pourrait empêcher la formation d'un gouvernement de coalition pour poursuivre la politique de rigueur dictée par l'UE et le FMI ».
Les masques tombent, sauf que les lecteurs du Monde ne le réalisent pas encore. La percée de l'extrême droite nazifiante en Grèce est aussi... un élément rassurant si on analyse la situation autrement. Car je peux supposer par exemple, qu'après une telle politique du choc, pareillement appliquée en si peu de temps à d'autres pays de l'Europe occidentale, l'extrême droite, serait en phase de devenir vraisemblablement la première formation politique dans ces pays. Je trouve donc, que pour l'instant en tout cas, la Grèce a plutôt bien résisté à cette percée de l'extrême droite. Ensuite, le syllogisme suggéré par les rédacteurs du grand quotidien français, contient involontairement et en filigrane, la seule analyse juste de la situation. Car le vrai problème n'est pas l'extrême droite, mais plutôt, la poursuite de la politique de rigueur dictée par l'UE et le FMI, et celle-ci, n'est plus une affaire grecque me semble-t-il. C'est ainsi que le fascisme bancocrate est plus dangereux à mes yeux que celui des « néo-nazifiants » de toute sorte, et pour une raison évidente : c'est précisément ce premier fascisme qui est à l'origine du second, ainsi les larmes de crocodile au journal du soir ou au sein des instances de l'UE sur la percée de l'extrême droite en Europe, ne peuvent émouvoir que les lobotomisés du raisonnement politique.
Il se trouve alors que de nombreux grecs prennent conscience de cette grande fraude à l'échelle du continent Européen, à savoir le grand razzia sur ses peuples. L'incontestable gagnant de ces élections en Grèce, est le parti de la gauche radicale Syriza (16%), (à part l'extrême droite de l'Aube Dorée).
Syriza arrive d'ailleurs en tête à Athènes, au Pirée et dans les grandes villes, ce qui peut annoncer le tempo de l'avenir sur le reste du pays. Et si la Grèce devient-telle, presque ingouvernable c'est parce que la loi électorale attribue les premiers deux cent cinquante sièges du Parlement par la règle proportionnelle, puis, les cinquante qui restent, sont « offerts en cadeau » au premier parti. Seulement, même ainsi, le bipartisme de la Baronnie a reçu un coup mortel. Pour la même raison, le parti communiste a été presque sanctionné, car il a réussi à peine d'améliorer son score, dans un contexte où la gauche dans son ensemble a doublé le nombre de ses voix. Je précise pour éviter tout malentendu, que lorsqu'en Grèce on dit « la gauche », ce n'est pas au Pasok que nous pensons, ce dernier, « est considéré comme étant un parti anti-populaire et anti-national, car il appartient à la bancocratie », selon les représentations collectives, après deux ans de Mémorandum.
Ce matin, dans un café athénien on ne disait pas autre chose : « Je suis enseignant, j'ai toujours voté Pasok jusqu'en 2009, je me considère toujours comme socialiste, mais je ne voterai plus jamais Pasok dans ma vie, c'est terminé, ces gens veulent nous faire mourir pour arranger les banques. À nos écoles, nous n'appliquerons pas la reforme dictée par l'Europe, nous n'avons plus peur. Ils veulent augmenter notre temps de travail alors que nos salaires ont été diminués. J'ai perdu 470 euros par mois sur les 1 400 que je touchais, il y a un an environ. Je pense aussi que désormais, nous pouvons ne plus payer les taxes exceptionnelles, surtout en cas de chômage, c'est la fin de la terreur ».
Voilà ce qui est déjà acquis ce lundi : pouvoir rêver. Tous les autres leviers, restent aux mains des bancocrates, sauf l'air du temps. Nos visages sont plus joyeux, exceptés ceux des adeptes du Pasokisme, plongeant très profondément dans leurs journaux ce matin. Le quotidien Ta Nea par exemple, qui a bien choisi son titre : « Le cauchemar d'un pays ingouvernable », mais « cauchemar », pour qui d'abord ? L'horizon demeure brouillé. Rien n'est définitif, sauf la fin du Pasok et de la Nouvelle Démocratie du Mémorandum. Tôt ou tard, on comprendra peut-être que pour se délivrer du Mémorandum, il va falloir se défaire aussi de l'Union Européenne, ainsi que de nos propres errements. En même temps, il faut bâtir une autre politique étrangère, plus équilibrée et moins exclusive. Ce n'est guère évident. Patience, l'avenir devient enfin incertain et chaotique. Bienvenue au pays d'Hésiode.
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