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13 mars 2012 2 13 /03 /mars /2012 15:36
Marianne - Mardi 13 Mars 2012 à 12:00 | Lu 944 fois I 2 commentaire(s)

 

Greek Crisis
Historien et ethnologue, ancien correspondant en France pour la revue grecque Nemecis, Panagiotis...

 

 

Suite des carnets hellénistes de Panagiotis Grigoriou, qui décrit la relative accalmie en Grèce depuis Rhodes. La saison touristique va bientôt ouvrir, tout doit être fait pour accueillir les visiteurs à bras ouverts, en laissant de côté les problèmes du pays. Mais est-ce parce qu'on n'en parle plus qu'ils vont disparaître pour autant ?

 

(Tourisme à Athènes - SAEZ PASCAL/SIPA)
(Tourisme à Athènes - SAEZ PASCAL/SIPA)
Le métronome de la crise n'indique pas le même tempo partout. Dans les îles grecques, et bien au-delà, son signal, pourtant toujours audible, s'atténue quelquefois par l'écho de la mer. À Rhodes, ce signal, trahit pourtant une certaine agitation. C'est la saison du grand rafistolage en direct. Peinture, menuiserie et surtout, l'appréhension du futur. Les hôtels et les autres infrastructures touristiques, sont en ce moment en réfection, car le moment du premier vol charter ne tardera pas. Examiné sous ce prisme, le quasi-imprévisible qui a créé l'événement du 7 mars, comme dirait peut-être Georges Braque en pareilles circonstances, a été largement commenté sous la polémique, à travers les terrasses du vieux port, et dans les cafés, décorés des images du passé.
 
Un vieil homme a même levé sa canne de marche, la tenant fièrement par son pommeau en signe d'indignation... contre les indignés et les politiciens, sans distinction : « Voyez-vous, ces images de Rhodes feront le tour du monde par votre Internet et par les télés, les touristes auront alors peur, c'est du blasphème (sic) à l'encontre de notre tourisme, les indignés ne travaillent-ils pas dans cette branche ? Puis, ces politiciens – escrocs, pourquoi sont-ils venus se montrer ainsi —, c'était bien prévisible, honte, honte à tous, nous creusons notre propre tombe alors tout seuls ».

La réponse fut immédiate : « Monsieur, vous vous trompez, Rhodes et la Grèce c'est le soleil plus désormais les manifestations, les touristes viendront évidement, car ils savent qu'ils ne craignent rien, certains étaient déjà sur la place de la Mairie hier, et ils prenaient bien des photos, vous ne les aviez pas remarqués, ils étaient même plutôt souriants ».
 
Par contre, chez les politiciens, les événements de Rhodes « constituent un mauvais signal, car en dépit de ces actes, il s'agit de protéger et de préserver le fonctionnement de notre régime démocratique », a déclaré devant le conseil des ministres, Lucas Papadémos, le premier, Premier ministre de notre pays à être si... démocratiquement élu, plébiscité même, par tous les automates banquiers, plantés sur notre territoire, d'où sans doute, le dernier sobriquet qu'on lui a collé, « l'automate ».

La spirale de la dette

Alors les automates, Papadémos et les siens ces derniers jours, se déclarent plus que satisfaits, se félicitant entre eux, et si possible devant les caméras, de l'achèvement « réussi » du PSI, autrement-dit, « de la plus grande restructuration de dette de l'histoire d'un pays » selon le journal Le Monde de ce samedi 10 mars.

Car ainsi, la Grèce « évite la sortie de route incontrôlée mais doit néanmoins finir d'organiser sa propre faillite. Certes, 83,5 % des créanciers privés de la Grèce ont accepté d'abandonner 53,5 % de leurs titres, a indiqué Athènes, vendredi 9 mars au matin. Mais le gouvernement grec a décidé d'utiliser la force — et de contraindre les prêteurs récalcitrants à prendre leurs pertes. L'opération doit permettre d'effacer la moitié des 206 milliards d'euros d'emprunts du pays souscrits par les banques, assureurs et autres fonds. Et contribuer à ramener à 120,5 % du produit intérieur brut la dette hellène en 2020, contre 160 % aujourd'hui. Un niveau très élevé, qui ne met pas le pays à l'abri ».
 
Sauf que le PIB grec, devrait passer de –7,5 % à +2 %, en quelques mois, donc la nouvelle dette ne sera pas viable de toute façon... les citoyens non plus. C'est sans doute ce dernier paramètre « gênant », qu'un retraité a voulu aussitôt rappeler à la suffisance du ministre de l'Economie Venizélos, en lançant sur lui un yaourt, en pleine réunion nationale du PASOK ce samedi, aux quartiers sud d'Athènes. « Un homme âgé, alors dérangé et problématique, qui malheureusement a réussi à pénétrer dans les locaux », ont indiqué les proches du ministre. Venizélos, selon la presse, a alors tout simplement changé de veste gardant tout son sang froid, minimisant ainsi l'incident.

Espoir et tourisme

Mais à Rhodes, on sait faire aussi dans la diachronie à travers l’identité égéenne et méditerranéenne, par ses métamorphoses culturelles depuis les temps anciens, alors toujours visibles. Puis, comme pour Elytis, le poète, la mer Égée renvoie à l’éternité, une « mer perpétuelle », et on peut comme lui, penser au « soleil et [aux] années, qui viendront sans nous, porter déjà le deuil et chanter celles, qui déjà sont passées, si cela est réel ».
Pourtant, et avant toute éternité, comme il faut bien lutter pour la vie... sous « l'éternité » de la dette souveraine, on peut aussi juger finalement opportun, que de préparer ses bagages pour l'Australie, et pour les années qui viendront encore heureusement avec nous, et... avec tous les automates de la terre réunis, qui nous sont alors tombés sur la tête.
 
Comme ces deux amis entre eux, en train de pêcher, rencontrés sur la plage au nord de la ville, à l'heure du passage du ferry en provenance du Pirée : « Nous nous mordons la queue sur le tourisme je crois. Nous nous gargarisons le vinaigre de la globalisation à travers la gorge. Les touristes viendront et paieront encore moins cher, quelques dizaines d'euros au mieux, pour une pension complète dans les hôtels étoilés donnant sur la baie. Ces mêmes hôtels qui nous réclament à nous, les autochtones, 80 euros par nuit et sans pension. Donc, pour faire venir nos amis d'Athènes désirant séjourner à l'hôtel, c'était l'été dernier, nous avions réservé et réglé nos factures par Internet, via les tour opérateurs de Londres. Mon épouse est au chômage, elle sera peut-être embauchée dans un hôtel, et encore, il faut activer notre réseau, nous ne sommes plus très jeunes voyez-vous, puis, elle travaillera pour combien, 500 euros pas mois, 12h par jour ?

Moi même, je suis employé dans l'administration locale, mon salaire est ramené à 900 euros, nous avons deux enfants... Ma sœur vit en Australie, nous pensons éventuellement partir mais si possible, après l'été. Nous hésitons encore, car nous étions heureux chez nous, c'est notre île, nous l'aimons, puis, paraît-il que Rhodes c'était de la Grèce riche qu'en pensez-vous ? Nous avons vu à la télé qu'à Salonique des gens ont faim, Papadémos et les autres, nous ne voulons plus les voir, notre pays est si doux et eux, ils sont tellement durs, au diable tous 
».
 
D'autres par contre, ne partagent pas cet avis. Des universitaires par exemple, fréquentant les cafés branchés de Rhodes, lecteurs parfois assidus de la presse gouvernementale, se plaignant ainsi de la baisse de leurs salaires, ceci-dit, ils espèrent encore, «préparer la retraite pour bientôt, si possible bonne, c'est à dire, mille deux cent euros, plus un complément ». Ni lutte, ni indignation, chez certains d'entre eux en tout cas, autrement-dit, le sort de la Grèce raconté comme une mauvaise météo, puis, retour aux petites affaires de la faculté, la résistance finalement en option, facultative.

 

En revanche, Petros et sa fiancée Fani, elle, employée auprès d'une agence maritime, lui travaillant dans le tourisme, se disent prêts pour un autre avenir, désormais obligatoire selon eux :
« Nous y resterons et nous nous battrons jusqu'au bout. Par le travail et dans la lutte. Les salopards partiront d'ici un jour, pas nous, il est hors de question, mais sur Rhodes, les mentalités sont un peu lentes, disons ».
 
Le jeune homme de 21 ans, déféré devant la justice sur l'île des Chevaliers, à la suite des événements du 7 mars, a été condamné vendredi à quinze mois de prison avec un sursis de trois ans. « Ces accusations sont fausses, j'ai été poussé par la foule, je me suis retrouvé sur le policier et c'est ainsi qu'il a été blessé, c'était involontaire », a-t-il precisé, dans sa déposition au tribunal. Son avocat, Stelios Alexandris a déclaré aussitôt aux journalistes de la presse locale, que « le vrai perdant est notre démocratie ainsi blessée ». 
 
J'ai recueilli la version de trois militants de la gauche locale, SYRIZA et KKE (P.C.) sur le 7 mars. « Certains des nôtres étaient présents sur la place, mais nous avons officiellement appelé à ne pas participer aux... assauts, non pas par quelconque connivence avec les politiciens des grands partis du mémorandum, mais parce que nous sommes en train de subir une attaque sans précédent, de dénigrement des nos actions politiques. Cette propagande, cette pratique anti-gauche alors très sombre, renvoie aux habitudes des années 1950-1960.

Les indignés, disons de la première ligne, étaient alors des sympathisants d'autres mouvements, l'extrême droite ne devait pas être trop loin non plus, bien que très peu nombreuse sur Rhodes, puis, il y avait les jeunes du mouvement anarchiste, bien de chez nous. Nous avons même contribué à faire libérer le jeune garçon anarchiste, arrêté par la police. Il l'ont "simplement pris", car il était déjà repéré lors d'une action précédente de son mouvement, seulement, nous ne pouvons pas accepter une telle intimidation de la part des autorités.

Ainsi finalement, le juge pour mineurs n'a retenu aucune charge contre lui. Nous pensons que des approbations publiques sur les places initiales, nous devons arriver à un autre stade plus constructif, déjà, nous attendons les élections sous les intimidations des adversaires politiques. Le système mise gros depuis le Mémorandum II, des journalistes nous ont dit qu'à Athènes déjà, beaucoup d'argent a circulé en février pour acheter ou "corriger" des médias. Des journalistes de la presse écrite ou de la radio supposés anti-mémorandum, qui désormais "admettent l'inéluctable" ; nous pensons par exemple que le revirement survenu à la Radio-9, appartient à ce contexte. Il ne faut plus se voiler la face, la gauche a perdu toutes ses batailles depuis deux ans, désormais, il ne faut plus perdre, car bientôt, elle peut ne plus exister, elle sera éventuellement mise hors la loi, et il y a à craindre que les sociétés occidentales de 2012 ne soient pas prêtes pour mener la lutte clandestine, comme en 1940
».

Un pays ingouvernable ?

Chez les bancocrates aussi on réfléchit. Le gouvernement de l'automate, d'ailleurs remanié depuis quelques jours suivant le stratagème désuet de la poudre aux yeux, prend acte du châtiment de Rhodes et se prépare pour la fête nationale du 25 mars. Nous commémorons la Révolution du 1821 et la liberté retrouvée, après une longue domination Ottomane. Ainsi, et de son côté, l'hebdomadaire de l'extrême droite « La Cible », paru jeudi, présente sur sa Une, la photographie retouchée du bâtiment de l'Assemblée Nationale, peint... en treillis, sous le titre : « La seule solution face à une Europe qui vacille et à un régime en décomposition, c'est l'État National. En Grèce, hier, comme aujourd'hui, c'est le Peuple qui fait la Résistance et l'Armée qui fait la Révolution ! - Les parachutistes réservistes de nouveau en tête, ils seront là où il faut, ce 25 mars».

Et dans les pages intérieures, on peut lire l'appel de cette Union des Réservistes des Forces... effectivement très Spéciales : « Nous appelons à manifester Place de la Constitution, devant le monument du soldat inconnu pour enfin montrer au gouvernement d'occupation et à ses déchets hellénophones qui nous gouvernent, qu'il ne pourront plus briser la réaction du peuple grec (...) ».
 
Je ne suis pas un adepte du conspirationnisme à toutes les sauces rallongées, seulement, je trouve d'une assez curieuse coïncidence, que les déclarations récentes de Michel Rocard, certes formulées différemment, expriment au fond la même idée, sur cette « seule solution, car ce pays devient ingouvernable », (voir le billet précédent).
 
Au même moment sur Internet, un texte se réclamant du mouvement des Indignés, appelle à occuper les rues et les places ce 25 mars et d'y rester. Donc effervescence. Au P.C. grec, on se dit inquiet des agissements des parachutistes réservistes, car « un coup provocateur serait en préparation ». Ceci-dit, on se demande parfois, et pas très ouvertement, chez certains camarades à gauche, « pourquoi un État national serait-il obligatoirement issu d'une idée accaparée et orientée par l'extrême droite, et ainsi remorquée dans ses eaux territoriales, alors troubles... La gauche désunie finira par... perdre ses eaux et comme la politique s'apparente parfois à la mer, elle traversera les portillons étanches comme dans les entrailles du Titanic. » (paroles entendues à Athènes, en janvier 2012).
 
Pas loin de la ruelle Pier (et non pas Pierre !) et Marie Curie à Rhodes, des chats se nourrissent dans les poubelles alors remplies, en attendant les vacanciers, tout comme la presse locale, qui multiplie les reportages, sur les grands voyagistes britanniques, allemands, français ou russes. « La saison sera inaugurée comme toujours, après le 25 mars », peut-on aussi entendre ici ou là, dans les ruelles de la vieille ville. Et à Athènes alors ?
 
 
Retrouvez Panagiotis Grigoriou sur son blog.

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