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14 août 2013 3 14 /08 /août /2013 21:48

 

 

 Médiapart

|  Par Juliette Chapalain et lorraine kihl et Walid Youssef

 

 

Les forces de l'ordre ont violemment évacué les partisans du président déchu qui occupaient deux places du Caire depuis six semaines. Le ministère de la santé égyptien faisait état de 278 morts mercredi soir alors que les Frères musulmans parlaient de milliers. L'état d'urgence est déclaré pour un mois dans tout le pays. Le vice-président par intérim et prix Nobel de la paix Mohamed El-Baradei a démissionné. 

 

 

 

Les corps de membres des Frères musulmans et de partisans de Morsi allongés à la mosquée Rabiya Al-Adawiyya, le 14 août 2013
Les corps de membres des Frères musulmans et de partisans de Morsi allongés à la mosquée Rabiya Al-Adawiyya, le 14 août 2013© REUTERS/Amr Abdallah Dalsh
 
 

L’évacuation par les forces de l’ordre égyptiennes de deux places du Caire, occupées depuis six semaines par des partisans du président déchu Mohamed Morsi, s’est transformée, mercredi 14 août, en un véritable bain de sang, au Caire et dans certaines villes de province. L'état d'urgence est déclaré dans tout le pays pour un mois, et selon Associated Press, le gouvernement a annoncé la mise en place d'un couvre-feu nocturne au Caire et dans dix autres provinces. Il se tiendra de 19 h à 6 h du matin, selon une annonce du conseil des ministres du gouvernement par intérim. Le vice-président et prix Nobel de la paix Mohamed El-Baradei a présenté sa démission. Il avait été envisagé pour le poste de premier ministre, mais sa nomination, décriée tant par les islamistes que la coalition laïque, avait été annulée.

 

 

Dans sa lettre de démission au président par intérim, Mohamed El-Baradei a déclaré : « Comme vous le savez, j’avais imaginé plusieurs façons de disperser ces manifestants de manière pacifique, et suggéré des procédés pour entamer une réconciliation nationale. Mais, après ce jour, je pense que nous paierons le prix fort pendant longtemps avant l’avènement de la réconciliation. Par conséquent, il est devenu incroyablement difficile pour moi de porter la responsabilité d’actions que je ne cautionne pas, de décisions dont je crains les conséquences, et je ne peux pas être responsable d’une seule goutte de sang versée. Les seuls qui profitent des événements d’aujourd’hui sont les terroristes, les anarchistes, les extrémistes, et vous feriez bien de vous souvenir de ce que je vous avais dit. Que Dieu bénisse l’Égypte et son peuple. »

L'AFP avance le nombre de 140 manifestants pro-Morsi tués sur la place Rabiya Al-Adawiyya. Un bilan réalisé dans des morgues improvisées, qui ne tient pas compte des morts éventuels dans les autres rassemblements du Caire, ni de ceux d'autres affrontements en cours dans le pays. Des dizaines de blessés et de morts seraient acheminés vers les hôpitaux toutes les minutes, selon des journalistes sur place : « Le nombre de cadavres a triplé en moins de 15 minutes dans une chambre », a twitté un membre du New York Times

 

 

Les Frères musulmans évoquent un « massacre » et le chiffre de 2 200 morts et d'au moins 10 000 blessés, relate Le Monde. Quant au ministère de la santé, il chiffre à 278 le nombre de morts pour l'ensemble du pays. 

 

Exfiltration de militants par la police et utilisation de bombes lacrymogènes, dans la matinée du 14 août. © Al-Jazeera

Bulldozers et voitures pour évacuer les campements


Depuis six semaines, les partisans de Mohamed Morsi occupent deux places de la capitale égyptienne. Situé autour de la mosquée Rabiya Al-Adawiya, le principal campement regroupait plusieurs milliers d'hommes. Son évacuation, laissée en suspens à la faveur du ramadan, était attendue, contrairement à la tournure extrêmement violente prise par les événements. La police a entièrement bouclé les quartiers des deux campements mercredi matin avant d'envoyer véhicules blindés et bulldozers. « À l'aube ce matin, j'étais au campement près de la mosquée de Rabiya al-Adawiyya dans le quartier de Nasser City au Caire, raconte le journaliste Mike Giglio, dans Newsweek. Vers 7 h, j'ai vu les forces de sécurité s'engager sur la route. Une voiture blindée noire de police a pris la tête, suivi par les transporteurs sables. Les manifestants ont paniqué. Ils avaient construit des barricades de sacs de sable et de pavés autour des tentes qui abritaient quelque 5 000 partisans de Morsi, peut-être plus. Mais rien qui nécessite que les forces de sécurité amènent des bulldozers. »

 

 


Afficher Bain de sang au Caire sur une carte plus grande



Les tentes ont été enfoncées et les manifestants assaillis de gaz lacrymogènes. Un journaliste de CNN a évoqué des tirs venant des toits des immeubles. Selon des témoignages concordants, plusieurs personnes auraient été abattues. Les personnes enfermées dans le camp de Rabiya Al-Adawiyya et qui ne souhaitaient pas poursuivre les affrontements ont été autorisées à rentrer chez elles aux alentours de 17 h 30, selon les images diffusées sur la chaîne égyptienne ONTV, au même moment, des manifestants ont mis le feu au ministère des finances, selon cette même chaîne. 

Selon le ministère de l'intérieur, le second camp, place Nahda, est passé sous le contrôle de la police en fin de matinée et 200 opposants « armés » ont été arrêtés.



 
Affrontements sur le pont du Six Octobre. Un hummer de la police est précipité du pont alors que cinq hommes sont à l'intérieur© Chaîne égyptienne Elfagr Mubasher
 

Armes automatiques contre jets de pierre ?

Sur Al-Jazeera, CNN et dans la presse anglo-saxonne, plusieurs journalistes ont affirmé ne pas avoir vu de manifestants pro-Morsi faire usage d'armes à feu. Toutefois, Video 7 a diffusé des images montrant des manifestants munis d'armes automatiques dans le quartier d'El Mohandesin, au Caire : 

 

Des pro-morsi armés, rue de la Ligue des pays, au Caire.
 
 
 Des manifestants pro-Morsi tirent en direction de la police.© Vidéo7

 

Si la situation au camp de la mosquée Rabiya Al-Adawiyya était encore confuse mercredi matin, le ministère de l’intérieur a par contre affirmé que la place Nahda était « totalement sous contrôle ». Environ 200 « manifestants armés » y auraient été arrêtés. D'après Reuters, les manifestants ont tenté d'établir un camp sur une troisième place de la ville : Mohamed Mahmoud. 

Les manifestations se sont également tenues dans diverses provinces égyptiennes. Selon le Ahramonline, des centaines de manifestants ont bloqué une route principale à Assiut, plusieurs marches de protestation se sont déroulées à Alexandrie et à Aswan, où les manifestants ont jeté des pierres sur les bureaux du gouvernement, et des manifestants ont mis le feu à des véhicules de police à Minya. Cinq personnes seraient mortes à Suez. Plusieurs routes majeures ont été bloquées dans le pays, notamment celles reliant Le Caire à Alexandrie. Selon l’agence officielle Mena, des pro-Morsi auraient incendié trois églises coptes dans la province d'el-Menia, dans le centre de l’Egypte. Le responsable d’Human Rights Watch en Allemagne, Wenzel Michalski, lui, compte six églises attaquées. Des commerces et magasins détenus par des coptes auraient également été visés. 

Les Frères musulmans, de leur côté, ont appelé les Égyptiens à « descendre dans la rue contre le massacre », jeudi 15 août. Dans la soirée, Essam Al-Erian et Mohamed Al-Beltagi, deux dirigeants de la confrérie, ont été arrêtés, selon Reuters. La fille de ce dernier avait été tuée par balles dans l'après-midi.

Les journalistes, visés

Deux journalistes sont morts et beaucoup ont été arrêtés. Un caméraman de la chaîne britannique Sky News a été tué par balles au Caire, selon la chaîne, ainsi que la jeune Habiba Ahmed Abd Elaziz, reporter d'Xpress, le site anglophone de Dubaï. Mike Giglio, le correspondant de Newsweek, raconte sur son compte Twitter avoir été arrêté avec plusieurs confrères par la police : « Les flics ont pris mon ordinateur portable et l'ont ouvert sur place. Ils m'ont frappé au visage jusqu'à ce que je leur donne le mot de passe. Ordinateur, porte-feuille et portable ne m'ont pas été rendus. »

 

© Twitter
 

Il est ensuite emmené avec un groupe de personnes interpellées dans un stade de foot, où les policiers anti-émeute entourent un groupe de prisonniers agenouillés. Le journaliste raconte avoir croisé d'autres journalistes lors de sa détention, parmi lesquels deux Français.
« J'ai été arrêté en même temps qu'un photographe indépendant égyptien, Mahmoud Abou Zeid, et un autre français, Louis Jammes (...) Ils ont aussi été frappés après avoir été identifiés comme journalistes. Je suis aussi tombé sur le photojournaliste français Mani. (...) Mani était du côté des manifestants à Rabiya, il essayait de filmer. » L'envoyé spécial d'Al-Jazeera au Caire a été arrêté en fin de journée.

Le correspondant du Guardian au Caire, Patrick Kingsley, raconte que, sous une pluie de balles, les pro-Morsi préparent des cocktails Molotov dans la rue. Les accès aux campements et aux alentours ont été bouclé par la police. « À ceux qui essayent d'accéder à Rabaa : laissez tomber. »

 

© Twitter
 

Le journaliste a été arrêté peu après à un check-point.

Les condamnations unanimes ont émergé au cours de la journée

  • Amnesty International : « La promesse des autorités d’utiliser la méthode fatale en dernier recours seulement a été brisée. Bien trop souvent par le passé, les forces de sécurité égyptiennes ont usé d’une force excessive envers les manifestants, entraînant des conséquences catastrophiques », a déclaré Philip Luther, directeur d’Amnesty International au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Selon l’ONG, le sit-in de Rabia Al-Adawiyya est interdit d’accès, et plus de 200 personnes ont été tuées durant les affrontements et autres violences politiques depuis la chute du président Morsi.
  • L'OTAN : le secrétaire général de l'OTAN Anders Fogh Rasmussen a déclaré : « Je suis profondément concerné par la situation en Égypte, et les effusions de sang incessantes. Je déplore la perte des vies. L'Égypte est un partenaire important pour l'OTAN, pour le dialogue méditerranéen. J'appelle les deux camps à refréner la violence et à travailler à la restauration du processus politique. » 
  • L’Union européenne : « J'appelle les forces de sécurité à faire preuve de la plus grande retenue et tous les citoyens égyptiens à éviter de nouvelles provocations et une escalade de la violence », a écrit la chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton dans un communiqué.
  • L'ONU :  le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon « regrette que les autorités égyptiennes aient choisi la force pour répondre aux manifestations en cours ». « Bien que l'Onu continue de réunir des informations précises sur les événements de la journée, il semble que des centaines de personnes ont été tuées ou blessées dans les affrontements entre les forces de sécurité et les manifestants », a précisé un communiqué en provenance de l'organisation mondiale.
  • Les États-Unis : « Les États-Unis condamnent sévèrement l'usage de la violence envers les manifestants égyptiens », a annoncé Josh Earnest, l'un des porte-parole de la Maison Blanche. « Nous avons appelé à maintes reprises les forces de sécurité égyptiennes à faire montre de réserves. (...) Tout comme nous avons vivement incité les protestataires à manifester avec calme », a-t-il rappelé. 
  • La France : « La France déplore très vivement les violences survenues au Caire lors des opérations d'évacuation », a déclaré un porte-parole du Quai d'Orsay.
  • L'Iran :  le ministère des affaires étrangères redoute la « guerre civile ». « L'Iran suit de près les événements amers en Égypte, désapprouve les actions violentes, condamne le massacre de la population et met en garde contre ses graves conséquences », a affirmé le ministère iranien des affaires étrangères, dans un communiqué.
  • Le Qatar : le principal soutien des Frères musulmans a dénoncé l'assaut de la police. « Le Qatar dénonce avec force la méthode utilisée contre les manifestants pacifiques (...) qui a coûté la vie à un certain nombre d'innocents sans armes », a déclaré un porte-parole du ministère des affaires étrangères du Qatar.
  • La Turquie : « La communauté internationale, notamment le Conseil de sécurité des Nations unies et la Ligue arabe, doit agir immédiatement pour faire cesser ce massacre », a déclaré le premier ministre turc Recep Tayyip Erdoğan, dans un communiqué.
  • L'Allemagne :  Berlin a demandé une « reprise immédiate des négociations » pour contrer « toute nouvelle effusion de sang ».
  • L'Angleterre : Londres « condamne » l'utilisation de la force pour disperser les manifestants.
  • L'Italie : la ministre italienne des affaires étrangères a estimé qu'il était « nécessaire que les forces de police exercent le maximum d'auto-contrôle et tous doivent éviter toute incitation à la violence ».

Montée des violences fin juillet

Avant ces événements, la nuit du 26 au 27 juillet 2013 était considérée comme la plus dramatique depuis le début de la révolution en Égypte, en janvier 2011. Les chiffres différaient également selon les sources. Au moins 120 personnes avaient été tuées lors des affrontements entre les partisans de l’ancien président déchu, Mohamed Morsi, et les forces de l’armée dans la banlieue du Caire, selon les Frères musulmans. De son côté, le ministère égyptien de la santé ne faisait état que de 20 morts. 

Cette flambée de violence fait suite à une montée des tensions depuis plusieurs jours en Égypte. Le 24 juillet, le général Abdel Fattah Al-Sissi, homme fort de l’armée qui avait mené l'opération de destitution du président Mohamed Morsi, avait exhorté « tous les Égyptiens honnêtes » à manifester pour lui « donner mandat pour en finir avec la violence et le terrorisme »Cette exhortation avait été interprétée comme un appel ouvert à une confrontation directe de la rue avec les Frères musulmans, qui avaient appelé leurs sympathisants à manifester contre le coup de force de l'armée. 

La chute de Morsi, point de départ des affrontements

Depuis dimanche 30 juin, soit un an jour pour jour après l'élection du représentant des Frères musulmans à la tête du pays, Tamarod (“rébellion” en arabe) avait réclamé la démission du chef d'État égyptien avant le mardi 2 juillet, 17 heures, et assurait avoir collecté plus de 22 millions de signatures, soit plus que le nombre de votes récoltés par Mohamed Morsi lors de la présidentielle. Le mouvement contestataire avait rassemblé plus de 14 millions d'Égyptiens dans les rues du Caire les premiers jours. Parmi les partisans de Tamarod, on retrouve des personnalités laïques, libérales, ou de gauche, dont le cyberdissident charismatique de la révolution égyptienne de 2011, Wael Ghonim.

 

Sur Twitter, le cyberdissident Wael Ghonim prend parti pour Tamarod

Justifiant qu'« il n'y a pas d'autre alternative que la fin politique du pouvoir des Frères musulmans et de leur représentant Mohamed Morsi », le mouvement a rejeté tout dialogue avec le président. Les partisans de Tamarod s'étaient attaqués au siège des Frères musulmans au Caire, incendié pendant la nuit du 1er au 2 juillet.

Tamarod réclamait également de l'armée égyptienne qu'elle se positionne clairement pour ou contre son action, laquelle avait adressé le 1er juillet, un ultimatum de 48 heures au gouvernement pour résoudre cette crise politique. 

Après la chute de Mohamed Morsi le 3 juillet, destitué par l'armée et emprisonné, l'économiste et ex-ministre des finances Hazem El-Beblaoui, avait été nommé le 9 juillet premier ministre du gouvernement de transition par le président par intérim. Un gouvernement par intérim dont les Frères musulmans sont absents, et qui est vivement contesté par leurs partisans. 

 

 

 

 

 

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